7 décembre 1987 : Le jour où Ivan Lendl a remporté le Masters pour la cinquième fois
Tennis Majors retourne en 1987 pour voir comment Ivan Lendl a établi un nouveau record en remportant un cinquième titre au Masters, record qui ne sera battu que 24 ans plus tard.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi c’est historique : La meilleure saison de la carrière d’Ivan Lendl
Ce jour-là, le 7 décembre 1987, Ivan Lendl conclut la meilleure saison de sa carrière en dominant Mats Wilander en finale du Masters (6-2, 6-2, 6-3). Le Tchèque, plein de confiance, avait déjà battu le Suédois en finale de Roland-Garros (7-5, 6-2, 3-6, 7-6) et de l’US Open (6-7, 6-0, 7-6, 6-4). Il s’agit de son cinquième titre au Masters, un record à l’époque, qui ne sera battu que 24 ans plus tard, en 2011, par Roger Federer.
Les acteurs : Ivan Lendl et Mats Wilander
- Ivan Lendl, un travailleur acharné
Né en 1960, Ivan Lendl a redéfini les standards du jeu de fond de court, avec un coup droit lifté très puissant qui lui permet d’être à la fois agressif et extrêmement régulier, poussant ses adversaires à un rude combat physique. Il redéfinit également les standards en termes de préparation, s’entraînant plus que quiconque auparavant, bien plus soucieux de sa condition physique et de son alimentation que n’avaient l’habitude de l’être les tennismen de l’époque.
Passé pro en 1978, il se pose dès 1980 comme l’un des quatre meilleurs joueurs au monde avec Bjorn Borg, John McEnroe et Jimmy Connors. Bien qu’il ait déjà remporté des dizaines de tournois ATP, dont le Masters 1981 en venant à bout de Vitas Gerulaitis (6-7, 2-6, 7-6, 6-2, 6-4), il ne parvient pas à décrocher un titre du Grand Chelem avant 1984. A vrai dire, il a échoué à quatre reprises en finale, une fois à Roland-Garros (en 1981, battu par Bjorn Borg), deux fois à l’US Open (battu par Jimmy Connors, en 1982 et 1983) et une en Australie (battu par Mats Wilander en 1983). En 1984, Lendl triomphe finalement à Roland-Garros, venant à bout de John McEnroe à l’issue d’une finale légendaire où il surmonte un handicap de deux sets (3-6, 2-6, 6-4, 7-5, 7-5). En 1985, il atteint la finale des Internationaux de France (battu une nouvelle fois par Wilander), mais à l’US Open, quelques semaines après être redevenu numéro 1 mondial, il décroche un deuxième titre du Grand Chelem aux dépens de John McEnroe (7-6, 6-3, 6-4). Au cours des années suivantes, Lendl assoit sa domination sur le tennis mondial, s’adjugeant quatre tournois du Grand Chelem : Roland-Garros et l’US Open, en 1986 et 1987. Il ne parvient pas à triompher à Wimbledon, bien qu’il y atteigne la finale à deux reprises, en 1986 (battu par le jeune tenant du titre, Boris Becker, 6-4, 6-3, 7-5), et en 1987 (dominé par Pat Cash, 7-6, 6-2, 7-5).
- Mats Wilander, un champion très précoce
Mats Wilander, né en 1964, a connu le succès à un très jeune âge. En 1982, à l’âge de dix-sept ans et neuf mois, il devient en effet le plus jeune vainqueur de Grand Chelem de l’histoire, en battant en finale Guillermo Vilas, véritable légende sur terre battue (1-6, 7-6, 6-0, 6-4). Il se rend également célèbre après avoir fait preuve d’un rare fair-play plus tôt dans le tournoi : en demi-finale, contre Jose-Luis Clerc, il inverse, sur balle de match, une annonce qui le propulsait en finale, et ce alors que l’arbitre a déjà annoncé « jeu, set et match ». En quarts de finale de la Coupe Davis 1982, il dispute également le match le plus long de l’ère open, vaincu en six heures et vingt-deux minutes par John McEnroe (9-7 6-2 15-17 3-6 8-6). Battu en finale de Roland-Garros 1983 par Yannick Noah (6-2, 7-5, 7-6), il remporte un deuxième titre du Grand Chelem quelques mois plus tard, en s’imposant face à Ivan Lendl sur le gazon australien (6-1, 6-4, 6-4) à la surprise générale, lui qui semblait être un expert de la terre battue. En 1984, il parvient à defender son titre à Melbourne (aux dépens de Kevin Curren, 6-7, 6-4, 7-6, 6-2), et en 1985, il ajoute un deuxième Roland-Garros à son palmarès (en battant en finale Lendl, 3-6, 6-4, 6-2, 6-2). Wilander mène également la Suède à son premier succès en Coupe Davis, en 1984, un exploit réédité en 1985. En 1987, le Suédois atteint la finale de Roland-Garros et de l’US Open, où il est battu à chaque fois par le numéro un mondial incontesté, Ivan Lendl.
