Humbert : “Je me suis fixé comme challenge d’essayer d’être top 10 et gagner des gros titres”

Présent à Francfort pour l’UTS organisé du 18 au 20 octobre, Ugo Humbert a pris le temps de répondre à nos questions pour une interview exclusive ce jeudi. 108e mondial en janvier 2023, il a entamé une ascension au cours de laquelle il a triomphé à Metz en fin de saison dernière, puis à Marseille et Doha en début d’année. 13e mondial en avril 2024, son meilleur classement, le Français de 26 ans est 16e cette semaine.

Ugo Humbert, Monte-Carlo 2024 Ugo Humbert, Monte-Carlo 2024 (Chryslène Caillaud / Panoramic)

Deux titres (ATP 250 de Marseille, ATP 500 de Dubaï) et une finale (ATP 500 de Tokyo) : quel bilan fais-tu de ta saison, des résultats, du niveau de jeu produit ?

Ugo Humbert : Pour l’instant, j’ai fait la meilleure saison de ma carrière. J’ai super bien commencé (titre à Marseille en février, puis à Dubaï début mars en battant notamment Daniil Medvedev en demi-finale) avec un très bon état d’esprit. Ensuite, je me suis un peu cramé, parce que je voulais absolument finir dans les huit (et se qualifier pour le Masters, ndlr). Et du coup, j’ai voulu enchaîner, enchaîner, enchaîner. Sauf qu’au bout d’un moment, tu ne rends pas compte, mais tu es rincé. Tu es tout le temps pris par les points (au classement), qui va te passer devant… Ça ne m’a pas fait du bien.

J’ai quand même réussi à faire huitième de finale à Wimbledon, puis la tournée nord-américaine a été un peu plus compliquée. Les J.O., même si je n’ai pas forcément bien joué (deuxième tour en simple, premier tour en double messieurs), j’y ai quand même laissé pas mal d’énergie. Je pense que ce sont des choses que je vais apprendre aussi pour la suite : mieux gérer mon calendrier, être moins pressé, aller sur les tournois quand je suis vraiment prêt mentalement et physiquement.

Sinon je pense que c’est une bonne saison. Il me reste trois tournois que j’adore, en indoor, dont deux en France (le Masters 1000 Paris-Bercy ; et Metz, sa ville natale, où il est tenant du titre), c’est du bonus pour moi.

Tu parlais de ton huitième de finale à Wimbledon. C'était contre Carlos Alcaraz (défaite 6-3, 6-4, 1-6, 7-5), et tu as joué ton meilleur tennis, on t'avait rarement vu à ce niveau en Grand Chelem. Qu'as-tu retenu de ce match ?

Ugo Humbert : Ça m’a donné beaucoup de confiance. C’est toujours plus facile, aussi, de produire son meilleur tennis dans ce match de type : tu n’as rien à perdre, tu joues (Carlos) Alcaraz sur le Central Wimbledon, ce n’est que du kiffe. C’est vrai qu’à un moment (à partir du deuxième set, ndlr), je voyais la balle grosse comme un ballon de foot, je ne pouvais plus rater une balle. Sur les retours, j’avais l’impression de pouvoir y aller full power tout le temps, tout rentrait, c’était fabuleux. Je me suis senti voler.

Et il s’en sort bien quand même, parce que dans le quatrième set à 4-3 (en sa faveur, ndlr), 0-40 (service Alcaraz, ndlr), il me fait trois supers points, ça aurait pu être différent. Et je voyais qu’il regardait tout le temps son équipe, qu’il doutait un peu, donc c’était incroyable. J’étais en mode rouleau compresseur. Pendant les deux premiers sets, je l’ai un peu regardé jouer. J’étais aussi impressionné par le fait d’être sur le Central etc. J’ai adoré ce match.

A trop penser au classement, je me suis épuisé.

Ugo Humbert

Le but, c'est de réussir à retrouver cette sensation ?

Ugo Humbert : Oui, bien sûr, il faut stabiliser ça sur la longueur d’une année. Quand tu joues sur un petit court contre un adversaire moins prestigieux, c’est sûr que c’est plus dur de le faire. Mais j’essaie d’être de plus en plus régulier. Je l’ai quasiment fait, je suis dans les 20 depuis le début de l’année. Ça, c’est aussi nouveau pour moi. J’ai un statut qui a un peu changé, il fallait le gérer.

Il y a plein de nouvelles choses, mais je suis prêt à continuer à progresser. J’ai aussi comme objectif d’essayer d’entrer dans le top 10. C’est un petit challenge que je me suis fixé, et puis essayer d’aller chercher des gros titres ce serait sympa.

Quels sont les enjeux de ta saison 2025 ? Continuer à progresser au classement ?

