2016-… : Roland-Garros, un tournoi féminin réservé aux vainqueures inédites en Grand Chelem
Roland-Garros sacrera pour la sixième année consécutive une nouvelle vainqueure de Grand Chelem, qui sera Anastasia Pavlyuchenkova ou Barbora Krejcikova. Mais que cette victoire a signifié pour les précédentes à avoir débloqué leur compteur en Majeur ?
Pour la sixième année consécutive, la vainqueure de Roland-Garros dans le tableau dames inscrira son nom au palmarès d’un tournoi du Grand Chelem pour la première fois de sa carrière. C’était une certitude depuis l’élimination par Iga Swiatek, tenante du titre à Paris, en quarts de finale par Maria Sakkari. Ce sera ainsi Anastasia Pavlyuchenkova ou Barbora Krejcikova, deux joueuses hors du Top 30 avant le tournoi.
S’il n’est pas certain que cette situation soit bien plus que conjoncturelle, revenir sur les cinq éditions précédentes montre que les profils de ces néo-vainqueures de Grand Chelem sont bien différents. Sans que ce sacre à Paris ait forcément été le début d’une grande moisson dans les tournois majeurs.
2016 : Garbiñe Muguruza, l’éclosion
Quel était le profil de Garbiñe Muguruza avant Roland-Garros ?
Garbiñe Muguruza débarquait à Roland-Garros avec un statut de tête de série numéro 4 et d’outsider pour la victoire finale, à 22 ans. L’Espagnole avait même déjà disputé une finale en Grand Chelem, à Wimbledon en 2015, avec à la clé une défaite contre Serena Williams. Elle avait aussi atteint les quarts de finale de Roland-Garros les deux années précédentes et comptait deux titres WTA à son actif. En clair : c’était loin d’être une inconnue.
Quel a été son parcours à Roland-Garros ?
Garbiñe Muguruza a profité d’une hécatombe dans son quart de tableau pour se hisser jusque dans le dernier carré sans affronter une seule tête de série. En demi-finale, l’Espagnole a dû se défaire de Samantha Stosur (N°21), ancienne finaliste à Roland-Garros, et a retrouvé Serena Williams (N°1) en finale pour une revanche de Wimbledon. Avec cette fois l’avantage à Muguruza (7-5, 6-4).
Qu’était-il arrivé aux favorites ?
Tête de série numéro 1, Serena Williams ne s’est incliné qu’en finale. En revanche, trois des sept premières têtes de série avaient éliminées dès le premier tour (Angelique Kerber, Victoria Azarenka, Roberto Vinci) et il n’y avait que trois joueuses du Top 20 en quarts de finale (les deux finalistes et Timea Bacsinszky).
Qu’a accompli Muguruza après son sacre ?
Garbiñe Muguruza a décroché son deuxième titre du Grand Chelem à Wimbledon, en 2017, et est même devenue numéro 1 mondiale en septembre de la même année. Encore demi-finaliste à Roland-Garros en 2018, l’Espagnole a ensuite connu un gros trou d’air, qui l’a faite tomber jusqu’à la 36e place au classement WTA fin 2019. Mais elle s’est ressaisie depuis, atteignant la finale de l’Open d’Australie en 2020 (défaite contre Sofia Kenin) et se réinstallant dans le Top 20.
Son Roland-Garros 2021 symbolise ce qu’elle est devenue et le tournoi avec elle. Arrivée en candidate au titre après un bon début de saison, même si ses résultats sur terre battue étaient peu probants, Muguruza a été éliminée dès le premier tour par Marta Kostyuk.
2017 : Jelena Ostapenko, la comète
Quel était le profil de Jelena Ostapenko avant Roland-Garros ?
Jelena Ostapenko était inconnue pour le grand public avant le début de Roland-Garros. A pas encore 20 ans, qu’elle allait fêter la veille de la finale du tournoi, la Lettonne occupait la 45e place mondiale. Son meilleur résultat en Grand Chelem était un troisième tour à l’Open d’Australie précédant Roland-Garros. Si elle n’avait pas encore remporté de tournoi sur le circuit WTA, elle avait déjà atteint trois finales, dont celle de Charleston, sur la terre battue har-tru américaine, en avril 2018. Elle avait aussi remporté Wimbledon chez les juniors en 2014.
Quel a été son parcours à Roland-Garros ?
Après trois premiers tours contre des adversaires moins bien classées qu’elle, Jelena Ostapenko a réussi l’exploit de vaincre quatre têtes de série d’affilée à partir des huitièmes de finale pour remporter le tournoi. Elle a accroché à son tableau de chasse Samantha Stosur (N°23), Caroline Wozniacki (N°11), Timea Bacsinszky (N°30) et Simona Halep (N°3). Sa victoire contre la Roumaine en finale (4-6, 6-4, 6-3), alors qu’elle était menée 6-4, 3-0 et balle de 4-0 pour son adversaire, était la première de sa carrière contre une Top 5. Ostapenko était ainsi devenue la deuxième joueuse non tête de série à gagner Roland-Garros, après la Britannique Margaret Scriven en 1933.
