Le grand défi de Medvedev, l’homme qui s’adapte à tout

Largement dominé par Carlos Alcaraz l’an passé en finale d’Indian Wells, Daniil Medvedev tentera ce soir de prendre sa revanche. Et ainsi compléter son Grand Chelem de Masters 1 000 sur dur.

Daniil Medvedev Indian Wells 2024 volée coup droit © Zuma / Panoramic

On n’en finira décidément jamais de ne pas tout à fait saisir Daniil Medvedev, cette manie qu’il a d’être là où l’on ne l’attend pas ou plus (et inversement), ses scénarios de match parfois alambiqués et cette manière de jouer un peu biscornue qu’il module à l’envi par la grâce d’un QI tennistique bien au-dessus de la moyenne.

Evidemment, qu’il soit en finale d’Indian Wells, c’est pour le coup un non-événement. Le Russe s’est fait une spécialité des Masters 1 000 sur dur depuis le début de sa carrière et le BNP Paribas Open reste d’ailleurs le dernier d’entre eux qu’il n’a pas encore conquis, lui qui s’est imposé à Cincinnati et Shanghai en 2019, Paris en 2020, Toronto en 2021 et Miami 2023.

Mais Indian Wells, malgré tout, c’est son plus grand défi. Les conditions y sont plus difficiles qu’ailleurs pour lui, parce que plus lentes, trop à son goût. C’est là, l’an dernier, qu’il avait pesté contre la surface et lâché sa fameuse punchline : « I know what is an hard court, I’m a specialist. »

A contrario, il estime qu’elles sont parfaites pour Alcaraz : “Je trouve que le court est parfait pour lui”, a-t-il estimé en conférence de presse. “Il y a un rebond un peu plus lent qui lui donne du temps. Il n’est pas gêné par le vent et par le fait que la balle, je trouve, pénètre moins bien dans l’air ici. La balle d’Alcaraz, elle, ne semble pas perdre de vitesse. Donc c’est un grand avantage pour lui.”

Des stats fameliques au service

Daniil, de son côté, semble moins efficace au service que d’habitude et c’est peut-être d’autant plus vrai cette année qu’il avait révélé le mois dernier à Dubaï, après sa défaite en demi-finale contre Ugo Humbert, avoir traîné une petite blessure – sans s’étendre sur sa nature – qui l’avait empêché de travailler correctement son engagement. 

Quoi qu’il en soit, on a déjà vu sa première balle plus percutante. Contre Tommy Paul, dans une demi-finale de 2h30, il n’a passé que deux aces. Un seul pour son entrée en lice contre Carballes Baena. Un maximum de cinq contre Dimitrov en huitièmes. D’ailleurs, les statistiques montraient que le Russe était, des quatre demi-finalistes, le joueur le moins efficace au service. Ce qui n’est pas normal, pour un joueur comme lui.

Mais il compense, avec ses autres forces, pas toujours visibles. Daniil Medvedev est un joueur hybride, caméléon, incarnant cette nouvelle race de champions combinant une taille de géant, une grande puissance et malgré tout beaucoup de vélocité et de régularité à l’échange, autant de qualités qui paraissaient complètement antinomiques il y a ne serait-ce que dix ou quinze ans.

Des qualités avec lesquelles il est capable de jongler à merveille grâce à une science tactique et une force de caractère hors normes dont il aura bien besoin contre Alcaraz en finale. On peut faire confiance à son art du rebond. Surclassé par l’Espagnol l’an dernier en finale d’Indian Wells, donc, mais aussi en demi-finales de Wimbledon, il avait pris une revanche éclatante en demi-finales de l’US Open.

Et il avait failli refaire le coup à Jannik Sinner en début d’année en finale de l’Open d’Australie. Battu trois fois d’affilée par l’Italien fin 2023, le protégé des deux Gilles (Cervara et Simon) avait attaqué cette finale bille en tête, avec un plan de jeu plus offensif que jamais, pour le surclasser pendant deux sets. Il avait finalement décliné sur la fin, mais il reste quand même aujourd’hui de ce match le souvenir d’une maestria stratégique.

“J’attaquerai ce match contre Carlos avec le même état d’esprit que l’an dernier à l’US Open, et que contre Sinner en Australie : si je veux le battre, je dois y aller à fond, absolument tout donner, jouer à 11 et même à 20 sur une échelle de 10”, a-t-il averti. “Je vais voir, aussi, ce que je vais faire sur un plan tactique. Mais quoi qu’il en soit, je vais devoir sortir des coups incroyables et essayer de rentrer dans sa tête.”

C’est vrai que j’avais un peu peur de voir comment j’allais appréhender les tournois suivants.  mais Je crois que l’Australie, c’est définitivement derrière moi. »

Daniil Medvedev

Un défi à la démesure du joueur qui, contrairement à ce qui s’était passé en 2022 où il s’était incliné en finale de l’Open d’Australie après avoir mené deux sets à rien contre Rafael Nadal, semble avoir cette fois rapidement digéré la même mésaventure survenue deux ans plus tard contre Sinner.

“Je dirai qu’il m’a fallu une semaine pour m’en remettre, peut-être moins”, disait-il en début de semaine en Californie. “Le ressenti que j’avais à chaud n’a pas changé : j’ai fait un grand match et je n’ai pas eu l’impression de m’effondrer sous la pression. C’est lui qui a réussi à mieux jouer. C’est vrai que, d’une certaine manière, j’avais un peu peur de voir comment j’allais appréhender les tournois suivants.  A Dubaï, c’était compliqué parce que j’étais un peu blessé. Mais ici, je me sens bien, prêt à me battre et prêt à gagner. Je crois que l’Australie, c’est définitivement derrière moi.”

A 28 ans, voilà Daniil Medvedev aux portes, en tout cas, d’un défi XXL qui le remettrait pour de bon dans le sens de la marche.

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