Alexander Zverev, incroyable champion ou indécrottable loser ?

En perdant dimanche sa troisième finale de Grand Chelem en trois tentatives, Alexander Zverev s’est invité tout autant à la table des plus grands champions que des plus grands losers. Au final, l’Allemand reste toujours aussi difficile à décrypter.

Alexander Zverev Open d'Australie 2025 changement de côté © Zuma / Psnews

Malgré sa lourde défaite ce dimanche en finale de l’Open d’Australie contre Jannik Sinner (6-3, 7-6, 6-3), Alexander Zverev a au moins gagné un trophée que personne ne pourra lui enlever, au moins pour quelque temps, et à moins d’affûter solidement ses arguments : celui de meilleur joueur de tous les temps à n’avoir jamais gagné de Grand Chelem.

Déjà battu lors des finales de l’US Open 2020 (contre Dominic Thiem) et de Roland-Garros 2024 (Carlos Alcaraz), l’Allemand n’est pas le premier à perdre ses trois premières finales majeures. Dans l’ère Open, Ivan Lendl, Andre Agassi, Goran Ivanisevic, Andy Murray, Dominic Thiem et Casper Ruud l’ont précédé, et seul le dernier nommé n’a (toujours) pas atteint le Graal. Mais il est loin, très loin du palmarès affiché par ailleurs par le n°2 mondial qui compte 23 titres dont deux Masters et sept Masters 1 000. Ne cherchez pas : il n’y a pas mieux dans le peloton des « non gradés » en Grand Chelem.

Mieux (ou pire) encore : s’il venait, avant la fin de sa carrière, à perdre une finale de Wimbledon, alors Alexander Zverev réussirait le Grand Chelem de la lose, à savoir perdre au moins une fois chaque finale de Grand Chelem. Un authentique « exploit » que seuls cinq joueurs ont réussi dans l’ère Open, et pas des moindres : Rod Laver, Ken Rosewall, Ivan Lendl, Roger Federer et Andy Murray. Inutile de préciser qu’aucun d’entre eux n’est resté vierge de titre majeur.

Une bonne compagnie, donc, mais tout cela fait une belle jambe au principal intéressé. « Je ne veux pas terminer ma carrière en tant que meilleur joueur de tous les temps à n’avoir jamais gagné un Grand Chelem, ça c’est sûr », a-t-il martelé en conférence de presse. « Je vais continuer à faire tout ce que je peux pour soulever un jour un trophée majeur. Je pense faire les choses correctement, je travaille plus dur que jamais. Et malgré cela, j’ai perdu en trois sets, face à un joueur qui est tout simplement meilleur que moi. »

https://twitter.com/AustralianOpen/status/1883480770116997206

Par rapport à ses deux précédentes finales de Grand Chelem, qu’il avait perdues en menant respectivement deux sets à rien (contre Thiem) et deux sets à un (contre Alcaraz), Zverev pourra cette fois nourrir moins de regrets, en effet. Tout juste pourra-t-il encore évoquer le manque de chance avec cette bande du filet venue sourire à son adversaire dans l’un des rares moments chauds de la finale, à 4-4 dans le tie break du deuxième set.

Pour le reste, même s’il a subi la plus lourde défaite de ses trois tentatives, et même si on l’a vu par moments retomber dans ses travers avec ce coup droit qui a encore un peu flanché sous la pression, il est paradoxalement difficile d’évoquer cette fois un refus d’obstacle. « AZ » a surtout été dominé de « A à Z », sur un pur plan tennistique, par un homme en lévitation.

Il doit y avoir cinq ou six facteurs clés en tennis, et Jannik m’est supérieur dans quatre ou cinq. Donc il mérite complètement de gagner.

« Jannik est dans un univers différent en ce moment par rapport au reste de la planète tennis », a-t-il convenu avec sportivité. « Du fond de court, il m’a complètement surpassé. Le seul secteur où j’ai, je pense, été meilleur que lui, c’est le service. Pour le reste, il fait tout mieux que moi : coup droit, revers, déplacement… Il doit y avoir cinq ou six facteurs clés en tennis, et il m’est supérieur dans quatre ou cinq. Donc il mérite complètement de gagner, c’est juste factuel. »

Sinner, qu’il a d’ailleurs (lui aussi) comparé à Novak Djokovic par sa faculté à jouer et bouger vite, rester collé à sa ligne et priver l’adversaire de temps, était le premier à venir le consoler avant la cérémonie des trophées. Dans un moment suspendu où Alexander Zverev s’est fait rattraper par la tristesse, puis par les larmes, l’Italien est venu lui donner une accolade sympa, et sans doute bienfaisante.

« Il m’a dit que je gagnerai certainement l’un de ces trophées un jour, que j’étais trop bon pour ne pas le faire », a révélé Sascha. « C’est vrai que c’était un moment difficile pour moi. J’étais bien préparé, je sentais bien la balle, je pensais vraiment pouvoir rivaliser et gagner cette finale. Au lieu de quoi, j’ai dû me contenter, pour la troisième fois, de regarder mon adversaire soulever le trophée. Et c’est difficile parce que je ne veux rien de plus que tenir un jour ce trophée dans mes mains. »

L’Allemand pourra, peut-être, s’inspirer de Madison Keys, victorieuse la veille de son premier trophée majeur, à presque 30 ans, et après avoir passé tant d’année à le convoiter en vain. Finalement, au prix d’une longue thérapie, c’est au moment où elle avait lâché prise par rapport à cette quête obsessionnelle du Grand Chelem qu’elle a fini par trouver le tennis et le relâchement pour le gagner.

Alexander Zverev peut-il connaître un destin similaire ? En attendant, les années passent, ses rivaux progressent et ses chances ne vont pas forcément en grandissant, même s’il s’en rapproche de plus en plus.

People in this post

Your comments

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *