13 août 1999 : Le jour où Steffi Graf a pris sa retraite
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Le 13 août 1999, au cours d’une conférence de presse, la légende du tennis Steffi Graf annonce sa retraite.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi cela a marqué l’histoire du tennis
Le 13 août 1999, au cours d’une conférence de presse, la légende du tennis Steffi Graf annonce sa retraite, dix jours après son dernier match sur le circuit. Bien qu’elle ait déjà annoncé à Roland-Garros puis à Wimbledon que 1999 serait son ultime saison, l’annonce constitue tout de même une surprise. Le monde du tennis s’attendait en effet à ce qu’elle continue au moins jusqu’à l’US Open, puisqu’elle peut encore prétendre au titre : 3e mondiale, elle vient de s’imposer à Paris et d’atteindre la finale à Wimbledon. Ce jour marque également la fin d’une époque pour le tennis allemand, Boris Becker ayant lui aussi prévu de s’arrêter à la fin 1999.
Steffi Graf, légende du tennis
Steffi Graf, née en 1969, est l’une des plus grandes joueuses de tous les temps. Son palmarès est une accumulation de records. En 1982, à l’âge de 13 ans, l’Allemande devient la plus jeune joueuse à obtenir un classement WTA. Après avoir remporté son premier tournoi du Grand Chelem à Roland-Garros en 1987 (aux dépens de Martina Navratilova, 6-4, 4-6, 8-6), elle réalise un unique Grand Chelem doré en 1988, ajoutant une médaille d’or olympique aux quatre titres du Grand Chelem, exploit inégalé dans l’histoire du tennis. Sa domination culmine à Roland-Garros, où elle écrase Natasha Zvereva lors de la plus courte finale jamais disputée dans un tournoi majeur (6-0, 6-0).
Graf détient également le record de huit saisons terminées à la première place mondiale (1987-1990 puis 1993-1996), et en tout, elle reste 377 semaines au sommet du classement, ce qui constitue un autre record. L’Allemande remporte 22 tournois majeurs au long de sa carrière, et en 1995, elle devient la première joueuse de l’histoire à avoir gagné chacun des Grands Chelems à quatre reprises. Pendant ces années, sa seule vraie rivale se nomme Monica Seles, qui domine le tennis et lui subtilise la première place mondiale en 1991 et 1992. Mais elle est tragiquement poignardée en avril 1993, et ne reviendra jamais à son meilleur niveau.
En 1997, Graf se blesse au genou et doit subir une opération qui met un terme à sa saison juste après Roland-Garros. Alors que les médecins ne sont pas certains qu’elle puisse rejouer au tennis, elle est de retour en 1998. Mais l’Allemande ne parvient à gagner qu’un seul tournoi, à Philadelphie, et n’atteint même pas un quart de finale en Grand Chelem, finissant l’année à la 9e place mondiale. Les experts et les journalistes parlent alors déjà de déclin. Mais en 1999, à Roland-Garros, Graf se rappelle à leur bon souvenir : battant successivement les trois meilleures joueuses mondiales, elle va chercher un sixième sacre à Paris, à l’issue d’une dramatique finale remportée face à la N°1 mondiale Martina Hingis (4-6, 7-5, 6-2). Un mois plus tard, elle dispute la finale de Wimbledon, où elle est battue par Lindsay Davenport (6-4, 7-5). Graf remonte alors à la 3e place mondiale.
Son jeu s’appuie sur un énorme coup droit avec lequel elle fait pratiquement tout ce qu’elle veut, à tel point que le célèbre journaliste Bud Collins la surnomme « Fraulein Forehand » (« Mademoiselle Coup Droit »). Elle dispose aussi d’un jeu de jambes phénoménal et d’un superbe revers slicé avec lequel elle neutralise ses adversaires.
L’histoire : Graf raccroche (presque) au sommet
En août 1999, Steffi Graf a déjà annoncé à deux reprises qu’elle jouait sa dernière saison. A Paris, lors de la remise des prix, alors qu’elle connaissait à nouveau la gloire après sa superbe victoire sur Martina Hingis (4-6, 7-5, 6-2), elle avait déclaré aux spectateurs que c’était son ultime Roland-Garros. A Wimbledon, après sa défaite en finale face à Lindsay Davenport (6-4, 7-5), elle avait dit la même chose au public britannique avant de quitter le court sans un geste d’adieu.
