Shnaider : “Parfois, je me dis : ‘Diana, calme-toi’ !”
Parmi les révélations de la saison, Diana Schnaider, 20 ans, n’est pas encore très connue du grand public, faute d’un gros parcours en grand Chelem. Cela tome bien : elle est en huitièmes de finale de l’US Open, où la Russe nous a accordé une interview exclusive.
A 20 ans, elle est déjà mine de rien dans le top 20 (18ème) grâce à trois titres remportés sur trois surfaces différentes cette saison (Hua Hin sur dur, Bad Hombourg sur gazon puis Budapest sur terre battue), au moyen d’un tennis de gauchère explosif et spectaculaire. Pour autant, Diana Shnaider n’est pas encore très connue comme elle le devrait l’être auprès du grand public.
La Russe, née à Jigouliovsk sur les bords de la Volga, a débuté le tennis à quatre ans avant de s’installer quatre ans plus tard à Moscou où elle s’y est mise plus sérieusement. En 2022, elle s’est inscrite à l’Université de Caroline du Nord, aux Etats-Unis, mais n’a finalement pas ciré les bancs de la fac pour une simple et bonne raison : son niveau était déjà devenue si élevé qu’elle a plutôt décidé de se consacrer à sa carrière professionnelle. Bon choix.
D’ores et déjà (re)connue pour ses bandanas (“j’en ai des rouges, des jaunes, des roses, des bleus clairs, des bleus foncés…”), Shnaider ne devrait pas tarder à émerger sur la grande scène d’un tournoi du Grand Chelem. Elle a d’ailleurs commencé à éclore sur la grande scène du tennis : elle jouera pour la première fois un huitième de finale en Majeur face à Jessica Pegula à l’US Open.
“Mon but était d’être dans le top 20 avant la fin de l’année. C’est arrivé plus tôt que prévu, mais je dois toujours travailler pour m’y installer. Et j’ai bien l’intention de le faire.”, nous a-t-elle notamment déclaré dans cette interview en tête-à-tête réalisé à New York. Shnaider évoque aussi, entre autres, sa relation avec son coach Igor Andreev (lui-même ancien 18ème joueur mondial en 2008), ce qu’elle doit justement travailler avec lui ou encore ses goûts musicaux.
Diana, qu’est-ce vous appréciez le plus dans cette vie de joueuse de tennis, et qu’est-ce qui vous est le plus pénible ?
Diana Shnaider : Tout simplement, j’aime jouer au tennis ! Evidemment, ce qui est le plus agréable, c’est la victoire mais on prend aussi du plaisir à jouer des gros matches contre des adversaires de qualité. La chose la plus difficile, ce sont les voyages. On n’est jamais à la maison. J’en parlais justement il y a peu avec la famille : quand est-ce que je pourrai fêter normalement le Nouvel An, les anniversaires… ? Je n’en sais rien. En même temps, c’est la vie que nous avons choisie et il faut l’accepter.
Vous travaillez avec Igor Andreev depuis le début de la saison sur gazon : que recherchez vous en priorité chez un coach et quelle est votre façon de communiquer avec lui ?
D. S. : Igor était la bonne personne au bon moment. Ensemble, on travaille beaucoup sur les pensées négatives que je peux avoir sur le court. Il a beaucoup d’expérience en tant que joueur, donc il y a beaucoup de moments où il peut comprendre ce que je ressens sur un terrain. Il a des conseils avisés qui, je trouve, m’aident beaucoup.
Par exemple ?
D. S. : Il m’arrive simplement d’être trop négative lorsque je fais des fautes. Nous sommes des humains, pas des robots, mais parfois c’est compliqué pour moi d’accepter de commettre des erreurs et d’essayer de continuer malgré tout. Igor a passé beaucoup de temps à m’enseigner que c’est comme cela que l’on s’améliore : rester quoi qu’il arrive concentré sur le match et continuer à se battre sur chaque point.
Mentalement, je crois que c’est important d’accepter que parfois, on peut perdre juste parce que l’adversaire était meilleure ce jour-là, et pas nécessairement parce que vous avez mal joué. Mais c’est justement le plus difficile à accepter.
Et au niveau tennistique ?
D. S. : On a beaucoup travaillé au niveau du service. Et également sur mes choix de coups dans certaines situations et dans certains positions sur le court. Ce sont des petits ajustements, on n’a pas révolutionné ma technique ou ma manière de jouer. Mais au très au niveau, ce sont ces petits ajustements qui peuvent faire une énorme différence.
Dominic Thiem disait l’autre jour que le sentiment que l’on éprouve après avoir gagné un gros match est comparable à une drogue, d’une certaine manière. Vous êtes d’accord ?
