Medvedev, sombre et mystique : “Le gamin en moi a cessé de rêver”
S’il disait n’avoir pas trop de regrets après sa défaite face à Rafael Nadal en finale de l’Open d’Australie, ce dimanche à Melbourne, Daniil Medvedev était en revanche déconfit par le manque de soutien populaire. Au point, disait-il, de remettre en question son amour du jeu et ses rêves d’enfant…
Après avoir perdu une finale légendaire face à Rafael Nadal ce dimanche à l’Open d’Australie, Daniil Medvedev avait la mine triste lorsqu’il s’est présenté en conférence de presse. Mais pas tout à fait pour les raisons que l’on pourrait imaginer. Le Russe, finalement, n’était pas tant déçu par la défaite en elle-même – il était même plutôt satisfait de sa prestation, tout en concédant avoir été moins fort physiquement – que par le contexte global de cette rencontre, qu’il n’a pas aimé.
Un rien mystique et philosophe, le plus Français des joueurs russes a choisi de débuter sa conférence de presse non pas en répondant à une question, mais racontant une histoire. Son histoire. Celle d’un gamin qui rêvait de gloire, mais qui a petit à petit perdu son innocence en raison d’une série de déceptions, notamment le manque de soutien de la foule, ouvertement favorable à Rafa ce dimanche.
“Quand j’étais jeune et que je disputais mes premiers tournois internationaux, je rêvais d’être à la place des grands champions et c’était incroyable (…), a-t-il ainsi déclaré devant les journalistes. Puis, durant ma carrière, il y a eu plusieurs petits moments de déceptions où l’enfant qui était en moi s’est demandé si ça valait le coup de continuer à rêver de ces grandes choses. Et aujourd’hui, j’ai arrêté de rêver.”
Le public a affecté Medvedev
Face à l’incrédulité sinon la stupéfaction de l’assistance, Medvedev a étayé sa pensée, expliquant que le manque de soutien du public l’avait beaucoup affecté durant cette finale. “Avant le service de Rafa, dans le cinquième set, un gars a crié – ce qui m’a surpris – “Come on Daniil” et des milliers de personnes l’ont repris. Moi, avant mon service, il ne se passait jamais rien. Ce n’est pas respectueux. Et décevant. Je ne sais pas si, avec tout ça, j’aurais envie de continuer le tennis après 30 ans.”
“Donc oui, à partir de là, le gamin en moi a cessé de rêver. Désormais, je joue pour moi, pour ma famille, pour soutenir tous ceux qui me font confiance et bien sûr pour la Russie car je ressens beaucoup de soutien là-bas. S’il y avait un tournoi à Moscou avant Roland Garros ou Wimbledon, je serais prêt à le disputer quitte à rater Roland-Garros ou Wimbledon. L’enfant, désormais, il joue pour lui. Voilà, c’est mon histoire. Merci de l’avoir écoutée.”
A plusieurs reprises durant sa quinzaine australienne, Daniil Medvedev a manifesté son mécontentement à l’égard des spectateurs australiens, fustigeant notamment le “faible quotient intellectuel” de ceux qui sifflent entre ses deux balles de service, l’un des effets de foule qui l’agace le plus.
Mais cette finale avec un public quasiment à sens unique a été, manifestement, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase pour un Medvedev qu’on ne pensait si sensible à ce désamour, vu qu’on croyait même qu’il le provoquait.
Plus jeune, j’entendais souvent les gens dire qu’ils souhaitaient voir la jeune génération pousser Roger, Novak ou Rafa dans leurs retranchements. En fait, ils mentaient.
Daniil Medvedev
“Plus jeune, quand j’ai commencé à affronter les Roger, Novak ou Rafa, j’entendais souvent les gens parler de la jeune génération et dire que ça serait bien qu’on les pousse dans leurs retranchements. D’ailleurs, ça m’a beaucoup boosté. Mais en fait, les gens mentaient puisqu’à chaque fois que j’affronte l’un d’eux dans un grand match, je ne vois pas grand-monde pour souhaiter ma victoire”, a-t-il par ailleurs expliqué, faisant sans doute référence à la finale de l’US Open où le public avait massivement soutenu Novak Djokovic.
Daniil Medvedev devrait faire son retour à la compétition dans deux semaines en indoor à Rotterdam. On espère pour lui qu’il sera, d’ici là, parfaitement régénéré.