Kyrgios, Ruud : de la haine à l’amour
Anciens ennemis, Nick Kyrgios et Casper Ruud ont joué ensemble en double ce week-end lors de la World Team League.
En janvier, à Brisbane, Novak Djokovic et Nick Kyrgios, pour son grand retour en compétition officielle, vont (très probablement) attirer les foules en s’associant en double. Inimaginable quelques années arrière. Avant de devenir copains comme cochons, les deux hommes ne pouvaient pas se blairer. L’Australien était débecté par le Serbe, lui envoyait sans cesse des piques. Il lui avait reproché, entre autres, “un besoin maladif d’être aimé, au point d’en devenir gênant” et “une célébration ridicule (celle des cœurs envoyés au public)” lors du podcast No Challenges Remaining au printemps 2019.
S’il s’était longtemps contenu malgré les relances de la presse sur le cas Kyrgios, Djokovic, un tantinet irrité, avait fini par riposter. De façon cinglante : “En dehors du court, je n’ai pas beaucoup de respect pour lui.” Puis, en 2022, leur relation s’est apaisée. Le natif de Canberra avait été l’un des rares à défendre le monument belgradois lorsque celui-ci avait été expulsé d’Australie. Des échanges d’amabilités qui ont viré en véritable “bromance” étalée aux yeux du monde quelques mois plus tard à Wimbledon, où il se sont affrontés en finale.
Les rapports de l’autoproclamé “roi” – k1ngkirg1os comme alias sur Instagram – avec Casper Ruud ont suivi la même trajectoire. Le 16 mai 2019, lendemain de la sortie du fameux podcast qui avait fait grand bruit, Kyrgios, démons dansant sous son crâne, avait balancé une chaise en plein match et avait quitté le court avant même que l’arbitre n’ait prononcé sa disqualification. Son adversaire ce jour-là ? Le placide Ruud, qui avait jubilé avec une célébration comptant parmi les plus démonstratives de sa carrière.
Kyrgios vs Ruud, rome 2019 : l’origine du clash
“J’ai vu ce qu’il avait écrit sur ma célébration, qu’il n’avait pas apprécié”, avait réagi le Norvégien quelques mois plus tard pour le média suédois Sportalen. “J’étais content, j’avais gagné 90 points et 50 000 $, pourquoi me serais-je empêché de célébrer ? C’est son problème si c’est un idiot sur le court.” Mis au vent de ces propos, le principal intéressé avait tweeté : “La prochaine fois que tu as quelque chose à dire, viens le faire en face, mais je pense que tu ne l’ouvrirais pas autant. En attendant, je continuerai à préférer regarder une peinture sèche plutôt que tes matchs d’un ennui mortel.”
Deux ans plus tard, la hache de guerre n’était toujours pas enterrée. Ruud, un tantinet taquin, connaissant l’aversion de son meilleur ennemi pour l’ocre, avait écrit “Quel est son tournoi sur terre battue favori ?” en réponse à un tweet de l’ATP proposant de poser des questions à Kyrgios. Ce dernier avait alors rétorqué “Ta mère”, avant de supprimer au profit d’un “Haha bien joué. Tu es un bon joueur. Mais nous savons tous que tu voles des points dans ces tournois (les AT 250 sur terre battue) haha” sonnant un peu moins aigri.
En 2022, à Indian Wells, ils s’étaient retrouvés sur le court et “l’Aussie” s’était imposé 6-4, 6-4. La poignée de main avait été tout à fait correcte, puis, assis sur sa chaise, rangeant ses affaires alors que son rival avait déjà quitté le court, il s’était tourné vers la caméra en lâchant : “Je ne l’entends plus parler maintenant ! Je n’entends plus rien du tout !” De l’histoire ancienne. Cette année, la bataille d’ego a laissé place à une belle entente. Notamment grâce à l’UTS.
Casper et moi avons beaucoup parlé ces dernières années. Nous étions clairement en très mauvais termes, mais les gens grandissent et changent.
“King Kirgios” et “The Ice Man”, leurs surnoms à l’UTS, ont croisé le fer à New York fin août. Avant, pendant et après le duel remporté par le Canberrien, ils se sont adressés des aménités. Le week-end dernier, ils ont définitivement étalé leur complicité nouvelle lors de la World Tennis League, une exhibition organisée à Abou Dabi. Faisant partie de la même équipe, les Kites, ils ont disputé un double ensemble, pour remporter leur set (6-4) contre le duo formé par Jordan Thompson et Sumit Nagal.
“Avant le match, on s’est dit : ‘Qui aurait pu croire que nous jouerions un jour un double ensemble”, a souri Ruud après la rencontre. “Quel retournement de situation, quel nom peut-on donner à notre duo, Casper ?”, a quant à lui écrit Kyrgios sur Instagram. “C’était un plaisir absolu de jouer avec toi.” Sur X, il a répondu à une publication critiquant son “retournement de veste”. “Casper et moi avons beaucoup parlé ces dernières années”, a-t-il écrit. “Nous étions clairement en très mauvais termes, mais les gens grandissent et changent.“
Mais ce bon vieux Nick Kyrgios n’est pas resté orphelin de victime exutoire à son trash-talking. Depuis cet été, il s’est trouvé une nouvelle cible : Jannik Sinner, contrôlé positif lors de deux tests anti-dopage. De quoi imaginer que, d’ici quelques années, ils s’entendront comme deux larrons en foire… Et que la langue de l’Australien aura trouvé d’autres chats à fouetter.