Djokovic loin de sa meilleure forme : inquiétant… pour lui ou pour les autres ?
Touché physiquement en début de saison, patraque juste avant l’Open d’Australie, Novak Djokovic s’est néanmoins qualifié pour le troisième tour ce mercredi en étant très loin de son meilleur niveau. Bon ou mauvais signe ? Ça se discute.
“La rate qui s’dilate, le foie qu’est pas droit…” On connaît la chanson. Un Open d’Australie sans les tribulations physiques de Novak Djokovic, ce ne serait pas un véritable Open d’Australie. En 2021, il avait triomphé, selon ses dires (parfois contestés), avec une déchirure abdominale de 2,5 cm. L’an passé, c’était avec une déchirure de 3 cm aux ischio-jambiers. Bref, blessé ou pas, malade ou pas, cela ne l’empêche généralement pas d’aller au bout dans un tournoi qu’il a remporté à 10 reprises. La plupart du temps, ça ne fait au contraire que le rendre plus dangereux.
On ne sait à quel point la chose devient psychosomatique – on n’ose dire tactique -, mais fidèle à sa routine australienne, le Serbe est donc arrivé cette année avec son lot de problèmes. Tout a commencé début janvier avec une douleur au poignet qui lui a coûté une inhabituelle défaite face à Alex de Minaur pour son premier événement de la saison, la United Cup, à Perth. Et alors que tout semblait s’arranger de ce côté à l’approche du Grand Chelem australien, patatras : un petit coup de froid – oui, c’est possible à Melbourne – lui a compliqué encore un peu plus la vie avant son entrée en lice face à Dino Prizmic.
Résultat des courses : le numéro 1 mondial sera certes bel et bien fidèle au rendez-vous du troisième tour, mais après avoir affiché jusque-là un niveau de jeu très loin de ses standards habituels, que ce soit dimanche dernier face au jeune Croate ou ce mercredi contre Alexei Popyrin, lesquels ont tous deux réussi à lui arracher un set. Et ça aurait même pu être bien pire contre l’Australien, qui a obtenu quatre balles de deux sets à un.
“Je ne me suis pas senti au mieux au cours de la semaine écoulée, et c’est un peu frustrant de voir le niveau de tennis que je joue pour l’instant ici, avec des fautes inhabituelles”, a-t-il concédé en conférence de presse ce mercredi. “A côté de ça, j’ai affronté deux joueurs de qualité, qui ont cru en leur chance et ont joué juste tactiquement. Mais de mon côté, je me sentais un peu plat, émotionnellement et tennistiquement, pendant la majeure partie du match.”
Comme souvent, le Serbe est allé chercher dans le public la décharge d’adrénaline qui lui manquait, en s’embrouillant avec un spectateur un peu trop vindicatif à son goût au début du quatrième set. D’aucuns pourraient se demander ce qui, à 36 ans, le pousse encore à donner de l’importance à ce genre d’énergumènes. En l’occurrence, c’était surtout pour lui un moyen “de me secouer un peu et de trouver sur le court l’intensité que j’aurais dû avoir pendant tout le match.” Bien joué, une fois de plus.
Novak Djokovic qui gagne à la fin en étant à peu près à 50% de ses moyens, on a l’impression d’avoir vu le film mille fois. Sauf que pas tout à fait, quand même. Si l’on excepte ses deux premières participations à l’Open d’Australie (en 2005 et 2006), soldées par deux défaites au premier tour, jamais, en effet, il n’y avait lâché plus d’un set au total de ses deux premiers matches. De là à dire qu’il effectue là le plus mauvais début de tournoi – et par extension le plus mauvais début de saison – de sa carrière, il y a un pas. Mais bon…
On a beau connaître l’animal, on ne peut pas ne pas s’en inquiéter au moins un peu pour lui, surtout quand on voit se profiler un troisième tour face à un Tomas Martin Etcheverry qui semble dans une forme étincelante sur cet Open d’Australie, avant des éventuelles retrouvailles musclées en huitièmes face à un Ben Shelton dont la dangerosité n’est plus à prouver. Pas besoin de dire à “Nole” la nécessité qu’il aura de hausser son niveau de jeu. Il en est parfaitement conscient.
Je suis satisfait d’avoir gagné, mais pas vraiment de mon tennis.
Novak Djokovic
“Je suis satisfait d’avoir gagné mes deux premiers matches ici, mais pas vraiment de mon tennis”, a-t-il poursuivi. “Maintenant, je n’ai qu’à l’accepter et construire à partir de là. Et j’espère qu’à mesure que le tournoi avancera, les choses iront dans le bon sens pour moi, en termes de sensations et de niveau de jeu.”
C’est le plan et, en théorie, c’est en effet la manière dont les choses sont supposées se passer. Djokovic a créé un tel monstre qu’on ne trouve aujourd’hui pas grand monde pour penser qu’il ne va pas passer à la vitesse supérieure au fil des jours. Beaucoup, au contraire, estiment que son début de tournoi en mode « pianissimo » n’est qu’une raison de plus de s’inquiéter… pour ses adversaires. Et que sa montée en puissance est inéluctable.
Reste une certitude : Novak Djokovic ne gagnera pas l’Open d’Australie avec le niveau de tennis pratiqué jusque-là. Et une question : est-il capable, à son grand âge et avec les quelques contre-temps survenus durant sa préparation, d’atteindre sa plénitude d’ici la fin du tournoi ? C’est tout l’enjeu des dix jours qui arrivent…