Alcaraz a été plus grand que Djokovic sur le gazon de Wimbledon pour remporter sa deuxième levée du Grand Chelem en 4h42 historiques
Carlos Alcaraz est sorti vainqueur d’une grande finale de Wimbledon contre Novak Djokovic (1-6, 7-6, 6-1, 3-6, 6-4).
Pour bien cerner la valeur de la victoire de Carlos Alcaraz lors de ce Wimbledon 2023, il faut cerner le profil de sa victime en finale et de ce que le jeune Espagnol de 20 ans a réussi à lui infliger. Novak Djokovic vient de battre le record de levées du Grand Chelem à Roland-Garros (23). Il pratique un tennis aussi complet et compact que possible, peut-être l’un des meilleurs de sa vie, tel qu’il l’a montré – y compris lors de cette quinzaine sur le Centre Court de Wimbledon – en demi-finale ou même lors du premier set de la finale.
Djokovic n’avait pas perdu une finale de Grand Chelem depuis l’US Open 2021, et une finale de Wimbledon depuis 2013 ! Il jouait ce dimanche pour égaler le record historique de Roger Federer (8 titres sur le gazon du All England Club entre 2003 et 2017). Pourtant ce Novak Djokovic-là a été battu à la loyale, dimanche à Wimbledon, et il ne pouvait l’être que par un joueur phénoménal.
Ce joueur est Carlos Alcaraz, qui vient d’apporter une réponse exceptionnelle à la partie des observateurs qui le trouvent “surcoté” et loin des éloges décrites par Daniil Medvedev après la raclée reçue en demi-finale (“il est un peu comme les joueurs du Big Three). Il est devenu, à titre de comparaison, le premier joueur depuis 2002 n’étant ni Federer, Nadal, Djokovic ou Murray à remporter Wimbledon.
Djokovic : “Alcaraz mérite”
Le temps dira quelle empreinte Alcaraz peut laisser sur le tennis par rapport à ces monstres mais, après sa victoire à l’US Open 2022, ses temps de passage restent les mêmes que ceux de Rafael Nadal, le joueur le plus précoce du lot, avec deux titres majeurs à la sortie de l’adolescence. “Tout ce que tu réalises, avec ton équipe, à ton âge, est extraordinaire” a reconnu Djokovic à chaud, une fois le trophée de finaliste reçu.
Cinq semaines après les crampes qui avaient avorté tout suspense lors de la demi-finale de Roland-Garros entre les deux hommes, Alcaraz a renversé Djokovic au terme d’une finale monumentale de 4h42, sur un score qui a gagné sa place dans les livres d’histoire : 1-6, 7-6, 6-1, 3-6, 6-4.
Djokovic s’est procuré une balle de deux manches à zéro dans le tie-break du deuxième, à 6-5 après avoir mené 3-0. Sur le service d’Alcaraz, il a ensuite donné deux points en revers ; comme rarement. Peut-être les deux fautes directes les plus chères de sa carrière.
Alcaraz est cet homme qui a réussi à partager avec Djokovic les quatre dernières levées du Grand Chelem. On peut d’ailleurs observer qu’il a été empêché par son physique les deux fois où il n’a pas remporté le trophée (il n’avait pu s’aligner à l’Open d’Australie 2023), ce qui laisse songeur sur la valeur absolue de son tennis.
“Carlitos” est sorti vainqueur d’une de ces finales que Djokovic a fait tourner dans le passé contre Nadal à Melbourne (2012) ou Federer à l’US Open (2015) ou Wimbledon (2019). “J’ai gagné beaucoup de ces matches, j’ai peut-être gagné des finales que j’aurais dû perdre, ce n’est pas facile mais Alcaraz mérite son titre”, a reconnu Djokvic.
Alcaraz ne tremble pas à 5-4
A ce niveau de lutte, il y aurait beaucoup de littérature à écrire sur les motifs de la victoire d’Alcaraz. Le nombre inhabituel de challenges, de lets et de jets de craie prouvent que les deux hommes ont nettoyé les lignes et que tout s’est joué, comme toujours dans ces rencontres, à quelques détails.
L’instant le plus décisif fut évidemment le jeu de service d’Alcaraz à 5-4 au cinquième. Autoritaire, il l’a converti à sa première balle de match, et ce n’est pas un hasard si Djokovic a instantanément mentionnée ce fait d’armes lors du discours d’après-match.
Sur le strict plan statistique, malgré ces rebondissemets la finale a été un pur match de gazon : chaque set est revenu au joueur qui a affiché les meilleures stats au service, en première comme en seconde. Sans excption, et la dynamique du match a toujours épousé cette courbe.
Sur le plan tennistique, l’histoire est surtout celle d’une remise à flots. Mené 5-0 malgré une balle de break pour lui au premier jeu, Alcaraz a a été asphyxié par Djokovic au point d’encaisser un troisième 6-1 consécutif en comptant Roland-Garros, au premier set. “Je me suis dit : Carlos, va falloir hausser ton niveau de jeu”, a souri l’Espagnol dans un discours d’après-finale particulièrement prolixe et décousu, comme quand on réalise son rêve et que les sens ne répondent plus tout-à-fait.
Bras de fer et combat de boxe
Nous avions écrit que cette finale reviendrait probablement à Djokovic si elle était un bras de fer et à Alcaraz si elle était un combat de boxe. Elle fut, en réalité, les deux et Alcaraz a gagné les deux. Au cours d’une dernière heure où les deux hommes sont apparus marqués par la fatigue, Alcaraz a agressé Djokovic autant qu’il l’a pu tandis que le plan de jeu du Serbe ne consistait plus alors qu’à empêcher les gifle de coup droit, les montées et les amortis qu’Alcaraz avait jusqu’ici livrés par intermittence.
Avant cela, il avait dû remporter un jeu monumental de presque 27 minutes, à 3-1 en sa faveur au troisième set. Un jeu à 15 égalités, décisif dans l’opportunité donnée à Alcaraz de croire en ses chances. En maquant deux balles de 2-0 au quatrième puis en laissant ce set à Djokovic, l’Espagnol a dû se résoudre à s’embarquer dans un cinquième set où il apparut d’emblée en position de force, en breakant dès le deuxième jeu de service de Djokovic. Il ne lâcherait plus cet avantage (3-1, 4-2, 5-3, 6-4) et conclurait la finale comme un champion.
L’accolade que lui a donnée le Serbe après la balle de match portait un message explicite : Carlos, tu es des nôtres. Et le message un peu provoquant délivré par Djokovic après son quart de finale contre Rublev, sur cette génération qui essaie de lui barrer la route en vain, ce message a pris un gros coup de vieux. “La pression fait naître en moi les plus belles émotions, elle m’incite à jouer mon meilleur tennis. Je sais qu’ils veulent ma peau, mais ils n’y arrivent pas pour le moment.” C’était peut-être sous-estimer Carlos Alcaraz.