Le retour du roi et de la reine, des duels épiques, le doute Djokovic : Ce qu’il faut retenir d’une folle semaine de tennis
La semaine écoulée, même sans tournois majeurs au calendrier, a donné lieu à des matchs exceptionnels et marquera à coup sûr la saison sur terre battue. Voici ce qu’il faut en retenir.
Une semaine qui donne déjà envie d’être à Roland-Garros. Les tournois de Barcelone et de Belgrade, pour l’ATP, de Stuttgart et d’Istanbul, pour la WTA, ont laissé la sensation que la saison sur terre battue était lancée pour de bon. Voici ce qu’il faut retenir de cette semaine qui pourrait compter pour la suite.
Barcelone (ATP 500) : Nadal-Tsitsipas, le chef-d’œuvre de la terre
- L’enseignement principal : Nadal reste le patron
Rafael Nadal a élevé son niveau de jeu sur terre battue par rapport à ce qu’il avait montré à Monte-Carlo la semaine dernière (élimination par Andrey Rublev en quarts de finale) et il est ainsi allé chercher un titre retentissant. L’Espagnol s’est démené pour vaincre Stefanos Tsitsipas dans le match en deux sets gagnants le plus long de la saison sur le circuit masculin (3h38′ de jeu, victoire 6-4, 6-7, 7-5). C’était un combat épique, Nadal laissant passer deux balles de match dans le deuxième set et Tsitsipas en faisant de même dans la manche décisive. Nadal a trouvé un moyen de s’en sortir et a indiqué en conférence de presse après le match qu’il était satisfait de l’évolution de son jeu sur terre.
“Je pense que j’ai réussi à jouer de mieux en mieux toute la semaine, à chaque match, et aujourd’hui c’était un peu mieux qu’hier, et je pense que j’ai encore une marge de progression. Ce n’était pas parfait, je crois vraiment que je peux mieux jouer que je ne le fais sur terre battue, et j’espère vraiment que la victoire d’aujourd’hui va m’aider à hausser un peu mon niveau, pour atteindre celui dont j’aurai besoin pour les prochains tournois sur lesquels je vais m’aligner.”
Il n’y a plus grand-chose à écrire à propos de Nadal sur terre battue. Les chiffres se suffisent à eux-même. Il affiche désormais un bilan incroyable de 66 victoires pour quatre défaites à Barcelone, avec 12 titres. Ça fait beaucoup de plongeons dans la piscine du Real Club de Tenis Barcelona !
Nadal a remporté son 61e tournoi sur terre battue et il est repassé devant Daniil Medvedev pour reprendre la deuxième place du classement ATP. Cette place pourrait lui être bien utile s’il la conserve jusqu’à Roland-Garros, puisqu’elle lui permettrait d’éviter Novak Djokovic au moins jusqu’à la finale.
Le classement des titres ATP
- Jimmy Connors : 109
- Roger Federer : 103
- Ivan Lendl : 94
- Rafael Nadal : 87
• Ce qu’il faut aussi retenir : Tsitsipas a bousculé le roi
Stefanos Tsitsipas sort de deux semaines exceptionnelles. Il a remporté son premier titre en Masters 1000 à Monte-Carlo et a enchaîné avec un parcours autoritaire jusqu’en finale à Barcelone. Le Grec s’est affirmé comme un prétendant pour Roland-Garros en faisant jeu égal avec Nadal pendant toute la rencontre. Tsitsipas, qui avait abordé la finale sur une série de neuf victoires de suite et de 17 sets remportés d’affilée, deux records en carrière pour lui, a avoué qu’il sortait grandi de cette expérience, quand il lui était demandé de commenter sa balle de match, sur le service de Nadal, à 5-4, 30-40 dans la troisième manche.
“Je voulais la victoire aujourd’hui. J’ai senti que j’en étais proche, j’ai eu des opportunités que je n’ai pas saisies. J’ai la sensation que j’aurais pu produire un meilleur tennis, mais je suis heureux de l’avoir poussé ainsi. J’étais littéralement à deux centimètres de gagner ce match.”
- L’affaire à suivre : Sinner ne se fixe déjà plus de limites
Jannik Sinner poursuit sa progression éclair sur le circuit ATP et il a encore rappelé cette semaine pourquoi il était sur la voie d’intégrer le Top 10. Il a battu Roberto Bautista Agut pour la troisième fois de suite dans leurs confrontations, ce qui n’est pas anodin pour un joueur de son âge, et a dominé ensuite Andrey Rublev, tête de série N.3, en quart de finale. Mais peut-être que le plus impressionnant est sa réaction à sa défaite en demi-finale contre Stefanos Tsitsipas. C’est rafraîchissant d’entendre un joueur de même pas 20 ans s’attendre à gagner contre tous les joueurs qu’il affronte sur le circuit, y compris des vétérans installés.
“Je n’ai pas saisi mes opportunités, lui l’a fait. Evidemment je suis un peu déçu, mais c’est le tennis. Il a mieux joué les points importants que moi, je pense qu’il a surtout mieux servi et c’est la raison pour laquelle il a gagné.”
Stuttgart (WTA 500) : Barty est bien la numéro un
- L’enseignement principal : Barty, le doute n’est plus permis
Ashleigh Barty aura été la reine du suspense à Stuttgart. L’Australienne est revenue d’un set de retard lors de chacun de ses trois derniers matchs, tous contre des Top 10, pour décrocher le titre. Barty a désormais gagné 10 matchs de suite contre des joueuses du Top 10, et elle est devenue la première N.1 mondiale à s’imposer à Stuttgart depuis Justine Hénin en 2007.
Pas mal pour une joueuse qui n’avait joué sur la terre battue indoor de Stuttgart. Après sa première victoire de la semaine, contre Laura Siegemund au deuxième tour, Barty, déjà vainqueure à Miami il y a trois semaines, avait évoqué le temps dont elle avait besoin pour se sentir à son aise sur terre battue.
“Ça prend du temps. Je n’ai pas le sentiment de ne pas savoir où mettre les pieds. A chaque match vous vous améliorez, vous vous habituez à la surface meuble sous vos pieds, mais oui, chaque match vous apporte de l’expérience et de l’aisance.”
Elle n’est peut-être pas encore complètement à son aise, mais c’est une vraie menace pour de nouveau s’imposer à Roland-Garros, après son titre en 2019.
- Ce qu’il faut aussi retenir : La montée en puissance de Sabalenka sur terre
Ce n’était pas la finale d’Aryna Sabalenka, mais c’était déjà très significatif pour elle d’en être là à Stuttgart. Elle a décroché ses deux plus belles victoires sur terre battue, en considérant le classement, avec ses succès sur Anett Kontaveit (27e WTA) et Simona Halep (3e WTA). Ces victoires devraient l’aider à Madrid et à Rome où, aussi étrange que cela puisse paraître, elle n’a jamais remporté un match dans le tableau principal.
Sabalenka a expliqué qu’avoir ajouté des éléments à son jeu, comme les amorties et des angles plus courts, l’a aidée à élever son niveau sur terre battue.
“J’ai beaucoup travaillé mon toucher, le jeu court croisé, le jeu d’attaque. Bien sûr que ça démontre que je suis sur la bonne voie, je fais ce qu’il faut. Je dirais que mon jeu n’est pas encore un jeu de terre battue, mais je peux jouer sur terre. Je pense que tout le travail accompli pour développer mon jeu, c’est une bonne étape et ça m’a donné beaucoup de puissance, surtout sur terre battue.”
- L’affaire à suivre : Kenin est dans le dur
Sofia Kenin était très optimisme au sujet de sa saison sur terre battue et de son niveau sur la surface. Après avoir atteint la finale de Roland-Garros la saison dernière, l’Américaine espère démontrer que ce parcours n’avait rien d’une anomalie. Mais elle s’est inclinée contre Kontaveit en deux sets et aura du travail à Madrid et à Rome, pour stopper une série en cours de trois défaites. Si cette série devait se poursuivre, cela minerait sa confiance.
Belgrade (ATP 250) : Djokovic n’est pas encore Djokovic
- L’enseignement principal : Karatsev, c’est (vraiment) du sérieux
Voilà l’une des performances les plus inattendues depuis… Et bien depuis qu’Aslan Karatsev a pris de court le monde du tennis à l’Open d’Australie en février : le Russe a sauvé 23 balles de break et éliminé Novak Djokovic en trois sets en demi-finale du tournoi de Belgrade (7-5, 4-6, 6-4).
Karatsev n’a pas réussi à enchaîner en finale contre Matteo Berrettini, mais sa performance contre Djokovic a apporté une preuve supplémentaire de son talent et de son sang-froid naturel sous pression.
Djokovic lui-même ne pouvait cacher son admiration :
“Je dois féliciter Karatsev, qui a joué avec beaucoup de courage. A chaque fois qu’il devait sortir ses meilleurs coups, il l’a fait, a concédé le N.1 mondial. Félicitations à lui, une performance incroyable de sa part.”
