Roland-Garros défend sa gestion du cas Osaka, mais s’engage en faire plus sur la santé mentale
Les organisateurs de Roland-Garros assurent avoir tout fait pour protéger Naomi Osaka, avant son forfait.
L’édition 2021 de Roland-Garros ne comptera pas seulement pour ce qui se sera passé sur le terrain. Elle restera aussi celle du retrait de Naomi Osaka et de la discussion que cela a engendré au sujet de la santé mentale dans le tennis, et plus généralement dans le sport.
Après avoir annoncé en préambule du tournoi son intention de ne pas participer aux conférences de presse d’après-match pour se protéger des doutes qui peuvent naître des questions des journalistes, la Japonaise s’est retrouvée sous la menace de sanctions quand elle a mis son plan à exécution, dans la foulée de sa victoire au premier tour contre Patricia Maria Tig (6-4, 7-6). Des amendes, d’un montant progressif au fil des matchs, et même une exclusion : voilà ce que risquait Osaka en cas de récidive. D’où sa décision de déclarer forfait, aussi pour se protéger de la tempête médiatique déclenchée, elle qui voulait justement se préserver de l’extérieur.
Forget : “Son agent ne savait pas comment réagir, parce qu’il ne savait pas lui-même comment elle se sentait”
En conférence de presse dimanche, pour dresser le bilan de ce Roland-Garros, les organisateurs du tournoi ont estimé avoir géré cette situation inhabituelle de la meilleure manière possible, dans l’intérêt de la joueuse.
“Il faut être certain que nous voulons que tout le monde soit heureux et profite de ces tournois, a assuré Guy Forget, le directeur de Roland-Garros. Quand on s’est aperçu de cela, on a essayé de la contacter, de parler à son agent, mais on n’a pas pu. Son agent ne savait pas comment réagir, parce qu’il ne savait pas lui-même comment elle se sentait. Petit à petit, alors qu’elle était prête à jouer, tous les autres joueurs et joueuses se demandaient ce qu’elle allait faire et comment elle allait réagir. Ça a été très difficile de savoir comment gérer la situation pour nous.”
Amélie Oudéa-Castera, directrice générale de la Fédération française de tennis et ancienne 251e joueuse mondiale, est allée encore plus loin dans sa description du processus qui a amené à sanctionner Osaka. Elle a indiqué que la FFT avait surtout agi pour protéger la numéro un mondiale, en essayant de comprendre ses sensations, et en l’éclairant sur le risque qu’elle prenait.
“Nous avons vraiment essayé de prendre contact avec Naomi, de différentes manières, à plusieurs reprises, y compris sur le terrain d’entraînement, y compris par écrit. La déclaration des Grands Chelems a été précédée par une lettre que nous lui avons envoyée personnellement, sans la publier. On l’a gardée pour elle. C’était une lettre personnelle où nous lui avons expliqué les conséquences auxquelles elle s’exposait, en refusant d’accomplir ses obligations vis-à-vis des médias. Son premier message sur les réseaux sociaux a été de parler des amendes. (…) Or nous voulions qu’elle ait à l’esprit que les amendes n’étaient pas la seule conséquence à laquelle elle s’exposait. On a donc dû lui renvoyer un message pour lui exposer tout ce qui était en jeu.”
On a vraiment essayé de penser à elle.
Amélie Oudéa-Castera
Oudéa-Castera estime que tout ce que la FFT a entrepris pour sortir de cette situation de crise était dans l’intérêt de la joueuse, tête de série numéro 2 et tenante du titre à l’US Open et à l’Open d’Australie. “Nous voulions la protéger en la mettant au courant. Cette amende de 15 000€ n’était pas l’amende maximale. Le maximum est de 20 000€. Nous voulions lui envoyer le message que l’on ne voulait pas aller au maximum tout de suite, qu’on ne voulait pas l’exclure tout de suite. On voulait juste lui envoyer un avertissement pour faire qu’elle satisfasse à ses obligations. On a vraiment essayé de penser à elle. On a été extrêmement pragmatiques dans notre manière d’aller vers la sanction.”
Du point de vue de la FFT et de l’organisation du tournoi, il était crucial de ne pas offrir de passe-droit à Osaka, peu importe son statut. “Je pense que l’amende était très symbolique. Quel que soit le joueur, qu’il ne vienne pas vous dire ce sentiment qu’il ait gagné ou perdu, ça peut être vu comme un manque de respect. La sanction, l’amende, est un message à tous les joueurs : vous devez aller devant les médias. (…) Tous les tournois du Grand Chelem sont restés soudés, parce que nous pensions que c’était important.”
Forget assure qu’Osaka va “mieux” et qu’elle sera à Wimbledon
Les organisateurs de Roland-Garros se réjouissent désormais qu’Osaka ait envoyé des messages rassurants ces derniers jours sur son état psychologique. “Elle a dit qu’elle se sentait mieux et qu’elle regrettait ce qui s’était passé. Nous le regrettons aussi, a soufflé Forget. Nous nous réjouissons de la voir jouer à Wimbledon et espérons la voir en grande forme sur le court.”
“Notre première préoccupation, c’est de savoir que Naomi se sent mieux, a confirmé Gilles Moretton, président de la FFT. Nathalie Dechy (ancienne 11e joueuse mondial et membre du comité de pilotage de Roland-Garros, ndlr) a pris des nouvelles. Elle est en Floride. Elle se repose en famille. Pour nous, c’est l’essentiel.”
Naomi Osaka n’aura pas agi pour rien, car la FFT assure que cet événement va servir à faire avancer la question de la santé mentale, sur les circuits et sur les tournois du Grand Chelem. Oudéa-Castera a certifié que ce sujet serait davantage pris en compte à l’avenir. “Nous avons fait tout ce que nous pouvions pour la respecter. Effectivement, du point de vue santé mentale, soins mentaux, nous en avons discuté avec les autres Grands Chelems, et y sommes très attachés.”
Osaka avait assuré que sa décision allait bien au-delà de son histoire personnelle, et voulait ouvrir une brèche pour les autres. A écouter toutes celles et ceux qui ont partagé des histoires similaires pendant la quinzaine, et la réaction du Grand Chelem, c’est au moins une victoire que la Japonaise aura décrochée à Paris.