Record de Federer bientôt battu, famille et temps qui passe : pourquoi Djokovic va activer le “mode Roger” en Grand Chelem
Novak Djokovic, vainqueur dimanche de son 18e titre du Grand Chelem et bientôt recordman du nombre de semaines passées à la première place mondiale, envisage de modifier sa manière de construire son calendrier pour mieux se concentrer sur les Majeurs. Pour des raisons sportives autant que personnelles.
Non content d’avoir remporté son 18e titre du Grand Chelem, Novak Djokovic se projette déjà sur la suite. A savoir continuer d’ajouter des trophées à sa collection en Grand Chelem, dans sa quête pour rattraper Roger Federer et Rafael Nadal.
Le sacre de Djokovic face à Daniil Medvedev dimanche en finale de l’Open d’Australie (7-5, 6-2, 6-2) lui a permis de revenir à deux longueurs du duo hispano-suisse. Et au vu de sa montée en puissance durant le tournoi, il a toutes les chances d’ajouter au moins un autre titre majeur à son palmarès d’ici la fin de la saison.
Retravailler son calendrier en pensant aux Grands Chelems et à sa famille
Les conditions de déplacement étant incertaines dans les mois à venir en raison de la pandémie de coronavirus, Djokovic a avoué qu’il se concentrait encore davantage sur les tournois du Grand Chelem. Surtout qu’il est assuré de battre le record de Federer de 310 semaines passées à la première place mondiale. Ce sera chose faite le 8 mars prochain.
“Ça va être un soulagement pour moi, parce que je vais pouvoir mettre toute mon énergie et ma concentration sur les Grands Chelems. Pour viser la première place du classement, il faut jouer toute la saison et tu dois être performant dans tous les tournois.”
“Je vais adapter mes objectifs, ce qui implique des ajustements faits mon calendrier. Ce n’est pas une obligation, mais c’est une opportunité dont je veux profiter, en tant que père et mari. A en juger parce qui se passe dans le monde, voyager ma famille sera très compliqué, parce que je dois emmener mes entraîneurs et mon staff, et il y a des règles en place qui limitent à le nombre d’accompagnants à deux par joueur sur les tournois, en dehors des Grands Chelems.”
Carrière et famille, tout est question d’équilibre
Federer est l’exemple à suivre pour Djokovic. Cela fait un moment que le Suisse construit son programme annuel en fonction des tournois du Grand Chelem et des moments qu’il souhaite consacrer à sa famille.
Il a modifié une première fois son approche après la naissance de ses jumelles, en 2009, puis a encore fait évoluer son calendrier en 2014, suite à l’arrivée de ses jumeaux. Federer est, depuis, focalisé sur les Grands Chelems, particulièrement ceux pour lesquels il pense avoir une réelle chance de victoire finale. Il a zappé Roland-Garros en 2017 et 2018, pour se donner la meilleure chance de vaincre à Wimbledon. Et ça a fonctionné, puisqu’il a remporté son huitième titre à Londres en 2017.
Maintenant âgé de 39 ans, Federer ne peut plus jouer une vingtaine de tournois par saison, comme il le faisait au début de sa carrière. Dubai, Halle et Bâle sont les seuls tournois habituellement à son programme, en dehors des Grands Chelems et les Masters 1000, sur lesquels il est contraint de s’aligner par le règlement.
Djokovic a soufflé qu’il était de plus en plus difficile de trouver le juste équilibre entre sa carrière et sa vie de famille, souhaitant voir grandir son fils de 6 ans et sa fille de 3 ans.
“Je vais changer mon calendrier par rapport à l’année dernière ou autres saisons. J’ai expliqué pourquoi. (…) Quand je suis loin d’eux, je dois faire en sorte de maximiser ce temps et de le justifier par des titres, pour que ça ait du sens d’être sans mes enfants et ma femme pendant si longtemps. Evidemment qu’il me manque, ça me brise le coeur parfois, de voir mes enfants. Heureusement grâce à la technologie, je peux les voir par FaceTime. Mais ne pas être avec eux, en être séparés pendant des longues périodes…”
“Mais il y a tant de personnes qui souffrent bien plus que moi que je ne peux pas me plaindre. Bien sûr, j’ai eu beaucoup de chance dns ma vie. Mais il me manque vraiment. J’ai hâte de les retrouver.”
