Paire : “On ne joue pas pour soi, en tout cas pas moi : je joue pour procurer du bonheur”

Battu en quatre manches par Casper Ruud malgré le soutien du court Simonne-Mathieu, Benoît Paire a mené sa conférence de presse la voix brisée par l’émotion.

© AI / REUTERS / PANORAMIC

Benoît, malgré la défaite, tu sembles avoir pris beaucoup de plaisir sur le Simonne-Mathieu avec la présence du public.

Benoît Paire : Oui, j’ai pris beaucoup de plaisir. Il y a beaucoup de déception aussi. Quand on perd au premier tour de Roland-Garros, ce n’est pas forcément l’objectif du tournoi. Mais j’étais venu pour essayer de retrouver le tennis que j’aime, l’ambiance que j’aime, celle de RolandGarros. Me retrouver sur ce court, avec une ambiance pareille dès les premiers points, cela m’a vraiment sur-motivé. J’attendais le retour du public, j’attendais de pouvoir partager ces moments. Ce n’est pas le résultat que je recherchais, mais mentalement, c’est ce que je recherchais. Je suis hyper rassuré.

On t'a vu sortir les larmes aux yeux. C'est cette dose d'amour et d'affection que tu étais venu chercher ?

Benoît Paire : Depuis quelques mois, c’est tellement difficile, la vie que je mène sur le circuit, les critiques que je reçois, les gens qui parlent pour rien de mes déclarations, juste pour exister. J’ai retrouvé le tennis que j’aime, celui du partage. C’est pour cela que je fais ce métier. C’est ce qui le rend beau. À un moment donné, on ne joue pas pour soi, on joue aussi pour procurer du bonheur. C’est mon cas à moi. Et aujourd’hui, j’ai vu un public qui était à fond derrière moi. Quand je vois l’amour que les gens m’ont donné, finalement, c’est un bol d’oxygène, cela me fait vraiment du bien.

Pensais-tu avoir perdu l’affection du public ?

Benoît Paire : Je reçois tellement de critiques que quand j’arrive sur le terrain, je me demande comment cela va se passer, oui. J’avais besoin un peu de voir comment le public allait réagir. A Madrid déjà, il y avait eu une super ambiance. Mais alors là…

C’est vrai que je me demandais : “Est-ce que les gens vont vraiment me détester ?” Quand tu lis les réseaux… Finalement, je me rends compte que les gens aiment ce style de jeu. Peut-être que certaines de mes déclarations les dérangent mais dans l’ensemble, ils me soutiennent. J’ai reçu tellement d’amour sur ce match, cela m’a fait un bien énorme. Cela me rassure, et je me dis : « Benoît, le tennis ce n’est pas fini, tu sais que le niveau de jeu, tu l’as. Si tu retrouves une bonne condition physique et un peu plus de confiance, tu peux refaire de belles choses. » La confiance, c’est ce qui me manque en ce moment. Mais ce Roland-Garros, je m’en rappellerai.

Tout le monde croit que je fais ma déclaration, que je rentre chez moi, que je suis de bonne humeur et que tout va bien. Mais en fait tout le monde souffre.

Benoît Paire

A quoi pensais-tu après la balle de match ? On t’a vu craquer sur ta chaise.

Benoît Paire : En fait, je me suis effondré, mais ce n’était pas de la tristesse. C’est juste que j’ai tellement souffert pendant ces quelques mois… Tout le monde croit que je fais ma déclaration, que je rentre chez moi, que je suis de bonne humeur et que tout va bien. Mais en fait tout le monde souffre. Quand je rentre auprès de ma famille, ils voient que je ne suis pas heureux, ils voient qu’il me manque quelque chose dans ma vie. Ils le ressentent. Je suis sensible. Ça a donné quelques mois difficiles.

Si j’ai craqué, c’est juste parce qu’en fait, depuis quelques mois, j’ai une boule, je suis noué. Ça a du mal à sortir. Là je sens que les gens se sont régalés, et moi aussi. Donc cela m’a fait du bien, et cela a fait sortir un peu tout ce que j’ai de négatif en moi.

Quand tu le gênes dans le quatrième set, est-ce que tu ne te dis pas "dommage que je ne sois pas plus prêt sur le plan physique" ?

Benoît Paire : Si je n’ai pas la caisse, c’est juste que c’est très dur mentalement. Ce n’est pas une question de physique. Le physique, finalement, j’ai quand même bien travaillé avec Boris (Vallejo). Le tennis, c’est beaucoup dans la tête. Quand on puise comme je le fais à l’extérieur du court, et qu’on arrive sur un court très stressé, c’est difficile. Les dernières semaines ont été très difficiles pour moi. Il ne faut pas oublier que j’ai quand même fait la quarantaine à New-York, la quarantaine à Hambourg, la quarantaine en Australie. J’ai été contrôlé deux fois positif, j’ai été cas contact. La période est dure pour tout le monde. Pour moi, ça a été dur de faire mon métier.

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