Medvedev claque les portes de l’histoire au nez de Djokovic
Daniil Medvedev a surclassé Novak Djokovic en finale de l’US Open dimanche, selon un scénario inenvisageable en amont (6-4, 6-4, 6-4). Si le Russe décroche ainsi son premier titre en Grand Chelem, le Serbe passe à côté de sa quête du Grand Chelem calendaire et reste bloqué à 20 Majeurs au palmarès. Comme Roger Federer et Rafael Nadal.
US Open (H) – Finale
D.Medvedev (N°2) bat N.Djokovic (N°1) : 6-4, 6-4, 6-4
- L’information principale : Daniil Medvedev a privé Novak Djokovic du Grand Chelem calendaire et de son 21e titre majeur en remportant la finale de l’US Open pour ouvrir son propre palmarès en Grand Chelem.
- Ce que vous apprendrez aussi : Rattrapé par l’émotion et ovationné par le public du court Arthur-Ashe, Djokovic a terminé en pleurs sur sa chaise au dernier changement de côté du match.
- Pourquoi il faut lire cet article : Pour comprendre comment Djokovic a explosé dans des proportions rares en Grand Chelem.
Le poids de sa quête a fini par rattraper Novak Djokovic. Et comme il y avait en face de lui un Daniil Medvedev qui a fait le match qu’il fallait pour cueillir le Serbe, à bout de forces physiques et de ressources mentales, le numéro 1 mondial a vu son rêve lui échapper dimanche. Il s’est lourdement incliné en finale de l’US Open contre son dauphin au classement ATP, impérial pour aller décrocher son premier titre en Grand Chelem (6-4, 6-4, 6-4).
Medvedev a écrit une page de sa propre histoire, quand Djokovic était à un succès de rédiger l’un des plus beaux chapitres du grand livre du tennis. A un succès du Grand Chelem calendaire, dont Rod Laver restera encore au moins un an de plus le seul auteur dans l’ère Open chez les hommes. A un succès de son 21e Majeur, pour dépasser Roger Federer et Rafael Nadal, dont il reste pour l’instant l’égal.
Les larmes de Djokovic au dernier changement de côté
Djokovic a régulièrement des allures de machine sur un court de tennis. Il est rarement apparu aussi humain que ce dimanche. Jusqu’à verser des larmes lors du dernier changement de côté, quand le public du court Arthur-Ashe avait pris fait et cause pour lui, lui réservant une ovation splendide, à laquelle s’est jointe sa femme Jelena. Comme si dans la défaite cinglante, il obtenait enfin le soutien qu’il attendait depuis des années. L’ultime jeu de service de Medvedev allait débuter que les yeux de Djokovic étaient encore rougis et ses joues mouillées.
C’est le symbole de cette soirée que le Serbe a traversé sans jamais être vraiment lui-même. A maintes reprises il a signifié par ses gestes de frustration que ses jambes ne répondaient pas. Il s’est tapé sur les cuisses dans le premier set. Il a explosé une raquette dans le deuxième. Mais jamais la flamme ne s’est réellement allumée, lui qui se nourrit si bien de son feu intérieur, entretenu par son clan. Là c’était le calme. Sans la tempête qui suit habituellement.
Il faut dire que Medvedev a tout fait pour éviter qu’elle se déclenche. D’abord en breakant dès le premier jeu, au cours duquel Djokovic menait pourtant 40-15, avant de commettre des fautes directes grossières, premiers signes de sa tension. Une fois cet avantage au score pris, le Russe a déroulé. 15/15 derrière sa première balle, trois petits points lâchés sur son engagement : pour la première fois en trois finales de Grand Chelem, Medvedev pouvait faire la course en tête.
Medvedev a fait du Djokovic
La confiance que le gain de ce premier set a engendré l’a porté pendant le reste du match. Plus costaud que le Serbe sur les échanges à rallonge, impressionnant sur son service, Medvedev a quasiment fait du Djokovic. Extrêmement solide en défense, virevoltant dans ses déplacements et ses courses vers l’avant, précis dans ses frappes du fond du court. Il a mené une entreprise minutieuse de démolition des espoirs du Serbe. Encore plus avec les cinq balles de break sauvées par Medvedev sur ses deux premiers jeux de service de la deuxième manche. Dont une remise par l’arbitre à cause du déclenchement impromptu de la sono du stade, alors que Djokovic avait relancé une deuxième balle du Russe pour engager l’échange.
Dans la foulée de ce coup du sort, c’est le Serbe qui a craqué et concédé le break, sur un passing de Medvedev dans ses pieds. Djokovic a régulièrement fait le choix d’aller vers l’avant dans ce match, probablement encouragé par la position profonde en retour de son adversaire ou ses propres limites physiques du jour. A moins que ce ne soit un mélange des deux. Il était en réussite dans l’exercice dans le premier set (8/9), ce fut moins probant par la suite (23/38). Pareil pour les coups joués en avançant, à l’instar de la balle de deuxième manche où il a envoyé dans le couloir une amortie mal touchée par Medvedev. Un scénario qui s’est répété à plusieurs reprises.
Medvedev aura été le meilleur du premier au dernier jour de cet US Open
Dos au mur, Djokovic n’a quasiment rien manifesté qui laissait penser à une rébellion. A la peine avec sa première balle (54% de réussite), il était même au bord de la capitulation, à 4-0 dans le troisième set. Mais il s’est accroché, a forcé Medvedev à servir une première fois pour le match à 5-2. Et là, le Russe a obtenu une première balle de match, vendangée d’une double-faute en envoyant un missile en seconde, comme il l’a fait fréquemment au cours de la rencontre. Au total, Medvedev a commis trois doubles-fautes dans ce jeu, offrant à Djokovic un premier break dans le match et un sursis, que “Nole” avait essayé de provoquer en changeant pour la première fois de tenue de tout le match.
Sur son jeu de service suivant, le numéro 2 mondial a réalisé une nouvelle double-faute, à nouveau sur balle de match. Mais la troisième opportunité de conclure fut la bonne, dans une ambiance absolument électrique, où le public venu assister à un pan de l’histoire du tennis était hystérique, au point d’entendre des sifflets au moment où Medvedev servait. L’ampleur de la performance du Russe est exceptionnelle. Non seulement il a surclassé sur ce match Djokovic, qui n’avait perdu que trois finales de Grand Chelem en trois sets, à l’US Open contre Roger Federer (2007), à Wimbledon contre Andy Murray (2013), et à Roland-Garros contre Rafael Nadal (2020). Mais il a surtout bouclé une quinzaine où il aura été incontestablement le meilleur du premier au dernier jour.
Djokovic ne pouvait pas en dire autant. Ça l’aura obligé à puiser dans ses réserves au fil des tours, davantage que de raison, et il n’avait tout simplement plus l’influx nécessaire pour mener cette ultime bataille qui le séparait du Grand Chelem calendaire. C’est un échec qui montre toute la complexité de cette quête, comme ça avait été le cas avec Serena Williams en 2015, et qui rappelle à quel point le prochain qui l’accomplira sera immense. Et si même le Djokovic 2021 a fini par ne pas être à la hauteur, c’est que les mensurations requises sont réellement hors-normes. Comme Medvedev l’a été le temps d’une soirée de grâce à New York ce dimanche.