Le lieu : Le bouillant Madison Square Garden, à New York
Créé en 1970, le Masters est le rendez-vous de fin d’année des huit meilleurs joueurs du monde. Au départ, il change de lieu chaque année, avant de s’installer au Madison Square Garden de New York, de 1977 à 1989. Etant donné que chaque année, seuls les huit meilleurs joueurs se qualifient pour le Masters, les plus grands joueurs de tennis figurent au palmarès de l’épreuve. Ivan Lendl est l’un des joueurs les plus capés du tournoi, avec déjà quatre titres au compteur.
L’histoire : Lendl ne fait qu’une bouchée de Wilander pour remporter son 5e Masters
En décembre 1987, Ivan Lendl est le numéro 1 mondial incontesté. Bien que son style de jeu et sa personnalité ne plaisent guère au grand public, le Tchèque s’est montré presque imbattable en remportant pas moins de 9 titres, dont Roland-Garros et l’US Open. Il a connu sa seule véritable déception, comme d’habitude, à Wimbledon, où il s’est incliné en finale face à Pat Cash, en trois petits sets.
Au Masters, à New York, Lendl ne perd qu’un seul set pour atteindre la finale, où il affronte le numéro 3 mondial, Mats Wilander, qu’il a déjà battu lors de deux finales de Grand Chelem cette année-là, et contre lequel il n’a pas perdu depuis Roland-Garros 1985.
Lendl met la pression sur Wilander dès le début, prenant son service d’entrée. Bien que le Suédois parvienne à débreaker quelques jeux plus tard, il n’est pas à la hauteur du défi proposé par Lendl ce jour-là – Peter Alfano, du New York Times, écrira que “Lendl a dominé Wilander (…), le submergeant telle une vague”. Le Suédois, totalement surclassé en fond de court, se précipite au filet dans une tentative désespérée de perturber le numéro un mondial – en vain. Une fois breaké au deuxième set, Wilander perd le peu de confiance qu’il lui restait et s’incline en trois sets (6-2, 6-2, 6-3).
“En 1987, j’ai perdu contre Ivan en finale de Roland-Garros, c’était assez serré”, dira Wilander à Alex Corretja dans une interview pour Eurosport en 2020. “J’ai perdu en finale de l’US Open, c’était également très serré. Il aurait fallu que je gagne au moins l’un de ces deux matches pour avoir l’impression d’avoir une chance. (…) A l’époque, je pense que j’étais n°2 mondial (il était n°3 mondial), et un spectateur, au milieu du troisième set, a crié quelque chose comme ‘hey allez Wilander, c’est quoi ton classement ? Deux… centième ? Et je me suis dit : “Mon Dieu, emmène-moi loin d’ici.”
“Je dois dire que 1987 a peut-être été ma meilleure année sur le circuit. Et ce match que nous avons joué au Madison Square Garden a peut-être été l’un des meilleurs matchs que j’ai joués. (…) Je suis entré dans la zone et j’avais l’impression que je ne pouvais rien rater ce jour-là.”
Avec 34 coups gagnants, Lendl remporte son 10e titre de l’année, le 70e de sa carrière et son cinquième au Masters, établissant un nouveau record, laissant Nastase et ses quatre titres derrière lui.
La postérité du moment : Deux titres du Grand Chelem supplémentaires pour Ivan Lendl
Lendl ne remportera plus jamais le Masters, même s’il disputera une neuvième finale consécutive – un autre record – en 1988 (battu en cinq sets par Boris Becker, 5-7, 7-6, 3-6, 6-2, 7-6). Lendl ajoutera deux autres titres du Grand Chelem à son palmarès (à l’Open d’Australie, en 1989 et 1990). Son record de cinq titres au tournoi des Maîtres ne sera égalé qu’en 2010, par Roger Federer, qui le dépassera ensuite avec un sixième succès en 2011.
1988 sera sans aucun doute l’année de l’apogée pour Wilander : après avoir remporté trois des quatre titres du Grand Chelem, il deviendra numéro un mondial le 12 septembre. Cependant, l’US Open 1988 restera le dernier titre majeur de Wilander. Une défaite inattendue contre Carl-Uwe Steeb en finale de la Coupe Davis apparaîtra plus tard comme le premier signe du déclin de Wilander. Il n’atteindra plus jamais la finale d’un Grand Chelem et, à la fin de l’année 1989, il sortira définitivement du top 10.