Qu’était-il arrivé aux favorites ?
Si Simona Halep avait tenu son rang en atteignant la finale, après avoir sorti Elina Svitolina (N°5) en quart de finale et Karolina Pliskova (N°2) en demi-finale, Angelique Kerber était sortie dès le premier tour malgré son statut de numéro 1 mondiale. La tenante du titre Garbiñe Muguruza (N°4) avait été battue dès les huitièmes de finale par Kristina Mladenovic.
Qu’a accompli Ostapenko après son sacre ?
Jelena Ostapenko est restée sur sa lancée de la fin de saison 2017. Elle est allée jusqu’en quarts de finale de Wimbledon et jusqu’au troisième tour de l’US Open, tout en obtenant à Séoul mi-septembre le deuxième titre de sa carrière. Elle est même montée jusqu’à la 5e place mondiale en 2018, après sa finale à Miami. Mais la Lettonne n’a plus obtenu de grands résultats en Grand Chelem depuis (3e tour au mieux à Roland-Garros en 2020) et n’a plus glané le moindre trophée depuis octobre 2019. D’où sa 44e place mondiale.
2018 : Simona Halep, la confirmation
Quel était le profil de Simona Halep avant Roland-Garros ?
Simona Halep faisait partie, à 26 ans, de ce club fermé des joueuses devenues numéro 1 mondiales sans avoir gagné au préalable un seul titre du Grand Chelem. La Roumaine ne devait pas cette situation seulement au congé maternité de Serena Williams, mais à son excellent parcours depuis mai 2017. Sur les douze mois précédents, elle avait gagné seulement deux titres (16 au total dans sa carrière), mais disputé en tout huit finales, dont deux en Grand Chelem (Roland-Garros 2017 et Open d’Australie 2018). Il ne lui manquait plus qu’un trophée majeur pour basculer dans une nouvelle dimension.
Quel a été son parcours à Roland-Garros ?
Simona Halep s’est faite une frayeur d’entrée, en lâchant le premier set au premier tour contre Alison Riske avant de dérouler (2-6, 6-1, 6-1), et s’est retrouvée deux fois de plus menée une manche à zéro durant son parcours (en quart de finale contre Angelique Kerber et en finale contre Sloane Stephens). Mais la Roumaine a tenu bon, en battant au passage quatre joueuses du Top 20 à partir des huitièmes de finale (Mertens, Kerber, Muguruza, Stephens). A sa quatrième finale en Majeur, Halep devenait ainsi la première joueuse à remporter son premier Grand Chelem en position de numéro 1 mondiale.
Qu’était-il arrivé aux favorites ?
Simona Halep a battu lors de son parcours les trois seules joueuses du Top 12 mondial à avoir franchi l’écueil des huitièmes de finale (Kerber, Muguruza, Stephens). Caroline Wozniacki (N°2) avait été éliminée dès les huitièmes de finale et Elina Svitolina (N°4) dès le troisième tour. La tenante du titre Jelena Ostapenko (N°5) avait été sortie dès son entrée en lice. C’était seulement la deuxième fois que cela arrivait dans l’ère Open, après Anastasia Myskina en 2005.
Qu’a accompli Halep après son sacre ?
Comme Garbiñe Muguruza, Simona Halep a remporté son deuxième titre du Grand Chelem à Wimbledon, l’année suivant sa victoire à Roland-Garros (2019). Mais elle n’a plus joué de finale en Majeur depuis, se contentant d’une demi-finale à l’Open d’Australie en 2020. Elle a aussi renoncé à l’US Open 2020 pour cause de Covid-19 et à Roland-Garros 2021 sur blessure. Si la Roumaine a empoché cinq titres supplémentaires depuis sa première victoire en Grand Chelem, elle est surtout installée dans le Top 10 sans discontinuer depuis janvier 2014. Un signe de sa régularité au haut niveau.
2019 : Ashleigh Barty, la bientôt n°1
Quel était le profil d’Ashleigh Barty avant Roland-Garros ?
Ashleigh Barty avait intégré le Top 10 peu avant Roland-Garros, dans la foulée de son titre à Miami, alors le plus prestigieux des quatre obtenus au cours de sa carrière. Âgée de 23 ans, l’Australienne était avant tout une joueuse de double à ses débuts (un titre à l’US Open et quatre autres finales de Grand Chelem entre 2013 et 2018). Elle n’avait jamais dépassé le troisième tour en Majeur jusqu’à l’US Open 2018 (huitième de finale) et avait enchaîné sur un quart de finale à l’Open d’Australie 2019. La preuve de sa montée en puissance des derniers mois.
