Nadal : “Je n’ai aucun doute sur la capacité d’Alcaraz à faire partie des meilleurs du monde”

Ils n’ont pas le même style de jeu. D’ailleurs, s’il faut vraiment comparer Carlos Alcaraz à un monument, pour Juan Carlos Ferrero, son entraîneur, le parallèle a des traits suisses. “C’est difficile de comparer qui que ce soit à Roger Federer, mais si je dois choisir un nom (pour faire la comparaison avec son protégé), je vais chercher quelqu’un de très agressif capable de faire beaucoup de choses sur le court, et Roger (Federer) est le meilleur pour ça,  a expliqué l’ancien numéro 1 mondial pour iNewsUK. Il peut évoluer sur toutes les surfaces, avec n’importe quel type de jeu.” Pourtant, pour beaucoup, Rafael Nadal a affronté son possible héritier ce mercredi.

En plus d’être Espagnols, les deux hommes partagent une précocité épatante. Fêtant, ses 18 ans ce 5 mai, Alcaraz est le deuxième plus jeune joueur de l’histoire à avoir gagné trois titres en Challenger (à 17 ans et 5 mois). Seul Richard Gasquet a fait mieux (16 ans et 10 mois). Vainqueur de son premier match sur le circuit principal à 16 ans, il fait partie des six adolescents à avoir réussi cet exploit avant leurs 17 printemps depuis le début du XXIe siècle. Ayant réalisé cette performance six fois à l’époque où il était encore fan du pantacourt, Nadal voit un avenir éclatant à l’horizon pour son compatriote.

Il va devenir un joueur incroyable dans un futur proche

“Il joue de façon très agressive, et il a beaucoup de potentiel, a analysé le Majorquin en conférence de presse après la rencontre. Il est encore très jeune et a déjà un haut niveau de tennis. Je crois vraiment qu’il va devenir un joueur fantastique dans un futur proche. Quand quelqu’un de son âge est capable de faire ce qu’il fait, c’est qu’il a quelque chose de spécial, non ?“

Comme l’a dit, entre autres, Daniil Medvedev, “quand vous affrontez un membre du Big 3 pour la première fois, c’est très difficile. Il faut déjà réussir à s’habituer à leur qualité de balle qui est, chacune dans son style, particulière, unique.” Pour son premier duel avec l’un deux, Alcaraz en a fait la douloureuse expérience. Écrabouillé 6-1, 6-2 en 1h15, l’élève a eu beaucoup de difficultés à contrôler le (sur)lift du maître. Mais peu importe, malgré la défaite, il n’a pas laissé le rêve d’affronter son idole le jour de ses 18 ans se transformer en cauchemar.

Ce match va me faire grandir – Carlos Alcaraz

“C’était incroyable de vivre mon anniversaire en jouant contre Rafa, a-t-il répondu devant les journalistes. J’apprends vraiment de lui, et je pense que ce match peut me faire grandir en tant que joueur. Ce match va beaucoup m’apprendre. Je dois savoir comment gérer les moments difficiles et affronter les grands joueurs. Si j’ai la chance de disputer plus de rencontres comme celle-ci, je grandirai plus vite. Je suis vraiment heureux de cette journée d’anniversaire. Après le match, Rafa m’a souhaité un bon anniversaire, en ajoutant que je devais continuer à travailler dur.”

Bourreau de travail, le Taureau de Manacor le sait : il faut sans cesse progresser. Pour concrétiser ses rêves – devenir numéro 1 mondial et gagner un titre du Grand Chelem –  son adversaire du jour a encore bien des progrès à faire. Seul l’entraînement sans relâche pourra permettre au diamant brut d’être assez bien taillé pour pouvoir espérer y parvenir.

“C’est un joueur complet, a observé Nadal. Il est courageux, capable de venir souvent au filet, super coup droit, super revers il se déplace à merveille… Bien sûr, il doit progresser dans tous les domaines, notamment au service. Mais il a seulement 18 ans depuis aujourd’hui (mercredi), il a encore tout le temps de s’améliorer. Quand vous faites une salade et que vous mettez les bons ingrédients dedans, elle est bonne. Lui, il a tous les ingrédients pour devenir un grand joueur.“

Il a suffisamment d’humilité pour y arriver – Rafael Nadal

Et le prodige semble avoir la cerise sur le gâteau. Celle qui permet de ne pas se reposer sur les couronnes de lauriers tressées par les louanges. Pour atteindre le très haut niveau, impossible de se laisser aller. Le fait de croire, inconsciemment ou non, que les exploits précoces tracent un chemin menant nécessairement vers l’Olympe est un danger pouvant diriger vers le ravin. Bien guidé, Alcaraz est visiblement sur la bonne voie.

“C’est un vrai passionné du tennis, a déclaré Nadal. Je pense vraiment qu’il va être capable de grimper très vite. Évidemment, rien ne sera facile. Devenir l’un des meilleurs du monde et se battre pour les titres les plus prestigieux est une tâche très compliquée. Mais Il a suffisamment d’humilité et c’est un bosseur, donc je n’ai aucun doute sur sa capacité à y arriver. Je crois réellement que c’est un des gars qui peut le faire.“

Fondu de tennis tâchant de suivre absolument tous les résultats, y compris en Futures et Challenger, Carlos Alcaraz en est sans doute conscient, précocité ne rime pas toujours avec sommets. Outre Nadal et lui-même, les quatre autres à avoir gagné leur premier match sur le circuit principal avant leurs 17 ans au XXIe siècle sont : Gasquet, Tomic, Harrison et Garín. Si, tous, à différentes échelles, sont d’excellents joueurs, certains n’ont jamais eu la destinée qu’on leur dessinait.

Seul le gaucher de Majorque, son icône, a été suffisamment grand pour décrocher les étoiles les plus scintillantes. Ryan Harrison n’a jamais dépassé le 40e rang de la hiérarchie planétaire – ce qui est déjà exceptionnel – et la carrière de Bernard Tomic a sombré dans les remous d’une vie tumultueuse. Bien entouré, tête sur les épaules, Carlos Alcaraz n’aura toutefois pas trop de mal à éviter toute comparaison avec l’Australien.