5 juillet 1997 : Le jour où Hingis a remporté Wimbledon à seulement 16 ans
Déjà victorieuse de l’Open d’Australie et numéro 1 mondiale, Martina Hingis enchaîne le 5 juillet 1997 à Wimbledon, en battant Jana Novotna en finale. La Suissesse devient alors la joueuse la plus jeune à s’imposer à Wimbledon dans l’ère Open.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi cela a marqué l’histoire du tennis : Hingis bas un record de précocité
Le 5 juillet 1997, à l’âge de 16 ans et 9 mois, Martina Hingis est la plus jeune joueuse de l’ère Open à remporter Wimbledon. La Suissesse, qui était déjà devenue la plus jeune gagnante de l’Open d’Australie en janvier et la plus jeune numéro 1 mondiale de l’histoire du tennis en mars, domine Jana Novotna en finale (2-6, 6-3, 6-3) pour ajouter un deuxième titre du Grand Chelem à son palmarès.
Les actrices : Martina Hingis et Jana Novotna
- Martina Hingis, l’enfant prodige du tennis mondial
Martina Hingis est née en septembre 1980, et sa mère, Melanie Molitor, la prénomme en référence à la championne de tennis, Martina Navratilova. Formée par sa maman, elle est un enfant prodige, et remporte Roland-Garros juniors à seulement 12 ans. Elle fait ses débuts sur le circuit à 14, mais le règlement ne l’autorise à disputer que 15 tournois avant l’âge de 16 ans, une règle contre laquelle elle s’insurge. Son tennis est basé sur une coordination extraordinaire, un sens tactique impressionnant, un superbe toucher de balle et une bonne lecture du jeu. Au début de sa carrière, elle manque néanmoins de puissance et sa deuxième balle est assez faible.
Plus jeune joueuse de l’histoire à gagner un match à l’Open d’Australie, en 1995, elle explose en 1996. Après avoir battu la numéro 1 mondiale incontestée, Steffi Graf, au mois de mai à Rome, elle se hisse en demi-finale de l’US Open (battue par Graf, 7-5, 6-3), puis en finale du Masters (où elle est battue par Graf en cinq sets, 6-3, 4-6, 6-0, 4-6, 6-0). Trois après son 16e anniversaire, elle est déjà 6e mondiale. Mais sa carrière prend une nouvelle dimension en 1997. Après un premier titre glané à Sydney (aux dépens de Jennifer Capriati, 6-1, 5-7, 6-1), elle devient la plus jeune gagnante en Grand Chelem de l’ère Open, en battant Mary Pierce en finale de l’Open d’Australie (6-2, 6-2).
Ces résultats extraordinaires lui permettent de devenir la plus jeune joueuse de tous les temps à s’installer au sommet du classement WTA, au mois de mars, à l’âge de 16 ans et 3 mois. Malheureusement, Hingis est contrainte à faire l’impasse sur la majeure partie de la saison sur terre battue, en raison d’une blessure consécutive à une chute de cheval. Elle ne peut disputer le moindre tournoi sur terre battue avant Roland-Garros, où elle atteint néanmoins la finale, battue à la surprise générale par Iva Majoli (6-4, 6-2).
- Jana Novotna, régulière à haut niveau sans parvenir à décrocher un grand titre
Jana Novotna est née en Tchécoslovaquie en 1968. Adepte du service-volée, elle intègre le top 100 en 1987, avant de remporter son premier tournoi en 1988 à Adelaïde, aux dépens de Jana Pospisilova (7-6, 6-4). Elle réussit sa première performance en Grand Chelem à Roland-Garros en 1989, battue en quarts de finale par Arantxa Sanchez (6-2, 6-2), et se maintient dans le Top 10 au cours des années suivantes. Malgré sa régularité au plus haut niveau, elle lutte souvent avec ses émotions dans les matches à fort enjeu, et elle échoue à deux reprises en finale de Grand Chelem, la première fois à l’Open d’Australie 1991 (face à Monica Seles, 5-7, 6-3, 6-1), puis à Wimbledon 1993 (contre Steffi Graf, 7-5, 1-6, 6-4).
Sa défaite face à Graf en 1993 marque les esprits : alors qu’après la perte du premier set, Novotna avait pris l’avantage, 6-1, 4-1, elle s’effondre et s’incline 6-4. Lors de la remise des prix, elle fond en larmes dans les bras de la Duchesse de Kent. En 1995, au troisième tour de Roland-Garros, elle perd contre Chanda Rubin après avoir mené 5-0, 0-40 au dernier set et gâché 9 balles de match. Beaucoup d’observateurs pensent alors que, malgré son superbe tennis, elle n’a pas le mental pour gagner des grands tournois. Novotna a un palmarès bien plus fourni en double, où elle a déjà accumulé 9 titres du Grand Chelem et atteint la première place mondiale en 1990.
Le lieu : Wimbledon
Wimbledon est le tournoi de tennis le plus ancien et le plus prestigieux au monde. Organisé par le All England Lawn Tennis and Croquet Club depuis 1877, il s’est installé sur son site actuel en 1922, année de la construction du célèbre Centre Court. Considéré par beaucoup comme le court le plus impressionnant au monde, avec sa célèbre citation de Rudyard Kipling gravée au-dessus de l’entrée (« Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite et recevoir ces deux menteurs d’un même front »), le Centre Court a vu s’affronter tous les plus grands joueurs de l’histoire.
