7 juin 2009 : Le jour où Federer a enfin remporté Roland-Garros
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Le 7 juin 2009, Roger Federer domine Robin Soderling (6-1, 7-6, 6-4) pour enfin triompher à Roland-Garros.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi cela a marqué l’histoire du tennis : Federer s’impose à Paris pour la première (et unique) fois
Le 7 juin 2009, Roger Federer domine Robin Söderling (6-1, 7-6, 6-4) pour enfin triompher à Roland-Garros, après avoir échoué trois fois de suite en finale face à son rival Rafael Nadal. En chemin vers la victoire, il bénéficie de la défaite surprise de Nadal en huitièmes de finale, mais remporte aussi deux matches serrés en cinq sets en huitièmes et demi-finale.
Brisant ainsi la malédiction qui semblait peser sur lui à Roland-Garros, il boucle le Grand Chelem en carrière, mais égale aussi les quatorze titres du Grand Chelem de Pete Sampras. Il devient tout simplement le plus grand joueur de tous les temps.
Les acteurs : Roger Federer et Robin Soderling
- Roger Federer, le maudit de Roland-Garros
En mai 2009, Roger Federer a 29 ans, et il traverse une période difficile. Il a dominé le tennis pendant les années 2004-2007, gagnant à peu près tout, à l’exception de Roland-Garros, le seul titre majeur après lequel il court encore. Rafael Nadal en est la principale raison : à trois reprises, il a buté sur lui en finale, en 2006, 2007 et 2008.
D’ailleurs, cette saison 2008 a été un tournant dans la carrière du Suisse. Tout d’abord, le jeune Novak Djokovic l’a battu en demi-finale de l’Open d’Australie (7-5, 6-3, 7-6), mais le pire était encore à venir. Son rival Rafael Nadal, après l’avoir démoli lors d’une douloureuse finale à Paris (6-3, 6-1, 6-0), a réussi à le mettre à terre en son jardin de Wimbledon, après cinq sets de combat acharné (6-4, 6-4, 6-7, 6-7, 9-7).
Le début de la saison 2009 ne change pas la donne. À l’Open d’Australie 2009, il s’incline à nouveau contre Nadal en cinq sets (7-5, 3-6, 7-6, 3-6, 6-2), et s’effondre en larmes lors de la remise des trophées. En mars, à Indian Wells, on le voit fracasser une raquette lors d’une demi-finale perdue face à Novak Djokovic.
Au mois de mai, Federer n’est pas seulement devenu le dauphin de l’Espagnol, mais il a également subi des défaites face à Novak Djokovic, Andy Murray et Stan Wawrinka. Pour la première fois depuis 2000, il n’a pas gagné le moindre tournoi lors des quatre premiers mois de la saison.
Les journalistes commencent à parler de déclin. Mais le Suisse, qui remporte alors le tournoi de Madrid, en battant Nadal sur terre battue pour la deuxième fois de sa carrière, leur rappelle que, alors qu’il compte treize titres du Grand Chelem à son palmarès, il est encore bien vivant et n’a pas abandonné sa quête de Roland-Garros.
- Robin Söderling, la surprise
Le Suédois Robin Soderling est né en 1984. Il a remporté son premier tournoi à Lyon, à l’âge de 20 ans, et avec son puissant service et son coup droit de tueur, on l’avait imaginé atteindre rapidement le top 10. Souvent trahi par ses émotions, ses résultats sur le circuit n’ont pas été à la hauteur de ces attentes.
Lorsque débute Roland-Garros 2009, trois mois avant son 25e anniversaire, Soderling est 25e mondial et n’a gagné que trois tournois sur le circuit, le plus important à Lyon. Il n’a encore jamais atteint les huitièmes de finale en Grand Chelem.
Le lieu : Roland-Garros
Cette histoire a lieu à Roland-Garros. Le stade, situé dans l’ouest parisien, à la lisière du bois de Boulogne, accueille les Internationaux de France depuis 1928. Ce fut le premier et désormais le seul tournoi du Grand Chelem sur terre battue, la surface la plus lente, ce qui en fait le tournoi le plus difficile à gagner sur le plan physique.
Avec la domination des joueurs de fond de court comme Gustavo Kuerten, Juan Carlos Ferrero et ensuite bien sûr Rafael Nadal, gagner Roland-Garros est devenu le plus grand défi pour les attaquants comme Roger Federer, qui aiment bien monter au filet. Il est cependant excellent sur terre battue, puisqu’un seul joueur, Rafael Nadal, a réussi à le battre à Roland-Garros lors des quatre dernières éditions.
L’histoire : Federer n’a pas laissé passer sa chance
Les quatre derniers Roland-Garros ont vu le même scénario se répéter pour Roger Federer, alors qu’il tentait de gagner le dernier tournoi du Grand Chelem manquant à son palmarès. On pourrait penser qu’il était victime de la malédiction de Roland-Garros, comme tant d’autres avant lui, tels que John McEnroe, Stefan Edberg ou Pete Sampras.
Sauf que sa malédiction est d’un genre différent : il s’agit de Rafael Nadal. Federer ne se démène pas avec la terre battue, il se démène pour battre l’Espagnol. Chaque année, il vient pour conquérir la Coupe des Mousquetaires et chaque année, Nadal l’en empêche.
