Sinner, le sacre de la perfection
Auteur d’une finale quasi-parfaite avec le brin de réussite qui sied aux plus grands, Jannik Sinner a dominé Alexander Zverev pour conserver son titre à l’Open d’Australie, ce dimanche (6-3, 7-6(4), 6-3 en 2h42).
La puissance, la précision, la froideur dans les moments chauds et, en plus, ce soupçon de réussite qui ne sourit qu’aux plus grands. Il n’y a décidément pas grand-chose à faire face à un tel Jannik Sinner, auteur ce dimanche d’une finale de très haute volée pour battre Alexander Zverev en trois sets (6-3, 7-6(4), 6-3 en 2h42 sans avoir eu à sauver la moindre balle de break, et remporter son troisième titre du Grand Chelem en un an, le deuxième consécutif à l’Open d’Australie.
Sinner, plus que jamais n°1 mondial, continue sa domination sans partage sur le circuit, qu’il piétine même depuis six mois avec une seule petite défaite – en finale du tournoi de Pékin, face à Carlos Alcaraz, au tie break du troisième défaite – sur ses 38 derniers matches. Le voilà désormais assis sur une série en cours de 21 victoires, et 22 sets consécutifs remportés face à des joueurs du top 10, un record. Monumental, et même plus que ça. Des statistiques dignes du Big Three, à l’image du niveau de jeu déployé ce dimanche pour concasser Zverev.
Ce dernier, qui devient le 7ème joueur de l’ère Open à perdre ses trois premières finales de Grand Chelem (après Lendl, Agassi, Ivanisevic, Murray, Thiem et Ruud), nourrira sans doute moins de regrets que lors de ses deux premières occasions, à chaque fois perdues en cinq sets après avoir eu le match en mains, face à Dominic Thiem à l’US Open 2020 et Carlos Alcaraz l’an dernier à Roland-Garros. A la limite l’Allemand pourra-t-il encore évoquer le manque de chance, celle qui a souri à Sinner à 4-4 partout au tie break du deuxième set, sous la forme d’un coup droit « let » imparable qui a permis à l’Italien de remporter ce point crucial, et de s’envoler vers le succès. Mais peut-on vraiment parler de chance ?
La fin du deuxième set, seul moment chaud à gÉrer pour sinner
Quoi qu’il en soit, c’est là, dans cette fin de deuxième set, le seul moment de la finale où l’on a senti le numéro 1 mondial flancher légèrement. Le seul moment où le match aurait pu potentiellement basculer dans l’autre sens. Pendant un set et demi, c’est simple, Sinner avait été parfait, impérial sur ses jeux de service, clinique à l’échange et même supersonique en défense. Bref, il jouait juste trop vite et trop bien.
De son côté, Zverev était lui-même plutôt bien rentré dans le match, mais face à tant de maestria, avait rapidement commencé à s’agacer, à l’image de cette discussion avec l’arbitre, à 4-3 contre lui dans le premier set, en raison d’un retard de « livraison » de raquettes qu’il avait envoyées à corder. Un premier tournant dans ce match car derrière, ça n’a pas « loupé » : l’Allemand a concédé son service et le premier set dans la foulée.
Sous les yeux du nageur français Leon Marchand venu s’entraîner à Melbourne, Zverev semblait même prêt à plonger dans les premières minutes du deuxième set, où son coup droit (comme son « body language ») commençait à flancher dans des proportions inquiétantes. Mais c’est aussi le seul moment du match où Sinner perdit un peu de sa superbe, en « oubliant » de concrétiser deux balles de break à 1-1.
En proie semble-t-il à un petit coup de mou physique – on le vit même se toucher l’arrière de la cuisse au milieu du deuxième set – , le numéro 1 mondial se retrouva par deux fois à deux points de concéder ce deuxième set, les deux fois sur son service : à 4-5, 0-30 puis à 5-6, 0-30. A chaque fois, il fut parfait sous la pression, à l’image de ce point exceptionnel remporté à 30-30 dans ce douzième jeu, où il enchaîna amortie, lob, smash du fond de court avant de finalement conclure d’un petit passing de revers glissé. Trop fort, tout simplement trop fort…
Derrière, il y eut encore ce fameux épisode du « let » à 4-4 dans le jeu décisif. De la réussite, incontestablement. Mais de la chance, vraiment ? La bande du filet aura simplement souri, comme c’est souvent le cas, à celui qui ne semblait nullement stressé dans ce moment sous haute pression, qui continuait d’avancer sans retenue dans ses frappes à l’image encore de la balle de deuxième set, une accélération de coup droit extérieur ligne.
Cette fois, c’en était fini des derniers espoirs de Zverev. Sinner pouvait voguer tranquillement vers la victoire lors d’un troisième set qui virait au cavalier seul. Comme un symbole, c’est d’un ultime enchaînement amortie/passing de revers intouchable qu’il scellait un succès lui permettant de :
- Remporter un troisième titre du Grand Chelem et devenir le joueur italien le plus titré de l’histoire (hommes et femmes confondus)
- Devenir le 8ème joueur de l’ère Open à remporter ses trois premières finales de Grand Chelem (après Connors, Borg, Edberg, Kuerten, Federer, Wawrinka et Alcaraz).
- Devenir le plus jeune joueur (23 ans et 163 jours) à remporter deux Open d’Australie depuis Jim Courier en 1992-93.
- Devenir le premier joueur à défendre avec succès son premier Grand Chelem depuis Rafael Nadal (Roland-Garros 2005-06).
- Devenir le premier joueur à gagner trois titres du Grand Chelem sur dur consécutivement depuis Novak Djokovic en 2015-16.
- Devenir le premier joueur à gagner une finale de Grand Chelem sans avoir concédé une balle de break depuis Rafael Nadal à l’US Open 2017 (contre Kevin Anderson).
Une masterclass digne des plus grands. Une masterclass signée Jannik Sinner.