D’un Rolex Paris Masters à l’autre : comment Humbert frappe à la porte du top 10 sans y entrer

18e mondial avant d’entrer en lice face à Brandon Nakashima à Bercy, le Tricolore se rapproche des dix meilleurs joueurs du monde mais veut arrêter d’en faire une obsession.

Ugo Humbert - Rolex Paris Masters 2023 Ugo Humbert – Rolex Paris Masters 2023 © Chryslene Caillaud / Panoramic

En 2023, Ugo Humbert avait cédé après un combat dantesque de 3h29 face à Alexander Zverev au deuxième tour du Rolex Paris Masters. Le Tricolore avait adoré l’ambiance, livré un match de haut niveau et même fait un malaise dans les vestiaires après la partie, preuve de l’intensité exceptionnelle de cette rencontre. À l’époque, l’Allemand était catégorique en conférence de presse : “Pas de raison qu’Ugo ne puisse pas être top 10”.

Un an plus tard, avant de se lancer dans la dernière édition du tournoi parisien à Bercy, Humbert n’est toujours pas dans le top 10. Mais il s’en est rapproché cette année, ce qui fut à la fois une grande réussite et un surcroît de pression qu’il cherche aujourd’hui à mieux contrôler. Aujourd’hui, il est 18e joueur mondial, il a été 13e au mois d’avril, six mois après ce fameux match contre Zverev où il était 26e.

Humbert parle toujours du top 10 comme “quelque chose qui lui tient à cœur”. Le futur adversaire de Brandon Nakashima, 38e (qu’il a déjà battu deux fois cette année) sait que moins il y pense, plus il aura de chance de s’en rapprocher, comme il l’a savouré lui-même en début de saison. “Il faut qu’il apprenne à gérer ça. Après une période plus difficile, nous sommes revenus aux bases pour se concentrer sur le jeu, ce qu’il avait à faire et pas sur le classement”, explique Jérémy Chardy, son coach.

Le niveau face aux joueurs du top 10, il l’a

Pour s’offrir le sixième titre de sa carrière à Dubaï en février, Humbert avait écarté deux membres du top 10, Hubert Hurkacz, 9e, puis Daniil Medvedev, 4e. Quelques semaines plus tôt, il avait déjà éliminé le Polonais à Marseille sur la route de son cinquième trophée. Le Messin n’a jamais eu de mal à déranger les joueurs issus du top 10 : depuis le début de sa carrière, il a remporté 12 matchs face au gratin du tennis mondial pour 16 défaites.

En 2024, son ratio est proche de l’équilibre : trois victoires pour cinq défaites. Quand il perd, Humbert n’est pas surclassé. Si l’on enlève son récent revers en Coupe Davis face à Carlos Alcaraz (6-3, 6-3 en phase de poules à Malaga), le joueur de 26 ans ne cesse d’accrocher les meilleurs. ll a d’ailleurs particulièrement embêté l’Espagnol à Wimbledon, une défaite en quatre sets avec les honneurs en huitièmes de finale.

Ugo Humbert et Carlos Alcaraz - Wimbledon 2024
Ugo Humbert et Carlos Alcaraz – Wimbledon 2024 © Antoine Couvercelle / Panoramic

“À un moment, je voyais la balle, mais c’était un ballon de foot ! J’avais l’impression que je ne pouvais plus rater une balle”, se souvient Humbert. Alcaraz, futur lauréat, avait également reconnu qu’il s’était retrouvé “sans solution” sur certaines séquences.

Son match l’an passé face à Alexander Zverev à Bercy, aussi douloureux soit-t-il, avait également provoqué un déclic chez le Tricolore : “Cela lui a donné beaucoup de confiance, c’est un joueur qu’il respectait beaucoup, se rappelle Jérémy Chardy. Il s’est rendu compte que, sans surjouer, il pouvait faire le combat avec lui physiquement et tennistiquement. C’était un peu une première pour lui”.

Progresser dans les tournois prestigieux, la clé pour Humbert

Si Humbert cherche son plus grand axe de progression, il peut aisément le trouver dans sa faculté à briller dans les plus grands tournois. En Grand Chelem ou en Masters 1000, le gaucher peine à reproduire ses performances dans les compétitions “inférieures”. En 2024, son huitième de finale à Wimbledon est sa seule éclaircie en Majeur : à l’Open d’Australie, il a échoué au troisième tour, à Roland-Garros dès son entrée en lice et à l’US Open, au second tour face à Francisco Comesana, 108e mondial.

