Paire : “J’ai perdu deux ans, mais là j’ai envie de retrouver mon meilleur niveau”
Après avoir battu le Croate Duje Ajdukovic mercredi pour son entrée en lice au Challenger de Brest, Benoît Paire s’est épanché sur son désir de revenir à son meilleur niveau, et sur les efforts qu’il a entrepris dernièrement pour y parvenir. Il s’estime, enfin, sur la voie du renouveau.
Benoît Paire n’a battu “que” le 344e joueur mondial mercredi soir (le Croate Duje Ajdukovic, 7-6, 6-3), ça n’était “que” le premier tour du Challenger de Brest-Agricole, mais l’Avignonnais était heureux presque comme s’il venait de réussir la “perf” de sa vie.
“Je suis content car je pense que c’est mon meilleur match depuis deux ans, du moins en termes d’attitude”, a-t-il ainsi lâché après sa victoire, après avoir passé un long moment à discuter avec les joueurs de foot du Stade Brestois, avec qui il avait prévu de partager un entraînement ce jeudi matin. “J’ai perdu deux ans mais là, je sens que j’ai envie de retrouver mon meilleur niveau. Ça faisait longtemps que je ne m’étais pas senti dans la peau d’un joueur qui est là pour gagner des matches.”
Dans la foulée de l’interview protocolaire avec l’organisation du tournoi, Benoît Paire a pris le temps, en zone mixte, d’expliquer comment il s’est repris en mains ces dernières semaines. Et pourquoi il estime que, cette fois, ça va durer.
Vous venez d’expliquer votre volonté de revenir à votre meilleur niveau. Pourquoi maintenant ?
Benoît Paire : “Je ne sais pas. Parce que c’est le moment. C’est juste que je me sens prêt à accepter de faire les efforts à nouveau. J’ai essayé avant, mais je n’y arrivais pas. Je n’avais pas la tête à me battre. Je ne prenais plus aucun plaisir sur un court, dans n’importe quel tournoi. Le tennis était devenu une corvée. J’ai conscience que le mot est fort, mais c’est comme ça que je le ressentais. J’ai fait une forme de burn-out. La tête n’allait pas, le corps n’allait pas, je n’avais pas envie de m’entraîner ni de jouer des matches.”
J’ai coupé un peu, j’ai arrêté la fête, j’ai arrêté l’alcool. Et j’ai fait une bonne préparation physique récemment à la Rafa Nadal Academy.
Benoît Paire
Comment avez-vous stoppé l’engrenage ?
Benoît Paire : “J’ai d’abord coupé un peu. Je me suis recentré sur les choses importantes. J’ai arrêté de sortir, j’ai arrêté de faire la fête, j’ai arrêté de boire de l’alcool. Et j’ai fait une bonne préparation physique récemment à la Rafa Nadal Academy (à Majorque, Ndlr).
En résumé, j’ai fait attention à pas mal de choses pour retrouver une hygiène de sportif, ce qui m’a manqué pendant deux ans. Je me suis remis dans la tête d’un joueur de tennis professionnel qui veut gagner des matches. Ici, à Brest, j’ai le sentiment que pour la première fois depuis longtemps, je suis là pour gagner le tournoi. Ces derniers temps, j’étais là plutôt pour faire de la figuration.”
Récemment, pourtant, vous disiez que c’était dur pour vous de revenir jouer en France…
Benoît Paire : “Je n’ai aucun problème avec le public français, j’adore jouer en France ! Je ressens beaucoup de soutien. C’est moi qui déconne depuis deux ans, mais les gens voient que je m’accroche et continuent de me supporter malgré tout.
Ce qui est dur pour moi, c’est que je n’ai pas mon meilleur niveau. Je sens qu’ils attendent de moi quelque chose que je ne suis pas capable de leur donner à 100%. Ça, ça me met encore un peu plus de pression. Mais c’est moi qui me la mets, cette pression. A chaque fois, j’aimerais tellement que les gens voient un “bon” Benoît Paire et à chaque fois, j’ai des déceptions.
Quand, à Rennes, je joue mal parce que je sors tous les soirs, forcément, je ne me sens pas bien dans ma peau. Du coup, je ne me sens pas heureux de jouer devant le public français parce que j’ai envie de partager avec lui quelque chose de fort, alors que ces derniers temps, je n’étais pas prêt à ça.”
Bercy ? Je ne mérite pas la wild-card, je ne l’ai même pas demandée, je n’ai pas fait les efforts. Après Brest, je pars sur une tournée de quatre semaines au Japon. Seul.
Benoît Paire
Avez-vous été déçu de n’avoir pas d’invitation pour Bercy ?
Benoît Paire : “Aucune ! Je ne mérite pas la wild-card, je ne l’ai même pas demandée. Pour avoir une wild-card, il faut faire des efforts pendant toute une saison, chose que je n’ai pas faite. Pourquoi prendre la place de quelqu’un qui l’a fait ? Moi, ce dont j’ai besoin, c’est de gagner des matches, de retrouver la confiance et de prouver aux gens que je suis à nouveau capable de gagner des matches de tennis. Après ça, je n’aurais plus besoin de wild-card.”
Quel sera votre programme pour la suite ?
Benoît Paire : “Après Brest, je pars pour une tournée de quatre semaines au Japon, où je vais enchaîner quatre tournois Challengers. Je pars tout seul, il n’y aura pas d’autres joueurs français. J’ai besoin de m’isoler un peu pour retrouver le bon état d’esprit et repartir sur de bonnes bases. Je sens qu’il faut que j’aille au combat et j’ai vraiment envie d’y aller.”
Comme vous l’avez dit, on vous a vu récemment vous entraîner à la Rafa Nadal academy. Pouvez-vous nous raconter cette expérience ?
Benoît Paire : “Je voulais faire un petit essai avec un entraîneur, Gabi Urpi, qui travaille là-bas. C’est quelqu’un qui m’aide, que je connais depuis longtemps et en qui j’ai confiance. Je me suis dit que ça pouvait être une bonne idée de le rejoindre. Donc voilà, je me suis lancé et j’y ai passé une dizaine de jours.”
A part Gabi et, bien sûr, Rafa et Toni, je ne connaissais personne là-bas. Mais j’ai été super bien accueilli. Ils ont tout mis à ma disposition, un préparateur physique, des kinés, etc. Malheureusement, je me suis blessé dès le premier entraînement donc je n’ai pas pu passer beaucoup de temps sur le court. A la place, j’ai fait énormément de physique et, au fond, c’est ce dont j’avais besoin.
J’ai été sérieux, j’ai fait tout ce qu’il fallait. J’ai aussi passé énormément de temps à discuter avec Gabi, ces discussions m’ont fait du bien et m’ont conforté dans mon choix de reprendre à fond. Je suis reparti de là reboosté.”
Vous sentez-vous capable de retrouver l’élite en 2023 ?
Benoît Paire : “Il ne faut pas oublier que juste avant le Covid, j’étais 20e mondial, avec peu de points à défendre. J’avais fait huitièmes à Roland-Garros et à Wimbledon, gagné deux titres plus une finale à Winston-Salem et à Auckland. J’étais sur une très bonne dynamique. Puis le Covid est arrivé. Je n’ai pas réussi à le gérer. Et voilà, je me retrouve aujourd’hui 177e mondial. A moi désormais de faire les efforts pour revenir. Si ça se passe bien, je pense que je suis capable de retrouver le top 20, voire mieux.”