9 juin 1990 : le jour où Monica Seles est devenue la plus jeune joueuse titrée en Grand Chelem
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Le 9 juin 1990, Monica Seles domine Steffi Graf en finale de Roland-Garros (7-6, 6-4) et devient la plus jeune joueuse de l’histoire à remporter un tournoi du Grand Chelem.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi cela a marqué l’histoire du tennis
Ce jour-là, le 9 juin 1990, Monica Seles domine Steffi Graf en finale de Roland-Garros (7-6, 6-4) et devient la plus jeune joueuse de l’histoire à remporter un tournoi du Grand Chelem. A l’âge de seize ans et six mois, la Yougoslave parachève une incroyable saison sur terre battue au à l’issue de laquelle elle demeure invaincue. Cette victoire marque le début d’une nouvelle ère du tennis féminin, que Steffi Graf dominait de la tête et des épaules depuis 1987, puisque Seles allait non seulement gagner Roland-Garros trois fois d’affilée, mais aussi lui ravir la place de numéro 1 mondiale moins d’un an plus tard, en mars 1991.
Les personnages
- Steffi Graf, la patronne
Steffi Graf est née en 1969. En 1982, à l’âge de treize ans, elle devient la plus jeune joueuse de l’histoire à obtenir un classement WTA. Après avoir gagné l’épreuve de démonstration organisée pendant les Jeux Olympiques de Los Angeles en 1984, elle progresse régulièrement, et les résultats ne se font pas attendre. Elle atteint la demi-finale de l’US Open en 1985, à l’âge de seize ans, battue par la numéro 1 mondiale Martina Navratilova (6-2, 6-3). En 1986, elle remporte son premier tournoi, à Hilton Head, avant d’arriver à nouveau en demi-finale à New-York. Cornaquée par son père, elle explose en 1987, lorsqu’elle soulève son premier trophée en Grand Chelem, après être venue à bout de Martina Navratilova en finale de Roland-Garros. Elle est vaincue en finale de Wimbledon et de l’US Open par la même Navratilova, qu’elle remplace cependant, le 17 août, au sommet de la hiérarchie où elle se trouvait presque continuellement depuis 1982. En 1988, Steffi Graf connaît la plus grande année de sa déjà grande carrière : elle réalise un invraisemblable Grand Chelem Doré , obtenant une médaille d’or olympique en plus des quatre couronnes du Grand Chelem, un exploit unique dans l’histoire du tennis. En 1989, elle maintient son emprise impitoyable sur le tennis féminin en remportant encore trois des quatre tournois du Grand Chelem, battue seulement en finale de Roland-Garros par Arantxa Sanchez (7-6, 3-6, 7-5). Elle s’impose ensuite à l’Open d’Australie 1990 et compte ainsi, à seulement vingt ans, pas moins de neuf titres du Grand Chelem à son palmarès.
- Monica Seles, star montante
Monica Seles est née en 1973. Elle fait ses premiers pas sur le circuit en 1988, à 14 ans, à Boca Raton, où elle bat la 31e mondiale Helen Kelesi (7-6, 6-3). Ses frappes à deux mains des deux côtés, son style de jeu précurseur tout en prise de balle tôt et en puissance, et bien sûr les cris caractéristiques qu’elle pousse à chaque frappe, révolutionnent le tennis féminin. En 1989, elle dispute sa première saison complète chez les pros et, après avoir gagné son premier tournoi au printemps, à Houston, elle participe à son premier tournoi du Grand Chelem à Roland-Garros. Sa première apparition à Paris fera date. Au troisième tour, opposée à la 4e mondiale Zina Garrison, la jeune Monica, 15 ans, entre sur le Central en distribuant des fleurs au public avant d’écraser son adversaire 6-3, 6-2. Elle se hisse jusqu’en demi-finales où elle est seulement battue en trois sets (6-3, 3-6, 6-3) par l’invincible Steffi Graf, vainqueur des cinq derniers tournois du Grand Chelem. En 1990, elle arrive à Roland-Garros en pleine confiance, 3e mondiale après avoir remporté cinq tournois d’affilée dont trois sur terre battue.
Le lieu : Roland-Garros
Cette histoire a lieu à Roland-Garros. Le stade, situé dans l’ouest parisien, à la lisière du bois de Boulogne, accueille les Internationaux de France depuis 1928. Ce fut le premier et désormais le seul tournoi du Grand Chelem sur terre battue, la surface la plus lente, ce qui en fait le tournoi le plus difficile à gagner sur le plan physique.
