Alcaraz : “Je suis fatigué mentalement, mais tous les joueurs le sont”
Après sa défaite en deux sets contre Casper Ruud pour ses débuts dans le Masters 2024, l’Espagnol a parlé de son usure mentale récurrente en fin de saison
“J’aborde ce tournoi différemment (par rapport à l’an passé), en sachant que je dois changer des choses pour obtenir un bon résultat. J’arrive ici avec beaucoup de motivation.”
Tels avaient été les mots de Carlos Alcaraz, vendredi, en amont du Masters. En faisant référence à son sourire perdu en fin de saison dernière, qui avait trahi une envie de gagner moins débordante. Cette fois, afin de débarquer à Turin avec bien plus de vigueur mentale, il avait choisi de s’appuyer sur “les évènements par équipes (la Coupe Davis et la Laver Cup) pour retrouver la joie et l’énergie.”
Langage corporel quelque peu résigné contre Ruud
Une nécessité pour l’Espagnol, qui a toujours eu besoin d’arborer sa large risette sur le court pour forcer ses adversaires à ranger les leurs au fond des poches. A fortiori après un doublé Roland-Garros – Wimbledon suivi d’une médaille d’argent olympique, à 21 ans, l’ayant vidé émotionnellement avant d’entamer une tournée nord-américaine soldée par une élimination dès son entrée en lice à Cincinnati contre Gaël Monfils, et une désillusion au deuxième tour de l’US Open face à Botic van de Zandschulp.
Seul hic, le plaisir a de nouveau semblé faire un tantinet défaut lors de sa défaite 6-1, 7-5 – sa première en cinq matchs contre Casper Ruud, qui n’avait auparavant jamais battu de top 3 sur dur – pour débuter ses ATP Finals 2024, lundi. Une sensation trahie par son langage corporelle, notamment “ses épaules basses”, après avoir été remonté alors qu’il menait 5-2, comme l’a souligné Justine Henin de son œil avisé aux commentaires sur Eurosport. Bien vu.
Je pense être dans un bien meilleur état que l’an passé à la même période, mais je dois encore trouver une façon d’être performant en étant fatigué mentalement.
“Oui, je suis fatigué mentalement”, a répondu celui qui est devenu, à Roland, le plus jeune joueur de l’histoire vainqueur de trois titres du Grand Chelem sur autant de surfaces différentes. “Mais tous les joueurs sont fatigués mentalement, et certains le gèrent mieux que d’autres”, a-t-il ajouté – Daniil Medvedev s’étant également dit quelque peu au bout du rouleau, dimanche. “Si quelqu’un prétend être frais (mentalement), il ment (sourire).”
“On joue beaucoup de match, le calendrier est trop serré, l’année a été très exigeante avec peu de plages de repos jours pour pouvoir s’entraîner à la maison. On passe d’un tournoi à l’autre, d’une tournée à l’autre, en traversant la planète. Dans la dernière partie de la saison, on est fatigué. Je pense être dans un bien meilleur état que l’an passé à la même période, mais je dois encore trouver une façon d’être performant et de produire du bon tennis en étant fatigué mentalement.”
Calendrier surchargé, mais enchaînement d’exhibitions
Argument recevable et déjà avancé par le surnommé “Carlitos” ces derniers mois. Mais, en venant de sa bouche, il a toujours eu du mal à atteindre les oreilles des suiveurs du tennis sans faire grincer des dents. Parce que le Transpyrénéen a lui-même alourdi encore un peu plus son programme avec des exhibitions.
- Novembre 2023 : exhibition au Mexique avec Tommy Paul
- Décembre 2023 : exhibition en Arabie Saoudite avec Novak Djokovic
- Décembre 2023 : exhibition à Murcie avec Roberto Bautista Agut
- Mars 2024 : exhibition à Las Vegas avec Rafael Nadal
- Septembre 2023 : exhibition à Berlin (Laver Cup)
- Octobre 2024 : exhibition en Arabie Saoudite (6 Kings Slam) avec Novak Djokovic, Rafael Nadal, Jannik Sinner, Daniil Medvedev et Holger Rune
- Décembre 2024 : exhibition prévue avec Frances Tiafoe à Charlotte
Je n’ai aucune expérience en indoor.
Cette usure psychique ne s’est toutefois pas imposée comme la seule explication des difficultés d’Alcaraz en fin d’année. Sur dur intérieur, il n’a pas encore engrangé beaucoup de vécu au plus haut niveau. Il est arrivé dans le Piémont en n’ayant disputé que dix compétitions dans ces conditions sur le circuit principal : Vienne 2021 ; Astana 2022 ; Bâle 2022 ; Masters 2023 ; Coupe Davis 2022, 2024 ; Paris-Bercy 2021, 2022, 2023, 2024. Pour un bilan de 16 succès, 26 revers et trois demi-finales comme meilleurs résultats.
“Je n’ai aucune expérience en indoor“, s’est-t-il exprimé après avoir été vaincu par Ruud. “Je peux m’entraîner beaucoup pour m’y habituer, mais je n’ai pas assez de matchs dans les jambes sur dur intérieur. Je dois m’améliorer. Je vais devenir un très bon joueur en indoor, j’en suis sûr. Mais il va me falloir du temps, jouer davantage de rencontres sur cette surface. Je n’ai pas l’impression d’être un mauvais joueur d’intérieur. Je dirais plutôt que beaucoup de joueurs sont meilleurs que moi en indoor.“
Alcaraz était malade
L’an passé, pour son premier Masters – il était qualifié mais blessé en 2022 –, bien que loin d’être au sommet de son art pendant les poules, Carlos Alcaraz avait remporté deux duels pour atteindre les demi-finales, où il avait été laissé en pièces détachées – 6-3, 6-2 – par Novak Djokovic, futur vainqueur et seul détenteur du record de titres. Pour tenter de passer une nouvelle fois la phase de groupe, il doit désormais affronter Alexander Zverev et Andrey Rublev. En espérant, aussi, être en meilleure santé physiquement.
“Quelques jours avant d’arriver (à Turin), j’ai été malade chez moi”, a-t-il confié. “À l’entraînement ici, ça allait, sans être au top. Je pouvais jouer, tenir les rallyes. Mais en match, c’est évidemment différent. Aujourd’hui (lundi), je ne me sentais pas bien. Ce matin j’avais mal à l’estomac, et pendant le match je ne me sentais pas bien après les longs échanges. Je ne veux pas me chercher d’excuse, mais c’est ce qui s’est passé.” Sans doute une explication, aussi, à son attitude moins combative qu’à l’accoutumée. Difficile de sourire quand le bide pousse à la soupe à la grimace.