Les “Trois Mousquetaires” du tennis
La victoire de Djokovic à Melbourne, son neuvième titre l’Open d’Australie, fait que le Big 3 (lui-même, Federer et Nadal) a remporté 15 des 16 derniers tournois du Grand Chelem. Seul Dominic Thiem a cassé cette hégémonie sur la période. Même avec un Federer à 39 ans, Nadal qui en aura 35 en juin et Djokovic qui fêtera son 34e anniversaire en mai, le trio reste intraitable dans les Majeurs. Ce qui a inspiré à Djokovic, dans un sourire, la comparaison avec les “Trois Mousquetaires”.
“Je savoure chaque titre davantage, parce que je sais que plus le temps passe, plus ça va devenir difficile pour moi de gagner des grands titres, parce qu’il y a des jeunes joueurs qui autant les crocs, voire plus. Ils progressent, ils se font menaçants. Ça fait quinze ans que nous dominons dans les Grands Chelems.”
“Je n’ai pas le sentiment d’être vieux, fatigué ou quoique ce soit. Mais je sais qu’en était réaliste, les choses sont différentes pour moi par rapport à il y a 10 ans. Je dois être plus intelligent dans la gestion de mon programme et avoir mes pics de forme aux bons moments. Donc sur les Grands Chelems.”
En quête de suprématie
Federer, qui n’a plus joué depuis 13 mois suite à une opération du genou, doit faire son retour sur le circuit en mars, à Doha. Nadal, qui a atteint les quarts de finale à Melbourne, sera encore le grand favori de la saison sur terre battue et de Roland-Garros, où il a surclassé Djokovic en finale l’année dernière pour remporter un 13e titre à Paris. Les trois hommes continuent de se pousser mutuellement.
“Chacun suit son propre chemin et marque l’histoire à sa façon, estime Djokovic. Ils ont déjà fait l’histoire. Ils ont laissé une marque indélébile sur notre sport. Je veux en faire de même, à ma façon, en étant authentique et fidèle à moi-même.”
“Est-ce que je pense à gagner plus de Grands Chelems et à battre des records ? Evidemment. Et à partir de maintenant, mon esprit et mon énergie, jusqu’à ce que je prenne ma retraite, seront focalisés sur ces tournois, pour en remporter le plus possible.”
Le Big 3 reste trop fort pour les autres
Thiem, Medvedev, Stefanos Tsitsipas et Alexander Zverev sont les étendards de la jeune génération. Mais passer sur le corps du Big reste une mission incroyablement difficile, sur laquelle la plupart bute. Ce n’est pas une question de talent, selon Djokovic.
“Dominic a disputé plusieurs finales de Grand Chelem avant d’en gagner un. Combien de temps ça va prendre à Zverev, Tsitsipas ou Medvedev pour en faire de même ? Je ne sais pas. Mais ils s’en rapprochent. Medvedev, il fallait vraiment le battre aujourd’hui. Il était quand même sur une série de 20 victoires. Ils ont tous gagné le Masters, plusieurs tournois du Grand Chelem et sont bien classés. Ils ont tous joué des demi-finales ou des finales de Grand Chelem, donc ce n’est qu’une question de temps. Espérons que ce ne soit pas pour tout de suite.”
“Les jeunes qui arrivent ont beaucoup de qualités. Mais Roger, Rafa et moi, on est là pour une raison. On ne veut pas passer la main, on ne veut pas leur permettre de s’imposer en Grand Chelem. C’est très clair. Qu’on le verbalise cela ou pas, c’est ce qu’on dégage.”
Ivanisevic : “Impossible de ne jouer que les Grands Chelems”
Djokovic a assuré qu’il aurait besoin de temps pour se remettre de la blessure aux abdominaux subie au troisième tour, confirmant au passage que c’était bien une déchirure. Mais son coach Goran Ivanisevic a aussi fait savoir qu’il avait besoin d’engranger suffisamment de matchs pour aborder les Grands Chelems en pleine forme.
“C’est impossible de ne se concentrer que sur les Grands Chelems, a expliqué le vainqueur de Wimbledon 2001. Il faut toujours jouer avant un Grand Chelem pour être performant. Pour être honnête, ça m’importe peu, parce qu’il a gagné le tournoi et, en l’état, il peut me dire qu’il ne jouera pas avant Roland-Garros. Mais il a besoin de jouer, lui-même le veut, pour les spectateurs, qui j’espère reviendront bientôt, parce que c’est pour eux que vous faites du sport. Tout le monde en a profité après une année très triste.”