C’est à peine mieux en Masters 1000. Humbert n’a connu qu’un quart de finale cette année, du côté de Monte-Carlo face à Casper Ruud. Sinon, il a buté quatre fois au troisième tour (Indian Wells, Miami, Madrid, Shanghai), une fois au deuxième tour (Montréal) et une fois d’entrée (Cincinnati). Des performances indignes d’un aspirant au top 10.

2024 n’est pas une exception. Depuis le début de sa carrière, Humbert compte deux huitièmes de finale en Grand Chelem (sur 24 Majeurs joués) et trois quarts de finale en Masters 1000 (sur 33 disputés).

Paradoxalement, moins penser au top 10 pour y entrer

Dans une récente interview accordée à Tennis Majors, Ugo Humbert avait reconnu une certaine forme d’épuisement à regarder son évolution au classement, surtout quand il était top 10 à la Race (classement sur la saison 2024) et donc avec la perspective de jouer le Masters à Turin (10-17 novembre).

“Maintenant je ne regarde plus du tout, je ne sais même plus combien je suis exactement. Mais au début de la saison, comme j’ai commencé à bien jouer, j’étais dans les dix à la Race, j’étais comme un dingue, je regardais régulièrement. Mais au bout d’un moment, il faut en sortir parce que tu t’épuises, et mentalement tu te déçois aussi parce que tu ne vas pas gagner chaque semaine.”

Ugo Humbert, Dubaï 2024 (© Kamran Jebreili/AP/SIPA)
Ugo Humbert, Dubaï 2024 (© Kamran Jebreili/AP/SIPA)

Le Messin en a remis une couche en conférence de presse : “À force de trop penser à ça, c’est vrai que j’ai perdu pas mal d’énergie aussi dans la tête. Ça ne m’a pas fait du bien. Donc le meilleur moyen c’est de ne pas y penser.”

Cette obsession l’a particulièrement handicapé lors de l’enchaînement Indian Wells-Miami en mars (élimination au troisième tour les deux fois) : “Il était aux portes du top 10 et se disait qu’il fallait forcément performer dans les gros tournois pour y arriver. Il s’est mis un peu de pression et n’a pas bien géré cette période”, analyse Jérémy Chardy, qui retient cependant : “Avant, il voulait être top 10. Là, il avait pris conscience qu’il pouvait y être. C’est une étape très importante quand tu es joueur.”

Quand Tu te dis que tu te sens bien, limite tu te sens invincible, mais en fait pas du tout.

Ugo Humbert

Ugo Humbert a joué 55 matchs en 2024 (33 victoires, 22 défaites) et se retrouve en 19e position des joueurs qui ont le plus disputé de rencontres sur le circuit ATP cette année. Avant de se plonger dans l’avant dernier tournoi de saison (avant Metz, chez lui, où il est tenant du titre), le récent finaliste à Tokyo (contre Fils) reconnaît qu’il doit probablement alléger son calendrier l’an prochain.

“Je me suis un peu cramé à vouloir trop enchaîner les tournois, surtout quand il y a des semaines où j’ai bien joué, j’ai voulu tout de suite enchaîner, a t-il constaté devant les journalistes. Tu te dis que tu te sens bien, limite tu te sens invincible à un moment, mais en fait pas du tout. Au bout d’un moment, tu arrives sur une semaine et tu te rends compte que tu es cramé parce que quand tu vas au bout des tournois, cela demande quand même beaucoup d’énergie mentale”.

Ugo Humbert - Wimbledon 2024
Ugo Humbert – Wimbledon 2024 © Chryslene Caillaud / Panoramic

Toujours à notre micro, en marge de l’UTS à Francfort, Humbert avait eu plus ou moins les mêmes mots à ce sujet : “Je veux pouvoir donner le meilleur de moi-même à chaque match […]”.

Sa nouvelle quête de hauteur au Rolex Paris Masters, pour sa dernière édition à l’Accor Arena, commencera donc par une entrée en lice délicate face à Brandon Nakashima avant un potentiel troisième tour face à Carlos Alcaraz. Pour se rapprocher de son meilleur classement (13e). Sans trop y penser donc…

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