Musetti, Sinner, Alcaraz : ces trois prodiges que Roland voit éclore
Si Carlos Alcaraz s’est arrêté au troisième tour de Roland-Garros, Lorenzo Musetti et Jannik Sinner seront en huitième de finale de Roland-Garros. Retour sur leur carrière et leur parcours.
Trois “teenagers” de moins de 20 ans ont évolué ce samedi au troisième tour de Roland-Garros : Carlos Alcaraz (18 ans), Lorenzo Musetti (19 ans) et Jannik Sinner (19 ans). Une première depuis 2001, lorsque Roger Federer, Andy Roddick et Tommy Robredo avaient accompli pareille performance. Si Alcaraz s’est incliné contre Struff, Musetti et Sinner, respectivement vainqueurs de Cecchinato et Ymer, seront en deuxième semaine du Grand Chelem parisien. Voici qui ils sont et ils en sont à Roland.
Ce samedi 5 juin à Roland-Garros
- Musetti – Cecchinato : qualification de Musetti (3-6, 6-4, 6-3, 3-6, 6-3)
- Sinner – Ymer : qualification de Sinner (6-1, 7-5, 6-3)
- Alcaraz – Struff : élimination d’Alcaraz (6-4, 7-6 [3], 6-2)
Lorenzo Musetti, le virtuose
Lorenzo Musetti
– Né le 3 mars 2002 à Carrare (Italie)
– 19 ans
– Droitier, revers à une main
– 76e mondial
Pourquoi Musetti est phénoménal
Le monde du tennis l’a découvert à Rome, en septembre dernier. Issu des qualifications, Lorenzo Musetti, alors 249e mondial, avait mis au supplice Stan Wawrinka puis Kei Nishikori. Son aisance sur terre battue et son sublime revers à une main sautaient déjà aux yeux, en plus de son style, lui qui s’est déjà retrouvé en couverture de la version italienne du magazine Esquire. Eliminé au premier tour des qualifications de l’Open d’Australie, le Toscan s’est vite relevé de cette désillusion : après sa finale au Challenger de Biella 2, il a accompli sa deuxième performance de marque sur le circuit.
Lors de l’ATP 500 d’Acapulco, il est sorti des qualifications avant de se payer Schwartzman (9e), Frances Tiafoe (56e) puis Grigor Dimitrov (16e). Si Stefanos Tsitsipas l’a stoppé en demi-finale, il a fait son entrée dans le Top 100. A son meilleur classement actuellement (76e), il s’est toutefois montré décevant sur terre jusqu’ici, avec des performances en-deça des attentes (défaites contre Djere, Taberner, Opelka, Nishioka).
Le Roland-Garros de Musetti
Parfaits ou presque. Pour son premier Roland-Garros, Lorenzo Musetti a créé la sensation : un succès en trois manches (6-0, 7-5, 7-6) contre David Goffin, 13e mondial, sa deuxième plus belle victoire sur le circuit après Schwartzman. S’il a profité des fautes du Belge (48), pas en confiance, il s’est montré extrêmement solide dans les moments importants, sauvant une balle de set dans le deuxième et s’emparant du jeu décisif du troisième, malgré deux breaks d’avance dilapidés. Après s’être dégagé le tableau, il a pris sa revanche sur Yoshihito Nishioka (57e), qui l’avait battu la semaine passée à Parme. Mené 5-3 dans le premier, il a ensuite fait cavalier seul, s’offrant 16 des 21 derniers jeux de la rencontre, avec entre autres 24 coups gagnants lors des deuxième et troisième sets. Il a perdu ses deux premières manches de la quinzaine au troisième tour mais Musetti a éliminé Cecchinato (3-6, 6-4, 6-3, 3-6, 6-3).
Ce que Musetti peut espérer
Lorenzo Musetti va connaître lundi le premier gros défi de sa carrière : affronter Novak Djokovic lors de son premier huitième de finale en Grand Chelem.
Jannik Sinner, la machine
Jannik Sinner
– Né le 16 août 2001 à San Candido (Italie)
– 19 ans
– Droitier, revers à deux mains
– 19e mondial
- Pourquoi il est phénoménal
Jannik Sinner et Lorenzo Musetti sont nés la même année. L’un est 19e mondial, l’autre est 76e. A partir de ce constat simple, le natif de San Candido est le membre de la nouvelle “Next-Gen” le plus en avance. Révélé à Rome en mai 2019 après sa victoire contre Steve Johnson, alors qu’il était 263e mondial, Sinner n’a ps cessé de brûler les étapes. Il a pris un set à Stan Wawrinka à l’US Open la même année, s’est payé Gaël Monfils, alors 13e mondial à Anvers, avant de remporter, à la surprise générale, le Masters Next-Gen, tout fraîchement entré dans le top 100.
Premier Top 10 (Goffin) battu début 2020, un succès contre Tsitsipas à Rome, puis un premier quart en Grand Chelem à Roland-Garros après un exploit contre Zverev, et deux titres sur le circuit à Sofia et à Melbourne. Entré dans le Top 20 après sa finale à Miami, l’Italien impressionne, tant il apparaît mâture et déjà prêt à remporter des grands titres. Sa très grande aisance à se déplacer malgré son mètre 88, et ses frappes sèches font de lui un métronome par moments injouable. A tel point qu’il devrait rapidement toquer à la porte du Top 10.
