L’annonce de Nadal a plongé la sienne dans l’ombre ? Gasquet n’a jamais aimé la lumière
En voyant l’annonce de sa future retraite être plongée dans l’ombre de celle de Rafael Nadal, Richard Gasquet, par sa nature profonde, a peut-être été heureux de n’être resté que peu de temps en pleine lumière.
Richard Gasquet est un astre de l’histoire du tennis français ; Rafael Nadal une des étoiles les plus brillantes du sport en général. Résultat, lorsque les deux hommes ont annoncé, le même jour, la date et le lieu de leurs futures retraites, l’Espagnol a éclipsé le Français dans l’actualité de l’Hexagone. Et encore davantage au niveau planétaire, ne lui laissant que quelques brèves à l’ombre des gros titres.
“La probabilité était faible (…), c’est une coïncidence assez incroyable”, a souri Gasquet, lors d’une interview publiée dimanche par le Midi Libre, dont le futur baisser de rideau avait été dévoilé au petit matin du jeudi 10 octobre, par un entretien dans L’Équipe, quelques heures avant que Nadal ne diffuse sa vidéo via les réseaux sociaux. “Ça m’a fait sourire, c’était marrant. Je ne m’y attendais pas du tout.”
depuis tout jeune, rien n’a été facile pour lui : Richard a dû faire face à des attentes folles.
Rafael Nadal
Comme si le destin, taquin, avait voulu faire un clin d’œil aux carrières des surnommés “Richie” et “Rafa” jusqu’à la fin. Eux qui, talents précoces comparés dès l’époque ou le gaucher était affublé d’une coupe au bol, ont tissé des liens indéfectibles. Au point que le Marjorquin avait été un des rares à soutenir publiquement le natif de Béziers lorsqu’il avait été contrôlé positif à la cocaïne en 2009, avant d’être blanchi.
Des déclarations que Gasquet n’a jamais oubliées. Bien des années plus tard, il a proposé à Nadal d’écrire la préface de son autobiographie, À revers et contre tout, parue en 2023. “Alors, oui, il (Richard Gasquet) aurait peut-être pu gagner encore davantage qu’il ne l’a fait”, s’est exprimé l’empereur de Roland-Garros dans celle-ci. “Mais, depuis tout jeune, rien n’a été facile pour lui : Richard a dû faire face à des attentes folles.”
Gasquet, enfance sous les projecteurs
“J’imagine assez bien à quel point il a doit être difficile pour un enfant de faire face à l’engouement de toute une nation”, a-t-il ajouté. “Ce qu’il produisait ne semblait jamais au niveau de ce que les supporters espéraient. Pour être capable de s’en sortir, il a dû faire preuve d’une grande force mentale : maintenir un niveau si solide pendant des années est un défi que peu de joueurs réussissent à relever. Richard peut-être fier de sa longue et incroyable carrière.”
Resté au sein du top 100 ATP pendant 956 semaines consécutives – seuls Roger Federer, Rafael Nadal et Novak Djokovic ont fait mieux –, l’homme au revers à une main béni des dieux du tennis a été mis sur le devant de la scène bien avant d’atteindre l’élite. À 9 ans, il a été propulsé en couverture de Tennis Magazine alors que sa famille et lui-même pensaient seulement avoir fait l’objet d’un reportage voué à rester confiné aux pages intérieures.
La “honte” ressentie en se voyant en une de Tennis Magazine à 9 ans
Un épisode mal vécu par le gamin de Sérignan. Jusqu’à éprouver, comme il l’a lui-même confié, un sentiment de “honte” en se découvrant en Une le jour de la sortie. Parce qu’il n’a jamais été attiré par la lumière. Quand les projecteurs se braquaient sur lui, il cherchait à s’en détourner. Voire même à les fuir.
“Je faisais le spectacle depuis mes 7 ans“, a rappelé Gasquet, 38 balais désormais, dans son livre rédigé grâce à la plume de Franck Ramella, journaliste à L’Équipe. “Chaque fois que je jouais dans un club pour un tournoi, on pouvait compter 200 personnes autour du court. Je n’aimais pas ces yeux braqués sur moi.” Et les années ne sont pas parvenues à gommer ce trait de caractère, tracé au marqueur indélébile dans son ADN.
j’allais systématiquement aux toilettes à ce moment-là. Je me cachais ! Et j’attendais que la classe soit loin pour reprendre l’entraînement.
Richard Gasquet
“Au collège, j’avais été exempté d’EPS pour pouvoir me consacrer au tennis”, a-t-il aussi confié. “Quand ma classe partait faire cette heure de sport, elle passait par un chemin qui surplombait le court. Je les voyais tous arriver, et vous ne pouvez pas imaginer à quel point ça me dérangeait. Je n’avais pas envie de les voir, pas envie qu’ils me voient. Alors j’allais systématiquement aux toilettes à ce moment-là. Je me cachais ! Et j’attendais que la classe soit loin pour reprendre l’entraînement.“
En apprenant l’annonce de la retraite du Transpyrénéen, l’enfant intérieur du Tricolore a sans doute ressenti du soulagement. Grâce à Rafael Nadal, cette lumière presque perçue comme la visée laser d’un sniper n’est restée braquée sur lui que peu de temps. Si certains s’épanouissent dans la célébrité, l’ancien 7e joueur mondial, lui, n’a jamais voulu l’attirer. Elle est venue le chercher, en adversaire impossible à combattre. Un des rares que Richard Gasquet n’a jamais pu prendre à revers.