Tout le monde pense encore qu’avec d’aussi bons résultats, Graf continuera au moins jusqu’à l’US Open pour tenter de finir sa carrière sur un dernier succès en Grand Chelem. De fait, après presque deux ans de galère depuis son opération du genou, elle est enfin de retour dans le top 3, et même si la nouvelle génération est déjà affûtée, elle peut toujours tenir tête aux jeunes joueuses. Elle vient encore de le prouver au All England Club, en quarts de finale, en maîtrisant Venus Williams et sa puissance révolutionnaire (6-2, 3-6, 6-4).
Et pourtant, après Wimbledon, l’Allemande s’envole pour Carlsbad, San Diego, pour disputer ce qui sera le dernier tournoi de sa carrière. Au premier tour, Graf affronte Amy Frazier, 26e mondiale, qu’elle a toujours battue, ne perdant qu’un set en cinq rencontres. Cette fois, visiblement gênée par ses ischio-jambiers, elle est embarquée dans un troisième set, et abandonne à 2-1 pour Frazier, “parce que ça faisait très mal, je ne pouvais pas faire un pas de plus”. Là encore, après cette douloureuse défaite, Graf ne semble pas prête à prendre sa retraite, selon le Los Angeles Times : “C’est quelque chose que je ferai spontanément. C’est quelque chose que votre coeur vous dicte. Tant que je joue, je joue.”
Les semaines suivant Wimbledon ont été difficiles pour moi. Je ne prends plus de plaisir.
Steffi Graf
Une semaine plus tard, lorsque Graf convoque une conférence de presse à Heidelberg, elle a changé d’avis et annonce qu’elle met un terme à sa carrière.
“Je crois que je n’ai plus rien à accomplir”, dit-elle aux journalistes. “Les semaines suivant Wimbledon ont été difficiles pour moi. Je ne prends plus de plaisir. (…) Après Wimbledon, pour la première fois de ma carrière, je n’avais pas envie de repartir en tournoi. (…) Je pensais poursuivre jusqu’à la fin de l’année, mais je ne me sens plus de voyager de tournoi en tournoi. C’est nouveau. J’ai décidé de jouer quelques tournois de plus pour voir si cette sensation disparaîtrait, mais ça n’a pas été le cas. (..) A l’arrivée, ce fut une décision facile à prendre, plus facile que je ne le croyais.”
La championne aux 22 titres du Grand Chelem affirme que sa décision n’a rien à voir avec ses récentes blessures : “Au moment où je vous parle, je suis en pleine forme. Aucun rapport avec les blessures.” Elle ajoute également qu’elle compte voyager sans ses raquettes. “Dans l’avion, en rentrant de San Diego, j’ai commencé à regarder un de ces magazines en pensant à tous les endroits où je pourrai aller.”
C’est ainsi qu’à l’issue de cette conférence de presse, Steffi Graf rejoint le club des grandes stars du sport qui prennent leur retraite en 1999 : Boris Becker, Michael Jordan et Wayne Gretzky.
La postérité du moment
Quelques semaines plus tard, Steffi Graf sera présente à New York pour l’US Open. Mais cette fois, en tant que supportrice d’Andre Agassi : les vainqueurs de Roland-Garros 1999 officialiseront leur relation au mois de septembre. Avec 22 titres du Grand Chelem dans son box, le Kid de Las Vegas remportera le tournoi. Le couple, qui possèdera finalement 30 trophées du Grand Chelem, se mariera en 2001.
Beaucoup de records établis par Graf resteront inégalés : en 2020, personne n’a encore réussi à passer 377 semaines à la première place mondiale, et personne n’a fini huit saisons au sommet du classement. Mais surtout, même si Serena Williams parviendra à remporter quatre tournois du Grand Chelem consécutifs en 2002-2003, l’exploit de réaliser le Grand Chelem calendaire ne sera pas reproduit.