23 janvier 2011 : Le jour où Schiavone et Kuznetsova ont joué 4h44, le match féminin le plus long de l’histoire en Grand Chelem
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Aujourd’hui, nous retournons en 2011 pour voir comment Francesca Schiavone et Svetlana Kuznetsova ont établi un record de durée en Grand Chelem, bataillant pendant quatre heures et 44 minutes avant que l’Italienne ne finisse par s’imposer (6-4, 1-6, 16-14).
Ce qu’il s’est passé ce jour-là : Un bataille et un record à l’Open d’Australie
Ce jour-là, le 23 janvier 2011, en huitièmes de finale de l’Open d’Australie, Francesca Schiavone remporte le match plus long de l’histoire du Grand Chelem féminin, sauvant six balles de match face à Svetlana Kuznetsova avant de s’imposer 6-4, 1-6, 16-14 en quatre heures et 44 minutes. Les deux femmes effacent le précédent record (4h19) établi un an plus tôt par Sandra Zahlavova-Strycova et Regina Kulikova à l’Open d’Australie 2010.
Les personnages : Francesca Schiavone et Svetlana Kuznetsova
Francesca Schiavone, née en 1980, devient professionnelle en 1998. L’Italienne intègre le top 100 deux ans plus tard, en 2000, année où elle atteint sa première finale WTA, à Tachkent (défaite contre Iroda Tulyaganova, 6-3, 2-6, 6-3). Son jeu ne passe pas inaperçu, en raison de son revers à une main et de ses nombreux changements de rythme. Au cours des années suivantes, elle s’implante solidement dans le Top 20, atteignant à trois reprises les quarts de finale de tournois du Grand Chelem : à Roland-Garros en 2001 (battue par Martina Hingis, 6-1, 6-4), à l’US Open en 2003 (dominée par Jennifer Capriati, 6-1, 6-3), et à Wimbledon en 2009 (éliminée par Elena Dementieva, 6-2, 6-2).
En 2010, elle franchit une nouvelle étape dans sa carrière lorsque, à la stupéfaction générale, elle triomphe à Roland-Garros aux dépens de Samantha Stosur (6-4, 7-6). Il s’agit seulement du quatrième titre de sa carrière et elle est la première joueuse italienne à remporter un tournoi du Grand Chelem. Dans les mois qui suivent, elle atteint également les quarts de finale de l’US Open (battue par Venus Williams, 7-6 6-4). Grâce à ces excellents résultats, elle termine l’année au 7e rang mondial.
La Russe Svetlana Kuznetsova est née en 1985 dans une famille de sportifs : sa mère était une sprinteuse cycliste qui avait remporté six titres de championne du monde dans les années 1970. Bien que Svetlana ait commencé par le cyclisme, elle décide de se concentrer sur le tennis à l’âge de 13 ans et passe pro deux ans plus tard, en 2000. Elle fait son entrée dans le top 100 en 2002, année où elle remporte son premier titre à Espoo (en battant Denisa Chladkova en finale, 0-6, 6-3, 7-6).
Elle obtient son premier résultat notable dans un tournoi majeur à Wimbledon en 2003, où elle atteint les quarts de finale (battue par Justine Henin, 6-2, 6-2). L’année suivante, en 2004, elle domine Elena Dementieva lors de la deuxième finale 100% russe de l’histoire du Grand Chelem (6-3, 7-5), terminant ainsi l’année 5e mondiale. Après une saison 2005 difficile, elle passe la plupart des quatre années suivantes dans le top 5, accumulant 13 titres et remportant un deuxième tournoi du Grand Chelem, à Roland-Garros, en 2009 (en battant Dinara Safina en finale, 6-4, 6-2). Cependant, depuis lors, ses résultats ont été plutôt décevants et, à la fin de l’année 2010, elle a chuté au 27e rang mondial.
Le lieu : Melbourne
Contrairement aux autres tournois du Grand Chelem, l’Open d’Australie (d’abord appelé Championnat d’Australasie puis Championnat d’Australie) a changé plusieurs fois de lieu au fil des ans. L’épreuve changeait même de ville chaque année avant de s’installer à Melbourne en 1972, et pas moins de cinq villes australiennes l’ont accueillie à au moins trois reprises : Melbourne, Sydney, Adelaïde, Brisbane et Perth. Ses dates ont été assez mouvantes également, entre début décembre et fin janvier, faisant de l’Open d’Australie parfois le premier, parfois le dernier Grand Chelem de la saison.
Jusqu’en 1982, la plupart des meilleurs joueurs font l’impasse sur l’épreuve en raison de son éloignement et des prix insuffisants, mais à partir de la victoire de Mats Wilander, la dynamique change. Pour rendre le tournoi plus attractif, le comité du tournoi déploie d’énormes efforts qui mènent au déménagement de l’épreuve vers un nouveau site, Flinders Park (qui sera plus tard renommé Melbourne Park), à l’abandon du gazon pour des courts en dur, et à la construction du premier court central doté d’un toit rétractable. La dotation augmente également, et il ne faut alors que quelques années pour que l’Open d’Australie devienne le Grand Chelem préféré de nombreux joueurs.
