18 novembre 1990 : le jour où, au Masters de Francfort, Andre Agassi a remporté son premier titre majeur
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Aujourd’hui, nous retournons en 1990 pour assister au premier triomphe d’Andre Agassi dans un tournoi majeur, en dominant le numéro un mondial Stefan Edberg en finale du premier Masters organisé en Europe depuis 15 ans.
Ce qu’il s’est passé ce jour-là et pourquoi cela a marqué l’histoire du tennis : Agassi passe chez les maîtres
Ce jour-là, le 18 novembre 1990, en finale du Masters, Andre Agassi remporte un spectaculaire match en quatre sets pour battre Stefan Edberg, numéro un mondial à l’époque (5-7, 7-6, 7-5, 6-2). Pour le Kid de Las Vegas, c’est une belle façon de terminer une saison au cours de laquelle il s’est incliné deux fois en finale de Grand Chelem, à Roland-Garros et à l’US Open. Le tournoi des Maîtres se déroule pour la toute première fois à Francfort, après treize années passées au Madison Square Garden de New York.
Les personnages : Andre Agassi et Stefan Edberg
- Andre Agassi, « le Kid de Las Vegas »
Andre Agassi est l’une des plus grandes stars de l’histoire du tennis. Passé pro en 1986, il devient rapidement célèbre, grâce à son talent mais aussi à ses tenues vestimentaires originales, dont l’emblématique short en jean et le cycliste rose. Initié au tennis par son père puis élevé à l’académie de Nick Bollettieri, il dispose d’un excellent retour de service (le meilleur de son temps), et son jeu consiste à frapper la balle montante avec une force incroyable, ce qui est révolutionnaire à l’époque et inspirera des générations entières de tennismen.
En 1990, à 20 ans, Andre Agassi a déjà remporté onze titres ATP et atteint trois fois les demi-finales d’un Grand Chelem, à Roland-Garros en 1988 (battu Mats Wilander, 4-6, 6-2, 7-5, 5-7, 6-0) et à l’US Open en 1988 et 1989 (battu à chaque fois par Ivan Lendl). En 1990, il atteint la finale de Roland-Garros, où, bien que grand favori, il est battu par Andres Gomez (6-3, 2-6, 6-4, 6-4). Il ne lui manque plus que de remporter un titre majeur pour changer définitivement de stature, ce que la plupart des experts pensent qu’il va enfin réaliser quelques mois plus tard, lorsqu’il affronte son compatriote Pete Sampras en finale de l’US Open – mais son jeune adversaire a livré une performance de premier choix pour le priver d’un premier trophée du Grand Chelem (6-4, 6-3, 6-2).
- Stefan Edberg, le numéro 1 mondial
Stefan Edberg est né en 1966. Déjà très fort chez les juniors où il a réalisé le Grand Chelem en 1983, il a pourtant failli arrêter le tennis la même année, à 17 ans, après que l’un de ses services a accidentellement tué un juge de ligne à New-York. Il n’a probablement jamais regretté d’avoir continué. Dès 1985, quelques mois après la révélation de Boris Becker à Wimbledon, Stefan Edberg s’adjuge son premier Grand Chelem, lui aussi sur gazon, à l’Open d’Australie, venant à bout de son compatriote Mats Wilander en finale (6-4 6-3 6-3). Le tournoi, dont les dates s’apprêtent à changer, n’a pas lieu en 1986 et Edberg parvient à conserver son titre en 1987 aux dépens du favori local Pat Cash (6-3 6-4 3-6 5-7 6-3). En 1988, il remporte Wimbledon en battant Boris Becker (4-6 7-6 6-4 6-2) à l’issue d’une finale qui marquera le début de l’une des rivalités les plus populaires du tennis.
En 1989, Stefan Edberg perd confiance après avoir perdu deux finales majeures à la suite : la première à Roland-Garros, où il est battu par Michael Chang (6-1 3-6 4-6 6-34 6-2) à l’issue d’un crève-cœur où il manque 10 balles de break au quatrième set, et la deuxième à Wimbledon, où son rival Boris Becker prend une revanche brutale sur la finale de l’an passé (6-0 7-6 6-4). Le Suédois perd cinq autres finales importantes au cours de la saison, mais finalement, il parvient à battre Becker en finale du Masters (4-6 7-6 6-3 6-1).
Il démarre 1990 en se qualifiant pour la finale de l’Open d’Australie face à Ivan Lendl, mais, blessé aux abdominaux, il y est contraint à l’abandon au deuxième set. Après une nouvelle déception à Paris, où il s’incline d’entrée, Stefan Edberg renoue avec la victoire à Wimbledon, dominant Becker en cinq sets lors de leur troisième finale consécutive au All England Club (6-2 6-2 3-6 3-6 6-4). Il devient numéro 1 mondial pour la première fois le 13 août et, malgré une défaite inattendue au premier tour de l’US Open face à Alexander Volkov (6-3, 7-6, 6-2), il est toujours au sommet du classement au mois de novembre.