Le Roland-Garros de Sinner
Le voir au troisième tour est, cette année, une petite sensation. Pas sur le papier : Jannik Sinner est tête de série n°18. Mais le protégé de Ricardo Piatti est un miraculé. Opposé au coriace Pierre-Hugues Herbert, qui l’a malmené et sorti de sa filière de frappeur du fond du court, il a sauvé une balle de match dans la quatrième manche avant de s’imposer (6-1, 4-6, 6-7, 7-5, 6-4) après 3h32. Une rencontre où son efficacité quasi-chirurgicale sur balles de break (8/10), face à un serveur de la trempe du Français, a fait la différence. Face à son compatriote Gianluca Mager (87e), Sinner a encore lâché un set, mais s’est fait moins de frayeurs (6-1, 7-5, 3-6, 6-3). Bien plus solide que contre Herbert (8 aces, 76 % de points gagnés derrière sa première, 38 coups gagnants pour 22 fautes directes), le jeune Italien s’est sans doute rassuré.
Contrairement à ses deux premiers tours, Jannik Sinner n’a pas perdu de manche, samedi, contre Mikael Ymer, qu’il a battu en trois manches (6-1, 7-5, 6-3). Mais il il a tout de même dû sauver une balle de deuxième set sur le service adverse, et n’a pas livré une grande prestation (45 fautes directes). Mais l’Italien a assuré l’essentiel et enchaîne un deuxième huitième de finale Porte d’Auteuil.
Ce que Sinner peut espérer
Sinner pourrait bien avoir une revanche à prendre face à Rafael Nadal, contre qui il avait résisté pendant deux manches (toutefois perdues) avant de lâcher, l’an dernier en quarts. Sinner, meilleur qu’en 2020, face à un Nadal parfois moins souverain durant cette saison sur terre : un duel auquel on a déjà envie d’assister.
Carlos Alcaraz, l’héritier
Carlos Alcaraz
– Né le 5 mai 2003 à Murcia (Espagne)
– 18 ans
– Droitier, revers à deux mains
– 97e mondial
Pourquoi Alcaraz est phénoménal
Il est le plus jeune joueur du Top 100. Carlos Alcaraz y a fait son entrée juste avant Roland-Garros, après son succès au Challenger d’Oeiras (Portugal). Une suite logique vu sa progression fulgurante. 490e début 2020, il s’est enfilé deux Futures, a signé sa première victoire sur le circuit principal contre un client sur terre battue, Albert Ramos Viñolas, avant l’arrêt de la saison en raison de la pandémie.
Il est reparti de plus belle en remportant trois Challengers durant la deuxième partie de l’année. Le protégé de Juan Carlos Ferrero a gravi pas à pas les échelons : un succès de marque contre David Goffin à Melbourne 1, sa première victoire en Grand Chelem à l’Open d’Australie, puis en Masters 1000 à Madrid, ainsi que sa première demi-finale sur le circuit, à Marbella.
Sa première balle et son coup droit font des ravages. Après sa victoire écrasante contre lui à Madrid, Rafael Nadal n’avait pas tari d’éloges sur son jeune compatriote. “Il va probablement devenir l’un des meilleurs joueurs du monde. Il va brûler les étapes très vite.”
Le Roland-Garros d’Alcaraz
Sa performance n’a pas étonné grand monde. Carlos Alcaraz a surclassé jeudi Nikoloz Basilashvili, tête de série n°28, au deuxième tour de Roland-Garros (6-4, 6-2, 6-4). Il est devenu le plus jeune joueur à accomplir pareille prouesse à Paris depuis Andreï Medvedev, alors âgé de 17 ans, en 1992. Issu des qualifications, l’Espagnol a perdu jusqu’ici son seul set de la quinzaine contre son compatriote Bernabe Zapata Miralles (6-3, 2-6, 6-1, 7-6). Un match loin d’être abouti (34 fautes directes pour 41 coups gagnants) pour Alcaraz, dont le salut est venu du filet (20 points remportés sur 27 montées). Contre Basilashvili, Alcaraz a impressionné : 10 aces, 27 coups gagnants (pour 26 fautes). Il a su profiter des fautes adverses (33) pour se rendre le match facile. Sa faculté à faire mal rapidement dans l’échange a été remarquable : il a remporté 63 des 101 points disputés en moins de 4 coups.
Son tableau s’était ouvert avec l’élimination d’entrée d’Andrey Rublev, tête de série n°7, par Jan-Lennard Struff. Mais Alcaraz n’en a pas profité. Face à un Allemand très agressif, il n’a pas tenu la cadence et a cédé en trois manches (6-4, 7-6 [3], 6-2) sans donner le sentiment de pouvoir renverser le cours des choses. Le premier Roland de Carlos Alcaraz n’en reste pas moins réussi.