Roland-Garros est l’endroit où Steffi Graf a gagné son premier tournoi du Grand Chelem en 1987 et, en 1988, elle a marqué l’histoire du tournoi en y remportant la finale la plus courte de l’histoire du Grand Chelem en battant Zvereva 6-0 6-0 en seulement trente-deux minutes.
L’histoire : Graf renversée par “un camion”
Le 9 juin 1990, la finale de Roland-Garros propose une affiche alléchante. D’un côté, Steffi Graf. Numéro 1 mondiale incontestée depuis bientôt trois ans, elle a gagné huit des neuf derniers tournois du Grand Chelem – elle a subi sa seule défaite en finale, ici même, l’an passé. Elle est parvenue en finale sans perdre le moindre set. Quelle que soit son adversaire, elle est forcément favorite.
En face d’elle, la jeune Monica Seles. Âgée de 16 ans, elle avait déjà atteint les demi-finales à Paris en 1989, mais cette année, elle a franchi un cap. Ces derniers mois, elle a gagné cinq tournois consécutifs, prenant ses adversaires en vitesse et les écrasant sous sa puissance au point que la légende du tennis Martina Navratilova, écrasée 6-1 6-1 en finale de Rome, a dit qu’elle « avait eu l’impression de s’être fait renverser par un camion ». A Berlin, le dernier tournoi avant Roland-Garros, elle a même réussi à battre Steffi Graf (6-4 6-3), qui l’avait dominée lors de leurs trois premières rencontres en 1989.
Le match débute alors que les nuages s’amoncellent au-dessus de la capitale. Monica Seles annonce la couleur en frappant un retour gagnant dès le premier point : ce sera brutal. La Yougoslave mène 3-1, avant que l’orage qui s’abat finalement sur le Court Central ne renvoie tout le monde au vestiaire. Monica Seles n’est pas perturbée par l’interruption, mais, alors qu’elle mène 5-3, Steffi Graf hausse le ton, recolle au score et l’emmène au tie-break. Menée 5-0, Seles montre alors toute sa combativité et, incroyablement lucide, parvient à revenir et à prendre le premier set, 7-6.
Au deuxième set, Monica Seles est toujours aussi agressive. Installée sur sa ligne, elle crie plus fort que jamais et, avec une violence rare, elle balade Graf aux quatre coins du court. Une fois de plus, elle gagne les points les plus importants, sauvant notamment deux balles de break à 4-4, avant de conclure au jeu suivant, 6-4. L’adolescente vient de réaliser son rêve : à seulement 16 ans, elle a gagné Roland-Garros, devenant ainsi la plus jeune joueuse titrée en Grand Chelem de l’histoire.
La postérité du moment :
Le style de jeu révolutionnaire proposé par Seles en 1990 annonce l’avenir du tennis féminin. Dans les années à venir, sa manière de frapper très tôt et très fort sera copiée sur tous les terrains du monde, au point de devenir caractéristique du tennis féminin.
Pour Monica Seles, ce titre sera non seulement le premier de trois titres consécutifs à Roland-Garros, mais marquera aussi le début de son ascension vers la place de numéro 1 mondiale, dont elle s’emparera le 11 mars 1991, plus jeune joueuse de l’histoire à occuper cette place. Les années suivantes, elle dominera simplement le tennis et son palmarès parle de lui-même : à partir de janvier 1991, Monica Seles remportera sept des huit tournois du Grand Chelem auxquels elle aura participé, seulement battue en finale de Wimbledon 1992, présentant un rapport de 56 victoires pour une seule défaite. Elle s’adjugera également trois Masters d’affilée, en 1990, 1991 et 1992. Sa domination s’arrêtera de la plus tragique des manières lorsqu’elle sera poignardée en plein match par un déséquilibré en avril 1993. Même si elle finira par revenir et ajouter l’Open d’Australie 1996 à son palmarès, elle n’atteindra plus jamais de sommets comparables à ses premières années.
Steffi Graf occupera la place de numéro 1 mondiale jusqu’à ce que Monica Seles l’en détrône en 1991. Après l’agression de Seles en 1993, Steffi Graf retrouvera le sommet du classement jusqu’en 1997, établissant un nouveau record de 377 semaines passées en tête du classement WTA. En s’imposant à l’US Open 1995, elle deviendra la seule joueuse de l’histoire à avoir gagné chacun des tournois du Grand Chelem à au moins quatre reprises. A sa retraite, en 1999, peu de temps après son dernier titre majeur conquis à Roland-Garros, elle aura remporté un total incroyable de 22 tournois du Grand Chelem.