Après la conversion, dans les années 1970, de l’US Open à la terre battue puis au ciment, et après l’abandon du gazon au profit du dur par l’Open d’Australie en 1988, Wimbledon demeure le dernier tournoi du Grand Chelem sur herbe, une surface qui convient généralement mieux aux serveurs-volleyeurs. Non seulement Wimbledon conserve sa surface historique, mais le tournoi maintient également certaines traditions comme l’obligation pour les joueurs de s’habiller en blanc, où le fait de programmer le tenant du titre en match d’ouverture sur le court central.
L’histoire : Hingis a trouvé la clé pour renverser Novotna
A Wimbledon, en 1997, dans un tournoi plein de surprises, où quatre des huit premières têtes de série ont été battues avant le quatrième tour, c’est un soulagement pour les organisateurs d’avoir deux des favorites en finale : Martina Hingis, numéro 1 mondiale, qui n’a jusqu’à présent perdu qu’un seul match en 1997, en finale de Roland-Garros, et Jana Novotna, numéro 3 mondiale, finaliste au All England Club en 1993.
La Suissesse a traversé le tableau sans affronter de tête de série et n’a pas perdu un seul set sur son chemin vers la finale. En demi-finale, elle aurait dû affronter Iva Majoli, qui l’avait battue en finale de Roland-Garros quelques semaines auparavant. Mais la Croate est éliminée par Anna Kournikova (7-6, 6-4), qu’Hingis écarte ensuite facilement (6-3, 6-2). Au contraire, Novotna a été poussée au troisième set à trois reprises, son match le plus difficile étant son huitième de finale contre Mary Joe Fernandez (5-7, 6-4, 7-5).
Dans le premier set de cette finale, il semble bien que l’expérience de Novotna, combinée à son jeu fait pour le gazon, soient en mesure d’ébranler la confiance affichée par la numéro un mondiale au cours des deux semaines précédentes. La Tchèque remporte le premier set, 6-2 : ”Je me suis sentie comme une débutante dans le premier set ; elle ne m’a pas laissé l’occasion de passer, et au filet, elle était partout”, expliquera plus tard Hingis, dans des propos rapportés par le New York Times.
Je me suis dit que si Steffi (Graf) n’était pas là, je pourrais aussi le gagner.
Martina Hingis
Hingis trouve ensuite son rythme, aiguisant ses retours et ses passings, et commence à monter aussi au filet pour empêcher Novotna de le faire la première. La Suissesse prend le contrôle du match et, bien qu’elle doive effacer un break de retard au début du troisième set, elle remporte les deux sets suivants sur le même score, 6-3, 6-3.
“Elle a vu une ouverture, et elle s’y est engouffrée, déclare Novotna. Je pense qu’elle a senti qu’elle pouvait vraiment m’avoir à l’usure, mais au moins, je me suis battue.”
La Tchèque perd ainsi sa deuxième finale à Wimbledon, bien que cette deuxième défaite n’ait pas été aussi dramatique que son effondrement contre Graf en 1993. Lors de la cérémonie de remise des trophées, elle fait semblant de voler le trophée de la gagnante, avant de le rendre bien sûr à sa véritable propriétaire.
“Cette fois, j’avais vraiment une bonne chance de gagner, déclare Hingis. J’étais tête de série n° 1 et je n’avais perdu que contre Steffi dans ce tournoi, alors je me suis dit que si elle n’était pas là, je pourrais aussi le gagner.”
Hingis est la plus jeune joueuse de l’ère Open à triompher à Wimbledon, et seulement la deuxième joueuse à y soulever le trophée avant l’âge de 17 ans, avec Lottie Dod, la plus jeune gagnante de tous les temps, qui avait remporté le tournoi en 1887 à 15 ans et 10 mois.
La postérité du moment : Hingis surpassée par les sœurs Williams
Martina Hingis s’imposera dans la foulée à l’US Open 1997 (en battant Venus Williams en finale, 6-0, 6-4) et à l’Open d’Australie 1998 (en battant Conchita Martinez, 6-3, 6-3). Cependant, ayant du mal à contenir la puissance de la nouvelle génération de joueuses, dont les sœurs Williams, elle ne remportera qu’un seul autre titre majeur, à l’Open d’Australie, en 1999, atteignant malgré tout la finale de six autres tournois du Grand Chelem. Elle apparaîtra pour la dernière fois au sommet du classement WTA le 14 octobre 2001, après avoir occupé cette place pendant 209 semaines.
Après une terrible défaite face à Jennifer Capriati en finale de l’Open d’Australie 2002, perturbée ensuite par une blessure au pied, elle annoncera sa retraite en février 2003. Elle reviendra sur le circuit en 2006, mais ne dépassera jamais les quarts de finale d’un tournoi du Grand Chelem jusqu’à ce qu’elle soit contrôlée positive à la cocaïne à Wimbledon et suspendue à la fin de l’année. Elle reviendra une dernière fois dans les années 2010, en double, et remportera quatre autres titres du Grand Chelem. Elle prendra définitivement sa retraite en 2017.
En 1998, Jana Novotna remportera enfin Wimbledon, après y avoir échoué deux fois en finale. Cette fois, elle maîtrisera ses émotions pour éliminer la n°1 mondiale Martina Hingis en demi-finale (6-4, 6-4) avant de battre Nathalie Tauziat (7-6, 6-4). Elle y remportera également le double, associée à Hingis. Novotna prendra ensuite sa retraite à la fin de la saison 1999. Elle s’éteindra le 19 novembre 1997 des suites d’un cancer, à l’âge de 49 ans.