Quel a été son parcours à Roland-Garros ?
Ashleigh Barty n’a lâché qu’un set pour atteindre les demi-finales, en dominant au passage sa seule tête de série du tournoi, Madison Keys (N°14). Elle s’est retrouvée à faire la course derrière au score pour la première fois du tournoi en demi-finale contre Amanda Anisimova, tout jeune Américaine de 18 ans finalement renversée en trois sets (6-7, 6-3, 6-3). Barty n’a fait qu’une bouchée de Marketa Vondrousova en finale (6-1, 6-3). Vondrousova disputait aussi sa première finale de Grand Chelem à seulement 19 ans. Pour quatre petits points, l’Australienne avait pris la tête du classement WTA après son titre, juste devant Naomi Osaka.
Qu’était-il arrivé aux favorites ?
Victorieuse des deux derniers tournois du Grand Chelem (US Open 2018 puis Open d’Australie 2019) et numéro 1 mondiale, Naomi Osaka avait été éliminée dès le troisième tour, comme Serena Williams. Parmi les 13 meilleures joueuses du monde, seules Barty et les deux finalistes de l’année précédente, Simona Halep et Sloane Stephens, étaient au rendez-vous des quarts de finale. Et les deux dernières n’avaient pas passé ce cap.
Qu’a accompli Barty après son sacre ?
Ashleigh Barty n’a plus disputé de finale en Grand Chelem depuis et n’a atteint qu’une seule fois le dernier carré (Open d’Australie 2020). Mais l’Australienne bénéficie de circonstances atténuantes, entre la pandémie de coronavirus qui l’a convaincu de ne pas revenir sur le circuit à la reprise en août 2020 et les pépins physiques qui l’ont empêché de finir l’Open d’Australie puis Roland-Garros en pleine possession de ses moyens cette année. Mais la numéro 1 mondiale depuis septembre 2019 n’en reste pas moins une joueuse constante sur le circuit, en témoignent ses trois titres depuis le début de la saison (Melbourne, Miami, Stuttgart).
2020 : Iga Swiatek, la spécialiste
Quel était le profil d’Iga Swiatek avant Roland-Garros ?
Iga Swiatek n’avait que 19 ans et peu de références au très haut niveau chez les seniors, après son titre à Wimbledon en 2018 en juniors. Le Polonaise n’avait pas encore gagné le moindre titre sur le circuit WTA. Mais elle avait tout de même joué une finale, à Lugano en 2019, et surtout atteint les huitièmes de finale de Roland-Garros en 2019 puis à l’Open d’Australie en 2020.
Quel a été son parcours à Roland-Garros ?
Iga Swiatek a frappé fort d’entrée, en étrillant au premier tour Marketa Vondrousova, finaliste de l’édition précédente et tête de série numéro 15 (6-1, 6-2). Dans ce Roland-Garros particulier, entre la situation sanitaire et le report à l’automne, imposant des conditions différentes aux joueuses, la Polonaise a réussi l’exploit d’éliminer Simona Halep, tête de série numéro 1 et grande favorite en l’absence d’Ashleigh Barty et de Naomi Osaka. Et en y mettant les formes (6-1, 6-2) et en donnant une leçon de jeu de terre battue à celle qui était considérée comme la meilleure du monde sur la surface. Plus jeune finaliste de Roland-Garros depuis 2001, Swiatek a conclu son Roland-Garros victorieux sans perdre un set, en dominant en finale Sofia Kenin, tête de série numéro 4 et sacrée à l’Open d’Australie en début d’année (6-4, 6-1).
Qu’était-il arrivé aux favorites ?
Ashleigh Barty et Naomi Osaka, respectivement numéros 1 et 3 mondiales, avaient fait l’impasse en raison de la pandémie de coronavirus. Simona Halep, promue tête de série numéro 1, a pris une leçon par Swiatek en huitième de finale. Elina Svitolina (N°3) a laissé passer sa chance de s’ouvrir les portes d’une première finale en Grand Chelem en s’inclinant contre la qualifiée argentine Nadia Podoroska en quart de finale. A noter que seulement six des 32 têtes de série étaient au rendez-vous des huitièmes.
Qu’a accompli Swiatek après son sacre ?
Il est encore tout frais, puisqu’il remonte seulement à huit mois en arrière. Mais Iga Swiatek a déjà confirmé qu’elle avait tout d’une grande, en intégrant le Top 10, en allant jusqu’en huitième de finale à l’Open d’Australie et en ajoutant deux titres à son palmarès sur la première moitié de la saison 2021 (Adelaïde et Rome). Après l’hécatombe des têtes de série cette année, la Polonaise était toutefois la favorite pour réaliser le doublé à Roland-Garros. Mais elle est tombée sur Maria Sakkari (N°17) en quart de finale alors qu’elle n’avait encore perdu aucune manche dans le tournoi.