Le lieu : Francfort (Allemagne)
Créé en 1970, le Masters est le rendez-vous de fin d’année des huit meilleurs joueurs du monde. Au départ, il change de lieu chaque année, avant de s’installer au Madison Square Garden de New York, de 1977 à 1989. En 1990, le tournoi déménage à Francort, où il se dipsute à la Festhalle, qui peut accueillir 13 500 spectateurs. Etant donné que chaque année, seuls les huit meilleurs joueurs se qualifient pour le Masters, les plus grands joueurs de tennis figurent au palmarès de l’épreuve.
L’histoire : Agassi remporte son premier grand titre
En 1990, le Masters de fin d’année quitte le Madison Square Garden, où il se tenait depuis 1977, pour se dérouler en Allemagne, à la Festhalle de Francfort. Cette même année, les différents circuits professionnels ont finalement tous fusionné en un seul circuit international connu sous le nom d’ATP Tour – en conséquence, le Masters s’appelle désormais officiellement « ATP Tour World Championship ».
L’idée d’un tournoi de fin d’année regroupant les meilleurs joueurs du monde, est née en 1969, en même temps que le premier circuit professionnel annuel – le Grand Prix, créé par Jack Kramer, un ancien joueur professionnel qui a ensuite joué un rôle majeur dans la création de l’ATP. Sa première édition, connue au départ sous le nom de « Masters Grand Prix », se tient en décembre 1970, à Tokyo. Les six meilleurs joueurs du circuit Grand Prix s’affrontent sous forme de poule, et c’est Stan Smith qui remporte le tournoi. Sept joueurs participent à la deuxième édition à Paris, et en 1972, le tournoi se déroule pour la première fois dans le format que nous connaissons tous : huit joueurs répartis en deux poules, s’affrontant pour tenter de se qualifier pour les demi-finales. Cependant, dans les années 1980, deux formats différents seront essayés : en 1982-1984, 12 joueurs joueronty un tournoi à élimination directe, et en 1985, ce format sera étendu à 16 joueurs.
Au cours de ses premières années, le prestigieux événement déménage chaque année – Tokyo, Paris, Barcelone, Boston, Melbourne, Stockholm, Houston – jusqu’à ce que, en 1977, il s’installe à New York, pour treize ans. Là, au Madison Square Garden, « l’enceinte sportive la plus célèbre au monde », le Masters devient plus qu’un simple tournoi de tennis : un véritable spectacle. Lors de la première édition, les billets sont vendus longtemps à l’avance et plus de 18 500 spectateurs se pressent dans les tribunes. Le directeur du tournoi, Ray Benton, a déplacé l’événement en janvier, pour éviter la concurrence avec le football américain, et, avant le Super Bowl, le Masters de tennis est le principal événement sportif aux États-Unis cette semaine-là.
Cependant, toutes les bonnes choses ont une fin, et le Masters de 1989, remporté par Stefan Edberg, est le dernier à se jouer à New York. En 1990, les différents circuits s’unissent enfin pour devenir l’ATP Tour, et le Masters, rebaptisé IBM ATP World Tour Championship, est de retour en Europe pour la première fois depuis 1975.
À l’occasion de cette première édition allemande de l’ATP World Tour Championship, c’est Andre Agassi, l’étoile montante américaine, qui remporte le premier titre majeur de sa jeune carrière. Le Kid de Las Vegas s’était incliné cette année dans deux finales de Grand Chelem, alors qu’il était à chaque fois le favori face à deux adversaires très différents. À Roland-Garros, il s’est fait surprendre par le vétéran Andres Gomez (6-3, 2-6, 6-4, 6-4), tandis qu’à Flushing Meadows, il s’est fait littéralement balayer par un jeune joueur pourtant inexpérimenté, Pete Sampras (6-3, 6-2, 6-4).
En finale, Agassi rencontre Stefan Edberg pour la deuxième fois de la semaine : les deux joueurs se sont déjà affrontés lors de la phase de poules, et le Suédois l’avait emporté (7-6, 4-6, 7-6). Cette défaite n’a en rien entamé la confiance d’Agassi, comme il l’a montré lors de sa victoire en demi-finale contre le numéro 2 mondial, Boris Becker (6-2, 6-4).
La différence de style entre ces deux joueurs donne lieu à un match spectaculaire, Edberg se précipitant constamment au filet malgré les terribles retours et passing shots d’Agassi. Finalement, c’est la puissance de l’Américain qui prévaut, et le Kid de Las Vegas s’impose en quatre sets (5-7, 7-6, 7-5, 6-2).
Interrogé sur ce qu’il ressent à l’idée d’avoir remporté un premier titre majeur en battant le numéro un mondial, Agassi répond, cité par le New York Times :
“Je ne vais pas dire que Stefan ne mérite pas d’être numéro 1 mondial, mais il sait que cela peut changer très vite.”
La postérité du moment : Agassi numéro un mondial cinq ans plus tard
Stefan Edberg remportera deux autres titres du Grand Chelem dans sa carrière, tous deux à l’US Open, en 1991 et 1992. Au total, il aura passé 72 semaines à la première place mondiale.
Malgré sa confiance, il faudra encore deux ans pour qu’Agassi remporte son premier titre du Grand Chelem, à Wimbledon, en 1992, et près de cinq ans pour que le joueur de Las Vegas atteigne enfin la première place mondiale, en avril 1995. Bien qu’il participera à dix autres Masters et qu’il y disputera trois finales (en 1999, 2000 et 2003), Agassi ne remportera plus jamais le tournoi.