Ugo Humbert : Je vais essayer de sortir au max de ce truc de trop penser au classement, parce que je me suis vraiment cramé avec ça. A vouloir être trop là-dedans ; ça m’a vraiment épuisé. Je veux chercher à être le plus prêt possible physiquement et mentalement pour jouer, afin de pouvoir donner le meilleur de moi-même à chaque match. J’ai retrouvé ça dès le début de la tournée asiatique, à Tokyo (finale contre Arthur Fils), en pouvant être à fond sur chaque frappe. Le but est de continuer à avancer comme ça. .J’ai essayé de trouver des solutions à chaque fois pour essayer de faire mieux. Il faut continuer continuer à bosser. J’ai une super équipe autour de moi.

C’est un mec (Richard Gasquet) vraiment incroyable à l’extérieur du court, tellement gentil, tellement drôle aussi.

Ugo Humbert

Est-ce qu'un joueur de tennis regarde son classement tous les lundis ?

Ugo Humbert : Maintenant je ne regarde plus du tout, je ne sais même plus combien je suis exactement. Mais au début de la saison, comme j’ai commencé à bien jouer, j’étais dans les dix à la Race, j’étais comme un dingue, je regardais régulièrement. Mais au bout d’un moment, il faut en sortir parce que tu t’épuises, et mentalement tu déçois aussi parce que tu ne vas pas gagner chaque semaine.

Richard Gasquet a annoncé sa retraite, que représente-t-il pour toi ? Qu'est-ce que ça t'a fait d'apprendre qu'il allait arrêter ?

Ugo Humbert : Ça fait bizarre, “Jo” (Jo-Wilfried Tsonga) est parti, “Jim” (Jérémy Chardy, par ailleurs son coach ndlr) a arrêté Gilles (Simon) aussi… Il ne reste plus que Gaël (Monfils) et Richard (Gasquet). Ce sont des gars qui mont fait vibrer, qui m’ont donné envie de jouer au tennis. Je les ai regardés à la télé, je les ai encouragés, j’étais comme un dingue.

J’ai eu la chance de pouvoir côtoyer Richard. C’est un mec vraiment incroyable à l’extérieur du court, tellement gentil, tellement drôle aussi. J’ai passé des bons moments avec lui sur le court, donc ça fait bizarre. Je suis content qu’il ait décidé d’arrêter à Roland (en 2025, ndlr). Je pense que ça va être un moment fabuleux. Je serai devant ma télé pour regarder ça. Mais ouais, ça fait bizarre. Il a apporté tellement.

la plus grosse des conneries, c’est d’avoir mis les Masters 1000 sur deux semaines.

Ugo Humbert, au sujet du calendrier ATP

Pas mal de joueurs se plaignent du calendrier, quel est ton point de vue sur ce sujet ?

Ugo Humbert : Il y a trop de choses et ils (l’ATP) font tout pour… Ils ne vont jamais dans le sens des joueurs. Je suis désolé, mais moi je trouve que, déjà, la plus grosse des conneries, c’est d’avoir mis les Masters 1000 sur deux semaines. C’est fatigant. Et ils nous disent qu’on gagne plus d’argent mais ce n’est pas vrai, on a deux fois plus de frais (du fait de rester deux fois plus longtemps sur place, ndlr). Il y a beaucoup plus de gars qui se blessent aussi. Même pour suivre à la télé, je pense que ça ne vaut même pas le coup, tu ne comprends pas qui joue quand etc. Tout ça, ce n’est qu’une question d’argent (pour l’ATP, ndlr), mais il n’y a pas que ça quoi…

J’ai eu une période, la saison nord-américaine, où je n’étais pas bien, je me sentais fatigué, épuisé, des voyages, d’être tout le temps loin de chez toi. C’est trop dur, c’est trop dur. Et là, ils vont encore dans ce sens-là. L’année prochaine, les Masters 1000 du Canada et Cincinnati vont aussi passer sur deux semaines (sur neuf Masters 1000, seuls Monte-Carlo et Paris-Bercy vont rester sur une semaine, ndlr). Je trouve que c’est du grand n’importe quoi, la saison est beaucoup trop longue. Il n’y a aucun autre sport où tu n’as qu’un seul mois de pause. Je vais finir ma saison juste après Metz et je vais partir un mois après pour l’United Cup qui commence le 27 décembre. Je ne peux même pas faire Noël chez moi.

J’en entends certains, comme Jannik Sinner, qui disent que tu peux choisir de ne pas jouer. Mais ils ne sont pas lucides non plus… Quand tu es 50e, 60e mondial, tu essaies de jouer au maximum pour monter au classement. Il faut revoir le truc, essayer de condenser davantage, parce que dans l’état actuel, c’est usant. Au bout d’un moment, ce n’est pas possible.

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