22 novembre 1992 : Le jour où Monica Seles a remporté son troisième titre consécutif au Masters
Le 22 novembre 1992, Monica Seles affronte Martina Navratilova pour viser une troisième couronne d’affilée au Masters
Ce qui s’est passé ce jour-là : Seles voit triple au Masters
Ce jour-là, le 22 novembre 1992, lors d’un véritable choc des générations, Monica Seles, 18 ans, domine Martina Navratilova, 36 ans (7-5, 6-3, 6-1), pour s’adjuger un troisième titre consécutif au Masters.
Grâce à cette victoire, Seles, n°1 mondiale depuis mars 1991, confirme sa domination sur le circuit, après avoir déjà remporté trois titres du Grand Chelem en 1992. C’est également sa dernière apparition au Masters avant son agression, en avril 1993.
Les actrices : deux reines, Monica Seles et Martina Navratilova
• Monica Seles au sommet
Monica Seles connaît le succès à un très jeune âge. Elle fait ses premiers pas sur le circuit en 1988, à 14 ans, à Boca Raton, où elle bat la 31e mondiale Helen Kelesi (7-6, 6-3). Ses frappes à deux mains des deux côtés, son style de jeu précurseur tout en prise de balle tôt et en puissance, et bien sûr les cris caractéristiques qu’elle pousse à chaque frappe, révolutionnent le tennis féminin.
En 1989, elle dispute sa première saison complète chez les pros et, après avoir gagné son premier tournoi au printemps, à Houston, elle participe à son premier tournoi du Grand Chelem à Roland-Garros. Sa première apparition à Paris fera date. Au troisième tour, opposée à la 4e mondiale Zina Garrison, la jeune Monica, 15 ans, entre sur le Central en distribuant des fleurs au public avant d’écraser son adversaire 6-3 6-2.
Elle se hisse jusqu’en demi-finales où elle est seulement battue en trois sets (6-3, 3-6, 6-3) par l’invincible Steffi Graf, vainqueure des cinq derniers tournois du Grand Chelem. En 1990, à 16 ans, elle devient la plus jeune vainqueurr de l’histoire de Roland-Garros. C’est le début de sa domination.
En mars 1991, à dix-sept ans et trois mois, elle était la plus jeune numéro 1 mondiale, détrônant Steffi Graf, qui occupait cette place depuis l’été 1987. A partir de janvier 1991, elle remporte sept des huit tournois du Grand Chelem auxquels elle participe, en plus d’une défaite en finale de Wimbledon 1992, soit cinquante-six victoires en majeur pour une seule défaite. Elle gagne également le Masters à deux reprises, en 1990 et 1991.
• La légende Martina Navratilova
Martina Navratilova, née en 1956 en Tchécoslovaquie, est, selon Billie Jean King, “la plus grande joueuse de simple, de double et de double mixte ayant jamais vécu”.
Depuis le début de l’ère Open en 1968, aucun joueur, hommes et femmes confondus, n’a gagné plus de tournois que Navratilova en simple (167) ni en doubles (177), et personne n’a gagné plus de matches qu’elle (2189).
Navratilova a gagné un total de 18 tournois du Grand Chelem en simple, avec un record de 9 titres à Wimbledon dont 6 gagnés consécutivement entre 1982 et 1987.
En 1992, elle a déjà accumulé 31 titres majeurs en double et 6 en double mixte. Il ne lui manque alors que la couronne du double mixte à l’Open d’Australie pour boucler le « Grand Chelem total » qui consiste à remporter les quatre tournois du Grand Chelem à la fois en simple, en double et en double mixte.
Elle détient également un record de six tournois du Grand Chelem gagnés à la suite, entre Wimbledon 1983 et l’US Open 1984 (l’Open d’Australie se jouait alors en décembre), et a occupé la première place mondiale pendant 322 semaines, ce qui, en 1992, est encore un record. Martina Navratilova, gauchère, pratique le service-volée mieux que quiconque auparavant.
D’après sa rivale Chris Evert, elle a révolutionné la condition physique dans le tennis féminin, apportant notamment l’idée de pratiquer d’autres sports, tel le basket-ball, pour s’entraîner physiquement. En novembre 1992, elle est encore 5e mondiale, après avoir atteint les demi-finales de Wimbledon (battue par Seles, 6-2, 6-7, 6-4).
