Major Talk #10 – Gilles Simon : Pourquoi le tennis “rend fou”
Pour Major Talk, Alizé Lim est allée à la rencontre de Gilles Simon, qui a publié son livre « Ce sport qui rend fou » en octobre 2020. Lors cet entretien, le Français a donné son avis sur la formation des jeunes joueurs en France, et s’est livré très librement sur l’importance du mental et de la gestion de la peur sur un court de tennis.
Professionnel depuis 2002, Gilles Simon va entamer en 2021 sa 20e saison sur le circuit ATP. 6e mondial en 2009, le Français a remporté 14 titres dans sa carrière. Il figure au 4e rang au classement des joueurs français ayant gagné le plus de titres ATP, derrière Gasquet (15), Tsonga (18) et Noah (23). Si Gilles Simon a eu une belle carrière, il estime qu’il aurait pu obtenir de meilleurs résultats, comme l’ensemble du tennis tricolore d’ailleurs. C’est ce qu’il explique dans son livre « Ce sport qui rend fou », paru en octobre 2020. Dans Major Talk, le Niçois est revenu sur les problèmes du tennis français, qui commence, selon lui, dès la formation.
“Tout petit, on te dit qu’on ne joue pas comme ça. Le tennis du futur, c’était service volée, c’est ce que j’ai écrit. Et finalement, le service volée a disparu. Mais tu grandis quand même avec ça. Sur les premières sélections, t’es pas pris. T’es trop petit, ou trop défensif, ‘Ça ne suffira pas quand tu grandiras.’ Tous ces trucs-là… T’as envie de répondre : ‘Vous n’avez pas été visionnaires.’ Même si ça n’a rien de personnel pour moi.“
Pour Gilles Simon, les formateurs doivent comprendre qu’il ne faut pas imposer un schema de jeu à quelqu’un car chaque joueur est différent, chaque joueur se sent à l’aise sur une filière précise.
“Gaël Monfils, si tu veux le faire attaquer en deux frappes, ça revient à demander à Tsonga de gagner avec 25 frappes. Ça n’a pas de sens.“
Accepter la peur
Professionnel depuis 2002, Gilles Simon a joué les plus grands tournois du monde, dont le Masters de fin d’année en 2009. Il a également affronté les meilleurs joueurs du monde et a battu au moins une fois le Big Three, Federer, Nadal et Djokovic. Dans cet entretien, le Français s’est confié en totale liberté sur les peurs qui peuvent habiter un joueur de tennis, lors d’un match où au cours de sa carrière. Et selon l’actuel 64e mondial, le mental est un aspect du tennis qui n’est pas assez travaillé en France
“Pour moi, la réflexion sur notre jeu est fausse en France, car elle part du principe que tout va bien. Qu’on est déterminés, convaincus, et que c’est ça notre jeu. C’est le jeu qu’on joue 90 % du temps. Et qu’il faut gérer des moments de stress, en début de set, et en fin de set. Et qu’en faisant de la préparation mentale, en se relâchant, on va virer le stress. Donc on va continuer de jouer le jeu qu’on aime jouer. Ce serait bien plus efficace si on le faisait dans l’autre sens.“
Pour Gilles Simon, l’important est d’abord d’identifier son stress, sa peur, de l’accepter et ensuite de trouver ce qui fonctionne dans son jeu dans ces moments de peur.
“Ton jeu à toi, c’est le jeu que tu joues quand tout va mal. C’est ce que tu es, c’est ce qui va tenir. À partir de là, tu construis. Quand tu sers à 3-3, 30-40, et que tu fais une double. Tu as envie de dire : « c’est normal ». C’est normal, quand tu as eu peur. Tu as déjà eu peur, j’ai eu peur. Tous ceux qui ont joué ont eu peur. Accepter déjà que c’est normal… C’est déjà un travail.“
Tous les joueurs ont peur, même Federer
Dans son livre comme lors de cet entretien, Gilles Simon parle vrai et n’hésite pas à dire qu’il a peur sur un court de tennis, et qu’il a déjà travailler avec un préparateur mental pour comprendre ses peurs. Le 64e joueur mondial a aussi voulu faire comprendre qu’il n’est pas le seul à avoir peur sur un court de tennis, et que même les plus grands, comme Federer qui est pris comme un modèle par beaucoup, ont peur. Mais le Suisse a accepté sa peur et sait ce qui fonctionne dans son jeu dans les moments de stress.
“Pourquoi il a pas fait service volée contre Djokovic, sur les deux balles de match?» J’ai entendu ça je ne sais pas combien de fois. On ne va pas commencer à remettre en cause les choix de Federer dans les moments clés! S’il y en a un qui sait ça, c’est lui. Il sait que normalement quand il fait service et coup droit là-bas, il est à l’aise, mais là, Djokovic a mis un passing à rien de la ligne. Parce qu’à ces moments-là, Djokovic est à l’aise pour mettre des passings de ce type.“