11 mai 1987 : Le jour où le tennis est redevenu un sport olympique
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Le 11 mai 1987, le CIO a décidé du retour du tennis aux JO de Séoul 1988, après plus de 60 ans d’absence.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi ça a marqué l’histoire du tennis : le tennis change de dimension
Ce jour-là, le 11 mai 1987, le Comité International Olympique vote la réintroduction du tennis en tant que sport olympique à part entière, dès les Jeux de Séoul de 1988. C’est un grand moment pour le tennis, absent des JO depuis 1924.
Epreuve majeure inédite dans le monde de l’ère Open, les Olympiades permettront au tennis de toucher un large public. C’est également un symbole pour le mouvement olympique, qui, en intégrant un sport aussi professionnalisé, signe la fin officielle de l’amateurisme.
L’histoire : La fin de l’amateurisme dans le tennis
Alors que le tennis était initialement partie prenante des Jeux Olympiques dès leur renaissance, en 1896, il en est exclu après les Jeux de 1924. En effet, le Comité International Olympique et la Fédération Internationale de Tennis ne parviennent pas à se mettre d’accord sur la définition de la notion d’amateurisme, inscrite dans la charte olympique. Une définition assez complexe puisque le baron Pierre de Coubertin lui-même peine à s’entendre avec ses homologues anglais à ce sujet. C’est ainsi que, pendant plus de soixante ans, le tennis ne sera pas le bienvenu aux Jeux Olympiques.
Après trente ans de silence, le dialogue reprend entre les deux instances en 1956, sous l’impulsion de Giorgio di Stefani, président de l’ITF. Le tennis est présent aux Jeux de Mexico en 1968, mais sous forme de tournoi d’exhibition, ce qui signifie qu’aucune médaille n’est délivrée. Malgré sa popularité, le tennis reste exclu de l’aventure olympique.
A l’aube des années 1980, le principal point de friction entre les instances du tennis et olympiques reste la question de l’amateurisme. En effet, le comité olympique prétend se tenir à sa charte, alors qu’à l’heure des tournois Open, le monde du tennis n’imagine pas pouvoir séduire le public avec une compétition privée des meilleurs, tous professionnels dès les années 1970.
Ce débat met également en lumière une certaine hypocrisie par rapport au statut d’amateur, une hypocrisie que le tennis a justement bien connu avant l’ère Open. En effet, certains athlètes se prétendent amateurs car ils ne touchent pas de « prize-money ». Ils sont en réalité tellement bien défrayés et parfois rémunérés sous la table par leurs fédérations, et ils se consacrent ainsi uniquement à leur sport, en contradiction avec la notion d’amateurisme.
Les choses vont changer à partir de 1980. Cette année-là, Juan Antonio Samaranch est élu président du CIO, et son point de vue est clair : il veut dépoussiérer les Jeux Olympiques et les faire entrer dans l’ère moderne, mettre fin à l’hypocrisie de l’amateurisme et attirer le public aux Jeux en présentant les meilleurs athlètes du monde.
Il rencontre cependant beaucoup de résistance au sein du Comité. Certains membres conservateurs sont en effet réticents à intégrer aux Jeux le tennis, ce sport si ouvertement professionnel, où le fossé avec les amateurs est devenu infranchissable. Néanmoins, appuyé par Philippe Chatrier, président de l’ITF, Samaranch insiste. Un sport aussi populaire que le tennis ne peut qu’être bénéfique à un mouvement olympique alors en difficulté, entre les problèmes liés aux infrastructures, les boycotts politiques et la menace terroriste.
Un compromis est finalement trouvé : Un tournoi de tennis aura bien lieu aux Jeux de 1984 à Los Angeles, mais avec des épreuves de simple ouvertes à seulement trente-deux participants, âgés de moins de vingt ans. Surtout, ce tournoi ne distribuera pas de médailles, laissant encore le tennis à l’écart des disciplines olympiques officielles.
Malgré ces restrictions, l’épreuve de tennis dite « de démonstration » des Jeux de 1984 est un succès, notamment grâce à la prestation de la jeune prodige allemande Steffi Graf, qui s’impose chez les femmes, tandis que Stefan Edberg, lui aussi futur numéro 1 mondial, l’emporte chez les garçons.
L’ITF demande alors que les Jeux Olympiques de 1988 s’ouvrent à l’ensemble des joueurs de tennis professionnels. Pour prouver sa compréhension de l’esprit olympique, elle s’engage à ce que les tennismen ne touchent pas de rémunération, qu’ils se soumettent aux contrôles anti-dopage, qu’ils ne prennent part à aucun tournoi pro à moins de deux semaines des J.O, qu’ils ne participent à aucun événement de type publicitaire pendant la durée des Jeux, qu’ils portent des tenues aux couleurs de leur pays, et enfin qu’ils résident au village olympique. Malgré tout, le CIO rechigne encore et le vote, prévu au congrès de Lausanne en 1986, est repoussé au mois de mai 1987, à Istanbul.
C’est donc le 11 mai 1987 que le CIO doit se prononcer pour ou contre l’intégration du tennis aux Jeux Olympiques de Séoul. L’enjeu de ce vote dépasse celui du tennis : en accueillant l’ensemble des tennismen, le CIO reconnaîtrait pour la première fois de manière officielle la fin de l’amateurisme. Une large majorité des votants se prononce pour ; après soixante-quatre années d’attente, il y aura bien une épreuve de tennis, ouverte aux meilleurs joueurs du monde, aux Jeux de 1988.
La postérité du moment : Les Jeux Olympiques attireront les meilleurs joueurs du monde
129 joueurs, représentant 37 nationalités, participeront à l’épreuve de tennis des Jeux Olympiques de Séoul en 1988, et 110 000 spectateurs se presseront pour y assister. Chez les femmes, la numéro 1 mondiale Steffi Graf, décrochera la médaille d’or, quelques semaines après avoir réalisé le Grand Chelem calendaire.
Chez les hommes, en l’absence des deux meilleurs joueurs du monde, Mats Wilander et Ivan Lendl, c’est le Slovaque Miloslav Mecir, 10e mondial, qui montera au sommet du podium.
Les Jeux Olympiques constitueront une nouveauté dans le monde du tennis professionnel, et l’épreuve évoluera au fil des ans pour trouver la formule la plus attractive. Selon les éditions, des points ATP seront parfois distribués ; le format au meilleur des cinq manches, initialement prévu pour tous les matches, sera réservé à la finale.
Les épreuves féminines attireront rapidement les meilleures joueuses du monde, tandis que chez les hommes, les Jeux mettront plus de temps à s’imposer comme un événement incontournable. A partir du milieu des années 2000, tous les meilleurs se montreront attachés à l’épreuve olympique, avec les participations régulières de Roger Federer, Rafael Nadal, Novak Djokovic et Andy Murray.
Au-delà du tennis, les Jeux Olympiques continueront à s’ouvrir vers le sport professionnel, avec notamment, dès 1992, la présence de la célèbre Dream Team américaine de basket-ball qui suscitera un énorme engouement aux Jeux de Barcelone.