Le lieu : le Madison Square Garden de New York
Le Masters féminin, officiellement nommé Virginia Slims Championships, a été créé en 1972. Sa première édition à lieu à Boca Raton, en Floride, et le tournoi se déplace ensuite à Los Angeles puis Oakland avant de s’installer pour de bon à New York en 1979. Là, le tournoi se déroule au Madison Square Garden, qui peut accueillir 18 000 spectateurs.
En 1994, les 16 meilleures joueuses du monde sont qualifiées pour le Masters, et le tournoi est constitué d’un tableau à élimination directe. Depuis 1984, c’est la seule épreuve féminine où la finale se dispute au meilleur des cinq manches. Navratilova, avec ses 8 victoires, y détient le record du plus grand nombre de titres, mais Seles a remporté les deux précédentes éditions, en 1990 et 1991.
L’histoire : Seles plus dominatrice que jamais
La finale du Masters 1992 oppose deux générations, Monica Seles, 18 ans, étant deux fois plus jeune que Martina Navratilova, 36 ans. Navratilova, avec ses 18 titres du Grand Chelem, est une véritable légende, mais elle n’a pas remporté de titre majeur depuis Wimbledon 1990, alors que Seles est la plus jeune joueuse de l’histoire à détenir 7 titres du Grand Chelem.
Les gens me disent “tu ne ressembles pas à une athlète, mais à quelqu’un de normal’’
Monica Seles
Leurs styles de jeu sont également très différents. Navratilova joue un jeu de service-volée traditionnel, tandis que Seles tient sa raquette à deux mains en coup droit comme en revers, et déploie un nouveau style de jeu de fond de court tout en puissance.
Au premier set, Navratilova démarre fort et sert même pour le set à 5-4, mais elle se fait débreaker, et Seles empoche la première manche, 7-5. Au deuxième set, la nonuple championne de Wimbledon se détache 3-1, mais la n°1 mondiale serre alors le jeu et, accélérant la cadence, survole la suite des débats, 6-3, 6-1.
Avec ce troisième titre consécutif au Masters, son 10e titre en 1992, Seles termine en beauté l’une des plus grandes saisons de l’histoire de son sport. Elle règne sans partage sur le circuit, malgré les quelques remarques négatives entendues à New York à propos de son apparence.
“Je suis différente, je le sais, dit-elle, d’après Sports Illustrated. Je ne ressemble pas à une n°1 mondiale. Les gens me disent “tu ne ressembles pas à une athlète, mais à quelqu’un de normal’’. Je n’ai peut-être pas l’air d’une n°1 mondiale, mais la 2e place est loin derrière moi.”
La postérité du moment
Martina Navratilova obtiendra son dernier grand résultat à Wimbledon 1994, où elle sera finaliste malheureuse face à Conchita Martinez (6-4, 3-6, 6-3), avant de prendre sa retraite à la fin de la saison. En 2000, Navratilova reviendra sur le circuit, principalement en double. A l’Open d’Australie 2003, en s’imposant en double mixte, associée à Leander Paes, elle complètera à 46 ans son « Grand Chelem total ». Personne, hommes et femmes confondus, n’avait encore triomphé en Grand Chelem à un âge aussi avancé.
En 2004, elle recevra une invitation controversée dans le tableau de simple à Wimbledon. Agée de 47 ans, elle passera néanmoins le premier tour, écartant la 102e mondiale Catalina Castano 6-0 6-2, avant de perdre contre Gisela Dulko, 59e mondiale, 3-6 6-3 6-3. En 2006, à quelques semaines de son 50e anniversaire, elle gagnera le double mixte à l’US Open, associée à Bob Bryan, et sur cette dernière victoire, mettra un terme définitif à sa carrière.
Monica Seles s’imposera ensuite l’Open d’Australie 1993, mais sa domination s’arrêtera de la plus tragique des manières lorsqu’elle sera poignardée en plein match par un déséquilibré en avril 1993. Même si elle finira par revenir et ajouter l’Open d’Australie 1996 à son palmarès, elle n’atteindra plus jamais de sommets comparables à ses premières années.