9 décembre 1985 : Le jour où Edberg a remporté son premier Grand Chelem, à l’Open d’Australie
Le 9 décembre 1985, Stefan Edberg remporte son premier titre du Grand Chelem, en battant son compatriote suédois Mats Wilander en finale de l’Open d’Australie.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi c’est historique : Le jeune Edberg ouvre son palmarès en Grand Chelem
Ce jour-là, le 9 décembre 1985, Stefan Edberg, futur n°1 mondial alors âgé de 19 ans, remporte son premier titre du Grand Chelem, en battant son compatriote suédois Mats Wilander en finale de l’Open d’Australie (6-4, 6-3, 6-3). La victoire d’Edberg, deuxième nouveau venu de l’année à gagner un tournoi majeur après le triomphe de Boris Becker à Wimbledon, confirme le changement de physionomie du circuit en 1985. Les deux suédois reprennent ensuite l’avion ensemble puisqu’ils doivent se préparer à disputer la finale de la Coupe Davis contre l’Allemagne de l’Ouest.
Les acteurs : Stefan Edberg et Mats Wilander
- Stefan Edberg, l’un des meilleurs à seulement 19 ans
Contrairement à ses fameux compatriotes, Bjorn Borg et Mats Wilander, Stefan Edberg, né en 1966, est un adepte du service-volée. Déjà très fort chez les juniors, il y réussit le Grand Chelem en 1983, mais il est proche d’arrêter le tennis la même année, à 17 ans, après que l’un de ses services a accidentellement tué un juge de ligne à New-York. Il décide finalement de continuer, un choix qu’il ne regrettera probablement jamais. Le Suédois, qui, à l’âge de 15 ans, avait eu le courage d’abandonner son revers à deux mains pour un revers à une main, remporte son premier titre professionnel dès 1984, à Milan, aux dépens de Wilander (6-4, 6-2). La même année, il se hisse en quarts de finale de l’Open d’Australie, sans battre le moindre joueur du top 50 (finalement battu par le même Wilander, 7-5, 6-3, 1-6, 6-4). En 1985, il ajoute trois tournois supplémentaires à son palmarès (Memphis, San Francisco et Bâle), et lorsque débute l’Open d’Australie, qui se déroule alors au mois de décembre, il est 6e mondial. Il ne lui manque plus qu’un résultat marquant dans un tournoi majeur pour s’affirmer comme l’un des meilleurs joueurs du monde.
- Mats Wilander, une star précoce
Mats Wilander, né en 1964, a connu le succès à un très jeune âge. En 1982, à l’âge de dix-sept ans et neuf mois, il devient en effet le plus jeune vainqueur de Grand Chelem de l’histoire, en battant en finale Guillermo Vilas, véritable légende sur terre battue (1-6, 7-6, 6-0, 6-4). Il se rend également célèbre après avoir fait preuve d’un rare fair-play plus tôt dans le tournoi : en demi-finale, contre José-Luis Clerc, il inverse, sur balle de match, une annonce qui le propulsait en finale, et ce alors que l’arbitre a déjà annoncé « jeu, set et match ». En quarts de finale de la Coupe Davis 1982, il dispute également le match le plus long de l’ère open, vaincu en six heures et vingt-deux minutes par John McEnroe (9-7 6-2 15-17 3-6 8-6). Battu en finale de Roland-Garros 1983 par Yannick Noah (6-2, 7-5, 7-6), il remporte un deuxième titre du Grand Chelem quelques mois plus tard, en s’imposant face à Ivan Lendl sur le gazon australien (6-1, 6-4, 6-4) à la surprise générale, lui qui semblait être un expert de la terre battue. En 1984, il parvient à défendre son titre à Melbourne (aux dépens de Kevin Curren, 6-7, 6-4, 7-6, 6-2), et en 1985, il ajoute un deuxième Roland-Garros à son palmarès (en battant en finale Lendl, 3-6, 6-4, 6-2, 6-2). Wilander mène également la Suède à son premier succès en Coupe Davis, en 1984, et son équipe est à nouveau qualifiée pour la finale en 1985. À l’entame de l’Open d’Australie, il est 3e mondial.