- Ce qu’il faut aussi retenir : Berrettini repart sur le rythme auquel il avait commencé l’année
C’est un bon début d’année pour Matteo Berrettini, qui l’avait commencée en fanfare avec de belles victoires contre Dominic Thiem et Gaël Monfils à l’ATP Cup, puis en atteignant la deuxième de l’Open d’Australie, avant d’être obligé de déclarer forfait en raison d’une blessure aux abdominaux. Deux mois ont passé et Berrettini semble avoir pleinement récupérer. Après avoir remporté son quatrième titre ATP, le troisième sur terre battue, il faut l’ajouter à la liste des outsiders pour Roland-Garros.
- L’affaire à suivre : Que va faire Djokovic pour Madrid ?
Du point de vue de Djokovic, il était bien mieux en jambes à Belgrade qu’à Monte-Carlo, où il s’est incliné contre Dan Evans. Et il a encore du temps devant lui pour retrouver son meilleur niveau sur terre battue. Pas besoin d’être au top trop tôt après tout, en particulier avec Roland-Garros reporté d’une semaine.
Reste que ce n’est pas le début de saison sur terre battue idéal et que Djokovic a du pain sur la planche. C’est le sens de ce qu’il a dit samedi, mais il n’était pas certain de s’aligner à Madrid à la semaine prochaine, donc il est difficile de savoir où il espère pouvoir disputer les grands matchs nécessaires pour monter en puissance.
“Roland-Garros reste ma préoccupation principale. Je dois m’améliorer. Je dois mieux jouer pour avoir une chance à Roland-Garros, je dois jouer bien mieux qu’aujourd’hui, ou qu’à Monte-Carlo. Donc oui, j’ai beaucoup de travail et j’espère que ça pourra me servir quand ça comptera le plus, à Paris.”
Istanbul (WTA 250) : Cirstea a bien fait d’insister
- L’enseignement principal : Sorana Cirstea ouvre le deuxième chapitre de sa carrière
A son entrée dans le tournoi, Sorana Cirstea était aussi enthousiaste à l’idée de s’aligner sur terre battue que Benoît Paire l’est de jouer dans un stade vide. La Roumaine a avoué à Tennis Majors qu’elle n’était pas impatiente de revenir à la terre battue, après avoir passé la plupart des 18 derniers mois sur des courts en dur. Mais voilà, elle a remporté le titre à Istanbul, et avec la manière, sans perdre un set, pour soulever un trophée sur le circuit WTA pour la première fois depuis 2008.
“C’était un sentiment bizarre, parce que toute l’année dernière, pendant le confinement, je m’entraînais sur dur et je n’ai joué que deux tournois sur terre battue, à Palerme et à Roland-Garros, et ils avaient tourné court pour moi (deux défaites au premier tour). Donc revenir sur la terre battue, après quasiment un an et demi sur dur, je me disais : ‘Je n’aime pas ça du tout !'”
- Ce qu’il faut aussi retenir : Le rebond de Kostyuk
Marta Kostyuk, la prometteuse Ukrainienne qui avait si bien commencé l’année en atteignant les demi-finales à Abou Dhabi, a connu une période plus compliquée ces derniers mois, en raison de blessures et d’un combat difficile contre la Covid-19. Mais elle semble retrouver la forme et a affiché un excellent niveau de jeu sur les trois premiers tours, s’imposant contre Daria Kasatkina et Ana Konjuh pout se qualifier pour son deuxième dernier carré de l’année.
Kostyuk bouge très bien et a les qualités pour devenir une excellente joueuse de terre battue. Il sera intéressant de voir comment elle se comportera sur les tournois WTA 1000 en mai, à Madrid puis à Rome, maintenant qu’elle est en pleine santé.
- L’affaire à suivre : Le come-back de Konjuh continue
Après quatre opérations du coude qui l’ont quasiment contrainte à mettre un terme à sa carrière, Ana Konjuh est de retour sur le circuit, en quête d’un come-back dans le Top 100. Avec son niveau actuel, il ne lui manque que des wild-cards pour y parvenir. Konjuh a atteint les quarts de finale à Istanbul, une première sur un tournoi WTA depuis 2017, et elle rentrera en Croatie pour jouer un 60k ITF à Zagreb la semaine prochaine. Madrid ne lui a pas attribué d’invitation, mais elle espère en avoir une pour Rome. Elle est aux portes du Top 200 en l’état, après avoir battu Madison Keys et Iga Swiatek à Miami, il est évident que son tennis est toujours là, en particulier sur les surfaces rapides.
Sans tournoi majeur ?