D. S. : Complètement ! Particulièrement si le match a été long et difficile, ou si c’est contre une adversaire que vous n’aviez jamais battue auparavant. C’est un sentiment incroyable. C’est un cocktail d’émotions, un mélange de joie, de soulagement et de fierté. Oui, c’est vraiment jouissif.
Dites-nous un peu quelle personne vous êtes en dehors d’un court. Quels sont vos goûts musicaux, par exemple ?
D. S. : Ils sont très variés ! J’écoute vraiment toute sorte de musique, spécialement dans l’avion mais aussi en voiture, ici à New York, où le trajet pour aller au stade est vraiment trop long (rires) ! Cela peut être du rock, du pop, une chanson triste… Vraiment n’importe quoi : Cela dépend dans quel état d’esprit je suis. J’aime aussi marcher en écoutant de la musique, ou tout simplement regarder des émissions de télé ou des série.
En fait, j’aime bien passer du temps seule à me détendre. Dans le milieu du tennis, vous êtes sans cesse entourée de beaucoup de gens, tous les jours. Donc j’ai besoin de prendre du temps pour moi, sans personne. C’est comme ça que je recharge mes batteries.
Pour revenir au tennis, étant donné que vous êtes gauchère, y’a-t-il des joueurs ou des joueuses de tennis gauchers que vous avez admirés en particulier ?
D. S. : Je pourrai citer Rafael Nadal mais d’un autre côté, nous n’avons pas le même style de jeu. En fait, il n’y avait pas tant de gauchers que cela quand j’ai grandi. Bien sûr, j’ai admiré Roger Federer et Novak Djokovic mais, hormis Nadal, pas tellement de gauchers. Aidez-moi…
Petra Kvitova, peut-être ?
D. S. : Oui, c’est vrai que j’étais très excitée à l’idée de l’affronter l’année dernière. C’est une super joueuse. Dans la même génération, il y avait aussi Angelique Kerber. Mais je dois avouer que j’ai grandi en regardant surtout le tennis masculin.
Quel est le premier gros match que vous vous souvenez avoir vu à la télé ?
D. S. : Je ne sais plus exactement quel match c’était mais je crois me souvenir que c’était un match de Nikolay Davydenko. Honnêtement, je ne regardais pas énormément de tennis quand j’étais jeune, parce que je n’aurais jamais cru que je me retrouverai un jour, moi aussi, sur le circuit. Le tennis est devenu sérieux très progressivement chez moi, et c’est à partir de là que j’ai commencé à regarder davantage.
Quels sont vos objectifs à long terme, et est-ce que vous en avez discuté avec Igor ?
D. S. : Pas encore, non. Mais l’objectif à long terme, c’est avant tout de rester en bonne santé et parmi l’élite aussi longtemps que je pourrai. Pour cela, je dois être sérieuse dans la préparation physique, la récupération, le sommeil… Il n’y a pas grand-chose d’autre à faire : prendre soin de son corps autant que possible, parce que le tennis est un sport très exigeant. De la même manière, je voudrais faire en sorte de conserver de la fraîcheur mentale aussi longtemps que possible, et garder une attitude positive envers mon sport.
je veux juste être la meilleure version de moi-même sur chaque surface.
Dian Schnaider
Vous avez gagné trois titres sur trois surfaces différentes cette année. Au final, quelle est celle qui vous convient le mieux ?
D. S. : Mon premier titre, à Hua Hin, sur dur, c’était vraiment une énorme victoire. A Bad Hombourg, c’était incroyable parce que je ne pensais pas être aussi performante sur gazon. Et pourtant, j’ai joué des sacrés matches là-bas ! Finalement, j’ai adoré le jeu sur herbe. Enfin, Budapest, c’était spécial aussi parce que j’ai réussi à me dépasser mentalement pour me sortir de moments difficiles. Je me sentais fatiguée dès le premier match, je manquais un peu de “gnaque” mais je me suis poussée et j’ai réussi à passer outre.
Pour répondre à votre question, si vous me l’aviez posé il y a deux ans quand j’évoluais chez les juniors, j’aurais clairement dit la terre battue. Mais j’ai évolué. Aujourd’hui, je veux juste être la meilleure version de moi-même sur chaque surface.
Pour finir, est-ce qu’il vous arrive parfois de rêver de tennis ?
D. S. : Oui, bien sûr ! Surtout quand je suis hors tournoi, d’ailleurs, alors que j’essaie justement de me détendre. Eh bien voilà, je me mets à rêver que je suis en tournoi ! Donc quand je me réveille, parfois, je me dis : ‘Diana, calme-toi, cela doit être une semaine de repos, même en rêve (rires) !’