Le lieu : Melbourne (Australie)… sur gazon
Contrairement aux autres tournois du Grand Chelem, l’Open d’Australie (d’abord appelé Championnat d’Australasie puis Championnat d’Australie) a changé plusieurs fois de lieu au fil des ans. L’épreuve changeait même de ville chaque année avant de s’installer à Melbourne en 1972, et pas moins de cinq villes australiennes l’ont accueillie à au moins trois reprises : Melbourne, Sydney, Adelaïde, Brisbane et Perth. Ses dates ont été assez mouvantes également, entre début décembre et fin janvier, faisant de l’Open d’Australie parfois le premier, parfois le dernier Grand Chelem de la saison. Jusqu’à 1982, la plupart des meilleurs joueurs font l’impasse sur l’épreuve en raison de son éloignement, des dates proches des fêtes de fin d’année et des prix insuffisants. Mats Wilander est l’un des joueurs qui a rendu à l’épreuve une partie de son prestige, et il en est le double tenant du titre, ayant remporté l’épreuve en 1983 et 1984.
L’histoire : La relève suédoise fait plaisir à voir
La finale de l’Open d’Australie 1985 est la cinquième rencontre entre Stefan Edberg et Mats Wilander. Jusqu’à présent, Wilander s’est imposé quatre fois sur cinq, mais Edberg est en train de changer de statut. Après avoir sauvé deux balles de match en huitièmes de finale face à Wally Masur (6-7, 2-6, 7-6, 6-4, 6-2), et après avoir éliminé le n°1 mondial, Ivan Lendl, en demi-finale (6-7, 7-5, 6-1, 4-6, 9-7), il a prouvé qu’il était « taillé dans le bon matériau », pour citer son coach, Tony Pickard. Cependant, après avoir ainsi disputé deux matches en cinq sets, il est à craindre qu’il manque d’énergie contre son régulier compatriote, qui compte déjà quatre titres majeurs à son palmarès, dont deux remportés ici-même, à Melbourne, en 1983 et 1984.
Wilander a atteint la finale sans perdre le moindre set, mais, au lieu de l’avantage, il est possible que ce parcours trop facile ait causé son malheur. Pour battre le n°1 mondial en demi-finale, Edberg a dû affûter son jeu de service-volée, et il démarre la finale à un niveau de jeu tel que son adversaire est dépassé. Wilander est complètement dominé du début à la fin d’une finale à sens unique, au point d’en perdre (un peu) de son légendaire calme, demandant à l’arbitre de vérifier la hauteur du filet, ou encore, exigeant qu’un juge de ligne retire sa veste à cause du reflet du soleil sur les boutons. Après son combat de plus de quatre heures en demi-finale, la dernière marche est presque facilement franchie par Edberg, qui s’impose 6-4, 6-3, 6-3 en seulement 93 minutes.
« C’est l’un de mes meilleurs tournois, déclare Edberg à l’issue de sa victoire, d’après le New York Times. « Je n’ai jamais été aussi heureux de ma vie. »
Malgré sa déception, Wilander reste fair-play. « S’il y a bien quelqu’un contre qui ça ne me dérange pas trop de perdre, c’est bien Stefan. C’est un très bon ami. » Voilà qui doit rassurer le capitaine suédois de Coupe Davis, puisque les deux joueurs sont sur le point de faire équipe pour affronter l’Allemagne de l’Ouest en finale.
La postérité du moment : Deux stars suédoises sont nées et vont écrire leur histoire
Même s’ils seront tous deux défaits par Boris Becker, Mats Wilander et Stefan Edberg, appuyés en double par Joakim Nyström, battront l’Allemagne de l’Ouest en finale de la Coupe Davis, quelques jours avant Noël.
Edberg conservera son titre australien en 1986, remportant ainsi le deuxième des 6 titres majeurs qu’il gagnera dans sa carrière, avec ses deux couronnes à Wimbledon (1988, 1990) et ses deux trophées conquis à l’US Open (1991, 1992). Edberg accèdera à la première place mondiale le 13 août 1990, et il y passera au total 72 semaines.
Wilander atteindra son apogée en 1988, année où il deviendra n°1 mondial après avoir réalisé le petit Chelem (c’est-à-dire remporter trois des quatre épreuves majeures). Au total, Wilander aura gagné l’Open d’Australie à trois reprises, et accumulé sept titres du Grand Chelem. Seul Wimbledon, où il ne dépassera jamais les quarts de finale, manquera à son palmarès.