2 mai 2007 : Le jour où Federer et Nadal ont joué La Bataille des Surfaces
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Le 2 mai, c’est le jour où Roger Federer et Rafael Nadal se sont affrontés sur un court mi-gazon, mi-terre battue. Un affrontement inédit remporté par le joueur espagnol.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi cela a marqué l’histoire du tennis : un court coupé en deux
Le 2 mai 2007, Roger Federer et Rafael Nadal, les deux meilleurs joueurs du monde, jouent un match d’exhibition très particulier à Majorque, surnommé « La Bataille des Surfaces ». Le court sur lequel ils s’affrontent est hybride : un côté du filet est en terre battue tandis que l’autre moitié est en gazon, en référence à leur rivalité dans laquelle l’Espagnol prend le dessus sur terre alors que le Suisse domine sur herbe. Nadal s’impose finalement 7-5, 4-6, 7-6 (12-10).
Les personnages : Roger Federer et Rafael Nadal
- Roger Federer, le n°1 mondial
Roger Federer, âgé de 25 ans, est numéro 1 mondial sans interruption depuis le 2 février 2004. Depuis juillet 2003, il a remporté dix tournois du Grand Chelem : l’Open d’Australie (2004, 2006, 2007), Wimbledon (2003, 2004, 2005, 2006) et l’US Open (2004, 2005, 2006). Il sort d’une saison 2006, la meilleure de sa carrière, avec douze tournois gagnés dont trois Grands Chelems, le Masters et quatre Masters Series. Une saison marquée par 92 victoires pour seulement 5 défaites, dont quatre contre son seul vrai rival du moment, Rafael Nadal, et trois sur terre battue (Monte-Carlo, Rome, Roland-Garros).
L’Espagnol est la raison principale pour laquelle Federer n’a pas encore triomphé à Roland-Garros : il s’est incliné contre lui en demi-finale en 2005 (6-3, 4-6, 6-4, 6-3), puis en finale en 2006 (1-6, 6-1, 6-4, 7-6). Il a commencé l’année 2007 en s’imposant à l’Open d’Australie sans perdre un set, en disposant en finale de Fernando Gonzales (7-6, 6-4, 6-4). Il a ensuite connu une étrange tournée Indian Wells-Miami, s’inclinant deux fois contre le même joueur, l’Argentin Guillermo Canas, de retour sur le circuit après avoir été suspendu pour dopage. Invaincu sur gazon ces cinq dernières années, Roger Federer est sur une série de quarante-huit victoires consécutives sur cette surface.
- Rafael Nadal, le rival et le maître de la terre battue
Le Majorquin de 21 ans est numéro 2 mondial depuis juillet 2005, peu de temps après son premier sacre à Roland-Garros, à l’âge de dix-neuf ans. A ce jour, Rafael Nadal n’a pas perdu sur terre battue depuis le 8 avril 2005 et un quart de finale du tournoi de Valence où le Russe Igor Andreev l’avait vaincu 7-5, 6-2. Il en est à soixante-douze victoires consécutives, série en cours, ce qui lui a permis de glaner douze titres sur cette surface, dont deux à Roland-Garros (2005, 2006).
Nadal est devenu le cauchemar de Federer, en le stoppant deux fois Porte d’Auteuil (2005, 2006) et en s’imposant face à lui quatre fois lors d’une saison 2006 où seuls deux joueurs sont venus à bout du Suisse – le deuxième étant Andy Murray. Nadal est intraitable sur terre, mais il progresse aussi sur les autres surfaces. En 2005, il a remporté les Masters Series de Toronto et Madrid sur dur, mais il commence aussi à performer là où personne ne l’attendait en raison de son style de jeu : sur gazon. Ainsi, il a atteint la finale de Wimbledon en 2006, où Roger Federer a pu prendre sa revanche de la finale de Roland-Garros (6-0, 7-6, 6-7, 6-3). En 2007, il est arrivé jusqu’en quarts de finale à l’Open d’Australie, battu par Fernando Gonzales (6-2, 6-4, 6-3), avant de s’imposer à Indian Wells, Monte-Carlo et Barcelone.
Le lieu : éphémère Palma Arena
La Bataille des Surfaces est programmée le 2 mai 2007 à Palma de Majorque, la capitale de l’île d’origine de Nadal. Le court mi-gazon, mi-terre battue, a été construit exprès pour l’occasion à la Palma Arena en dix-neuf jours, pour un coût d’environ 1,6 million de dollars. Il ne servira qu’une seule fois.
L’histoire : Nadal plus fort que Federer
Ce match d’exhibition entre Federer et Nadal a pour but de déterminer qui s’imposera sur une surface mixte censée équilibrer le jeu : Roger le magicien du gazon (48 victoires d’affilées) ou Rafa le maître de la terre battue (72 matches sans défaites) ?
Cité par Eurosport.com, le natif de Bâle déclare avant l’événement :
« Ça va être marrant de voir comment c’est de jouer sur un court qui mélange les deux surfaces. Et ça sera intéressant de voir qui choisit la meilleure stratégie. Le résultat n’est ce qui compte le plus, ce qui compte c’est de prendre du plaisir. »
Les tribunes sont pleines à craquer (6800 spectateurs) et, selon les promoteurs, près de deux cent millions de personnes sont devant leur écran de télévision lorsque Roger Federer et Rafael Nadal font leur entrée sur la Palma Arena. L’idée de voir le meilleur joueur du monde sur gazon affronter le meilleur spécialiste de la terre battue sur ce court hybride jamais vu auparavant suscite beaucoup d’enthousiasme. Pourtant l’événement a failli être annulé la nuit précédente, selon la BBC, quand les organisateurs ont du changer la surface côté gazon après que le revêtement original a été abimé par des vers de terre.
Les changements de côté ont été allongés à deux minutes, au lieu des 90 secondes réglementaires, afin que les joueurs puissent changer de chaussures et jouer avec des semelles adaptées à chacune des deux surfaces.
L’improbable court hybride égalise-t-il vraiment les chances ? Il donne clairement l’avantage au joueur qui se trouve côté terre car celui-ci a manifestement plus de temps pour s’ajuster, particulièrement au retour de service, grâce aux rebonds plus hauts. Il est difficile de défendre côté gazon.
Toujours est-il que c’est Rafael Nadal qui s’impose devant son public, après une rude bataille de deux heures trente, 7-5, 4-6, 7-6.
La postérité de ce moment : sans précédent, sans suite
Le spectacle est grandement apprécié du public, bien que les champions jouent clairement de façon plus détendue qu’en compétition officielle. Rafael Nadal, cité par la BBC, le confirmera lui-même :
« Ce fut une expérience sympa, même si avant le match je craignais que ça soit un désastre, parce que je pressentais que j’aurais beaucoup de mal à m’adapter au terrain. J’ai passé un bon moment et c’est ça qui compte. On voudrait tous les deux reproduire l’expérience, parce que même si ce n’était pas un vrai match, ça nous a permis de jouer des points sans trop de pression et de jouer plus relax. »
Federer déclarera quant à lui :
« J’ai trouvé que le court était excellent, surtout la terre battue. Le challenge était difficile, parce que vous avez pas mal de choses en tête ».
Bien que les deux joueurs aient apprécié l’expérience et aient semblé partants pour une nouvelle édition, la Bataille des Surfaces restera unique en son genre, le seul match à s’être joué sur deux surfaces en même temps.
Quelques semaines après cette exhibition, en finale du tournoi de Hambourg, Roger Federer mettra un terme à la série de 81 victoires consécutives sur terre battue de Nadal, en le battant pour la première fois sur ocre (2-6, 6-2, 6/0). Nadal restera néanmoins le meilleur à Roland-Garros, où il s’imposera à nouveau en finale face au Suisse, 6-3, 4-6, 6-4, 6-3. Lors de la finale de Wimbledon 2007, le gaucher emmènera Roger jusqu’au cinquième set, mais le Suisse prendra finalement le dessus (7-6, 4-6, 7-6, 2-6, 6-2).
Rafael remportera finalement Wimbledon pour la première fois en 2008, en gagnant un combat titanesque contre son rival, 6-4, 6-4, 6-7, 6-7, 9-7, souvent considéré comme le plus grand match de l’histoire du tennis. Il soulèvera un deuxième trophée au All England Club en 2010.
Roger Federer s’imposera une seule fois aux Internationaux de France, sans jamais y venir à bout du taureau de Manacor. En 2009, il battra en finale Robin Soderling, le premier homme à avoir vaincu Rafael Nadal à Roland-Garros (6-1, 7-6, 6-4).
Les deux hommes s’affronteront au total à quarante reprises, l’Espagnol menant 24-16. Sur terre battue, Nadal dominera 14 à 2, tandis que Federer mènera 3-1 sur gazon. Leur rivalité, considérée comme la plus grande et la plus iconique de l’histoire du tennis, deviendra l’image même de notre sport.