Mais cette année, tout a changé : le dimanche précédant la finale, l’inattendu Suédois Robin Söderling a renversé Nadal en huitièmes de finale. La chemin du sacre s’est subitement ouvert à Federer.
Cependant, avec l’élimination de Nadal, quelque chose de nouveau est venu tourmenter Federer dans sa quête : la pression. Il sait aussi bien que tout le monde que, son bourreau neutralisé, c’est peut-être sa seule occasion de s’emparer du titre. Le jour suivant la défaite de l’Espagnol, Federer n’est pas loin de prendre la porte à son tour, et remonte de deux sets à rien contre Tommy Haas (6-7, 5-7, 6-4, 6-0, 6-2).
En demi-finale, le jeune Juan Martin del Potro le pousse à nouveau à disputer un cinquième set de tous les dangers, mais le Suisse s’en sort encore (3-6, 7-6, 2-6, 6-1, 6-4). A présent, seules deux choses peuvent l’empêcher de soulever la Coupe des Mousquetaires et de boucler son Grand Chelem en carrière : la pression, et Robin Soderling.
Contrairement à beaucoup de joueurs qui ont créé une grande surprise en Grand Chelem, le Suédois a réussi à rester concentré sur la suite de son tournoi. Devenir le premier joueur à avoir jamais battu Nadal à Roland-Garros est le plus grand exploit de sa carrière, mais il ne compte pas s’arrêter là. En quart de finale, il démolit la tête de série N°10, Nikolay Davydenko (6-1, 6-3, 6-1), et en demi-finale, il sort vainqueur d’un violent combat en cinq sets contre Fernando Gonzalez (6-3, 7-5, 5-7, 4-6, 6-4). Il est maintenant en finale de Roland-Garros, et, avec son jeu à haut risque et une confiance maximale, il est peut-être en mesure de faire vaciller Federer.
Il est bien connu qu’une finale de Grand Chelem est toujours une expérience à part. C’est la première pour Söderling, alors que Federer, lui, en a déjà disputé 18. Plus expérimenté, le Suisse démarre sur de bonnes bases, passant 75% de premiers services, tandis que Soderling, très tendu, est transparent. 23 minutes plus tard, Federer empoche la première manche, 6-1.
Au deuxième set, Söderling ajuste son coup droit et offre une résistance plus coriace pour pousser Federer au tie-break. Sous une pluie naissante, Federer s’appuie sur son service, et, bien aidé par quatre aces, gagne le jeu décisif 7-1.
Un break en début de troisième set lui donne l’avantage jusqu’au bout. Sur l’ensemble du match, il frappe 16 aces, une vraie “perf” en seulement trois sets, dans des conditions aussi humides.
À 5-4, 40A, une volée de coup droit gagnante lui offre une balle de match. Il n’est maintenant plus qu’à un point de réaliser son rêve, mais aussi celui de ses millions de fans qui attendent désespérément ce moment depuis cinq ans. Federer prend son temps avant de servir. Il attend que le public se calme, et s’assure de maîtriser ses nerfs. Il décide d’aller chercher le coup droit de Söderling, qui retourne dans le filet. Federer peut alors s’agenouiller sur le court Philippe-Chatrier, les yeux embués de larmes : après y avoir connu tant de désillusions, il est enfin le champion de Roland-Garros.
Le Suisse devient le deuxième joueur, après Andre Agassi, à réaliser le Grand Chelem en carrière sur trois surfaces différentes. Avec ce 14e titre du Grand Chelem, il égale le record jusqu’ici détenu par le seul Pete Sampras.
La postérité du moment : Une saison 2009 exceptionnelle
Roger Federer s’imposera à Wimbledon un mois plus tard, et il y battra par la même occasion le record de Pete Sampras avec un quinzième titre du Grand Chelem, tout en récupérant la place de numéro 1 mondial.
Le Suisse disputera encore une finale à Roland-Garros, où son rival Rafael Nadal le dominera encore en 2011 (7-5, 7-6, 5-7, 6-1). Alors qu’en 2009, à 27 ans, son déclin a déjà été annoncé à plusieurs reprises, onze ans plus tard, en 2020, il fera toujours partie d’un trio dominant le tennis qu’on appellera le Big 3. Roger Federer remportera cinq autres tournois du Grand Chelem.
Robin Söderling profitera de sa dynamique pour s’installer dans le Top 10 les deux années suivantes. Le même Roger l’éliminera encore en huitièmes de finale à Wimbledon et en quarts de finale de l’US Open en 2009. Mais en 2010, Soderling créera à nouveau l’événement à Paris, renversant le Suisse en quarts de finale (3-6, 6-3, 7-5, 6-4). Le Suédois se hissera à nouveau en finale, et cette fois c’est Rafael Nadal qui le dominera en trois sets secs (6-4, 6-2, 6-4).
En 2011, il croisera Nadal plus tôt dans le tournoi, au stade des quarts de finales, et sera à nouveau battu en trois sets (6-4, 6-1, 7-6). Cette même année, il remportera son dernier tournoi à Bastad, dominant en finale David Ferrer (6-2 6-2) dans ce qui restera comme son dernier match. Atteint d’une mononucléose, il ne retrouvera jamais une forme suffisante pour revenir le circuit. Après avoir repoussé son retour quatre années durant, il finira par annoncer sa retraite en 2015.