Alcaraz arrache sa première finale de Roland-Garros après plus de 4 heures de crispation contre Sinner
Carlos Alcaraz a dominé Jannik Sinner en demi-finale de Roland-Garros (2-6, 6-3, 3-6, 6-4, 6-3) au terme d’un duel qui n’a pas tenu toutes ses promesses en terme de spectacle, entre la crispation d’Alcaraz et les ennuis physiques de Sinner.
L’histoire retiendra que le premier Alcaraz – Sinner de l’histoire à Roland-Garros s’est soldé par un nombre de 100 fautes directes (102) exceptionnel. La qualification d’Alcaraz pour la finale aux dépens du futur numéro un mondial (2-6, 6-3, 3-6, 6-4, 6-3) n’aura donc rien à voir avec leur quart de finale mythique de l’US Open 2022. Mais le résultat est le même : c’est Carlitos qui est passé et disputera dimanche sa première finale à Roland-Garros, contre Zverev ou Ruud.
Alcaraz n’eut pas de balle de match à sauver cette fois, mais il dut surmonter des obstacles peut-être plus durs encore. Un an après les crampes qui avaient ruiné sa demi-finale contre Djokovic, l’Espagnol a produit pendant trois heures un tennis aux antipodes de celui qui l’a mené à la première place mondiale en 2023 et à deux titres du Grand Chelem, sur dur (US Open 2022) puis sur gazon (2023). Contre un Jannik Sinner manifestement diminué physiquement, il a compté sur ses qualités de matcheur pour faire plier l’Italien et dépasser un stress qui l’a longtemps paralysé et a entraîné un départ catastrophique.
Alcaraz reprend de l’avance dans leur face à face (5-4), après avoir déjà écarté Sinner à Indian Wells en mars. Il aura aussi battu l’Italien lors de deux de leurs trois affrontements en majeur, dans ce qui était vendredi la plus jeune demi-finale d’un tournoi du Grand chelem depuis l’US Open 2008 (Nadal – Murray).
« Il faut trouver de la joie dans la souffrance » a dit Alcaraz, sur le court, dans un écho à des propos tenus dans le passé par Rafael Nadal. « Sur la terre de Roland-Garros, quand vous faites de longs échanges, jouez 4 heures, cinq sets, il faut se bagarrer, il faut souffrir mais il faut aussi aimer ça. »
Alcaraz perdu en début de match
Pendant plus d’une heure, cette demi-finale événement se sera résumée à une question : Alcaraz va-t-il un jour entrer dans le match ou va-t-il être démantelé par Sinner en trois sets secs, dans un de ces sommets avortés dont le sport est friand ?
Mené 4-0 et 0-15 sur son service, l’Espagnol a d’abord ressemblé à l’élève d’un Sinner très clinique. Deux chiffres résument cette horrible entame pour Carlitos : deux jeux blancs sur le service de Sinner pour commencer, et une série de 9 points consécutifs entre 3-0 et 4-1.
Malgré un break concédé, Sinner prit trois fois le service d’Alcaraz au premier et conclut à sa troisième balle de set. Alcaraz, dans un des nombreux gestes de frustrations habituels auxquels il se livra vendredi, sembla en vouloir à la terre battue, à son staff, à beaucoup de trop de choses pour un combattant de sa trempe.
Le match a connu un premier tournant à 6-2, 2-1 service Sinner au deuxième. La qualité du service de l’Italien a baissé brutalement et Alcaraz en a profité pour débreaker d’abord puis mener ensuite 4-2. Plus alerte tactiquement, plus relâché, l’Espagnol mit à son tour la main sur le match tandis que Sinner semblait gêné par sa hanche et fut, clairement, victime de crampes au bras droit.
Sinner diminué ?
Après la rencontre, Sinner a minimisé aussi bien l’une (l’impression de douleurs à la hanche) que les autres (les crampes). Mais il n’aurait pas perdu cette demi-finale comme il l’a fait s’il avait pu se préparer véritablement pour Roland-Garros. Ses trois semaines sans entraînement après son forfait à Madrid lui ont coûté de la présence physique, peut-être même une partie de son intégrité – il a aussi fait appel au kiné au quatrième set pour prendre soin de sa cuisse droite.
Sinner avait cependant assez de mordant pour revenir à son tour dans la partie, à un set partout (6-2, 3-6), et quatre balles de break à 2-1 pour Alcaraz. L’incapacité de l’Espagnol à se saisir d’un match qui semblait s’offrir à lui le replongea dans un abîme de frustrations et d’approximations. Quasiment incapable de lâcher un amorti, plutôt prudent même sur les balles courtes , Alcaraz perdit cette manche et se remit en danger (2-6, 6-3, 3-6).
Sinner et Alcaraz n’ont quasiment jamais bien joué en simultané au cour de ce match. Ni quasiment jamais plus de trois ou quatre points consécutifs. Mais au moins tenaient-ils leur service au quatrième set. Cette serie a tenu jusqu’à 5-4 Alcaraz. A 30-15 en sa faveur sur son service, l’Italien fut victime d’un « Djoko-smash », à savoir un smash immanquable et pourtant trop excentré. Il ne remporterait plus un seul point du set (6-4) et se traîna ce boulet jusqu’à 3-0 Alcaraz au cinquième.
Dans ce dernier set enfin, Alcaraz fut égal à lui-même. Bête de compétition, surtout sur la durée des cinq sets. En tenant son break d’avance avec beaucoup de méthode, quitte à donner l’impression de s’économiser sur les jeux de retour, Alcaraz a remporté sur le Chatrier son neuvième match en cinq sets sur dix disputés. « Il a mieux joué que moi les points importants » a résumé Sinner en conférence de presse. Djokovic a pu dire la même chose en finale de Wimbledon 2023, victime de la foi sans borne du gamin de Murcie sur le même score : 6-4.