L’histoire : Un dernier set dantesque de trois heures
Lorsque Francesca Schiavone et Svetlana Kuznetsova s’affrontent en quarts de finale de l’Open d’Australie 2011, les amateurs de tennis savent que les deux femmes peuvent jouer un grand match- elles sont tout de même les deux dernières gagnantes de Roland-Garros. Même si Kuznetsova a dernièrement évolué loin de son meilleur niveau, elle et son adversaire sont connues pour leur grande combativité : la Russe avait notamment remporté un célèbre marathon contre Serena Williams à Roland-Garros, en 2009, surmontant une entorse à la cheville pour l’emporter 7-6, 5-7, 7-5. Dans cet Open d’Australie, elle semble en grande forme après avoir éliminé Justine Henin au troisième tour (6-4, 7-6).
Après que Schiavone a remporté le premier set, 6-4, et que Kuznetsova a pris le second, 6-1, il aurait été difficile de prévoir qu’un set décisif de trois heures allait s’ensuivre, et que les deux femmes allaient battre le record du plus long match de l’histoire du Grand Chelem! Dans ce scénario à couper le souffle, la Russe laisse filer six balles de match, et l’Italienne se fait breaker deux fois alors qu’elle sert pour le match. Toutefois, Schiavone finit par l’emporter, concluant sa victoire avec style en achevant son adversaire d’une volée gagnante, à sa troisième balle de match.
“C’est un moment fantastique pour moi”, déclare Schiavone, selon The Guardian. “C’est l’un des moments les plus émouvants de ma vie. Je me suis simplement dit de continuer, d’y mettre tout mon cœur et de foncer.”
“Le match aurait pu basculer d’un côté ou de l’autre tellement de fois”, commente une Kuznetsova amère, citée par le New York Times. ” Je pense que c’était juste vraiment la journée de Francesca. Nous nous sommes toutes les deux battues si fort pendant tout le match, et dans les moments importants, elle a simplement mieux joué. Mais statistiquement, j’ai aussi eu l’impression d’avoir été la meilleure joueuse sur le court. J’ai mieux joué. C’est très décevant.”
Bien qu’il y ait eu déjà eu, dans l’histoire du circuit WTA, un match plus long que celui-ci, le marathon de quatre heures et 44 minutes remporté ce jour-là par Francesca Schiavone améliore de 25 minutes le précédent record en Grand Chelem, détenu par Sandra Zahlavova-Strycova et Regina Kulikova et établi à l’Open d’Australie 2010.
Les matchs les plus longs de chaque Grand Chelem féminin :
- Open d’Australie : 2011, huitièmes de finale : Francesca Schiavone bat Svetlana Kuznetsova en quatre heures et 44 minutes (6-4, 1-6, 7-6).
- Roland-Garros : 1995, premier tour : Virginie Buisson bat Noëlle van Lottum en quatre heures et sept minutes (6-7, 7-5, 6-2)
- Wimbledon : 1995, 2e tour : Chanda Rubin a battu Patricia Hy-Boulais en trois heures et 45 minutes (7-6, 6-7, 17-15).
- US Open : 2021, deuxième tour : Elise Mertens a battu Rebecca Peterson en trois heures et 40 minutes (3-6, 7-6, 7-6), et le même jour, Rebeka Masarova a battu Ana Bogdan, également en trois heures et 40 minutes (6-7, 7-6, 7-6).
- Le match le plus long de l’histoire du tennis féminin a été joué en 1984, à Richmond, lorsque Vicki Nelson-Dunbar a battu Jean Hepner en six heures et 31 minutes (6-4, 7-6).
La postérité du moment : Schiavone n’ira pas plus loin malgré une nouvelle bataille
En quarts de finale, après cet incroyable marathon, Francesca Schiavone trouvera la force de pousser Caroline Wozniacki à disputer trois sets, mais elle s’inclinera finalement 3-6, 6-3, 6-3. Plus tard en 2011, l’Italienne créera à nouveau la surprise en atteignant une deuxième finale consécutive à Roland-Garros, mais cette fois, elle y sera battue par Li Na (6-4, 7-6). Cela restera cependant son dernier grand résultat jusqu’à sa retraite, en 2018.
Svetlana Kuznetsova ne dépassera plus jamais les quarts de finale d’un tournoi du Grand Chelem. Elle parviendra toutefois à se hisser à nouveau dans le top 10 en 2016.Quatre ans plus tard, en 2015, au deuxième tour de Roland-Garros, les deux femmes se livreront un nouveau combat homérique, dont l’Italienne sortira une fois de plus gagnante (6-7, 7-5, 10-8) après trois heures et 50 minutes de jeu.