6 juin 1999 : le jour où Andre Agassi a enfin triomphé à Roland-Garros
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Le 6 juin 1999, Andre Agassi triomphe enfin à Roland-Garros, huit ans après sa deuxième défaite en finale à Paris.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi c’est historique : Agassi remporte (enfin) Roland-Garros
Ce jour-là, le 6 juin 1999, Andre Agassi triomphe enfin à Roland-Garros, huit ans après sa deuxième défaite en finale à Paris. Pour parvenir à cet exploit, il s’impose en cinq manches, après avoir été mené deux manches à rien, à l’issue d’une finale dramatique contre Andrei Medvedev. En ajoutant les Internationaux de France à son palmarès, il devient le premier joueur à avoir remporté les quatre tournois du Grand Chelem au cours de sa carrière depuis Rod Laver en 1969 (qui les avait remportés la même année), et surtout le premier joueur de l’histoire à avoir gagné ces quatre tournois sur quatre surfaces différentes.
Les personnages : Andre Agassi et Andrei Medvedev
- Andre Agassi, la légende
Andre Agassi, le Kid de Las Vegas, est une légende du tennis. Passé pro en 1986, il devient rapidement l’une des plus grandes stars du tennis, grâce à son talent mais aussi à ses tenues vestimentaires originales, dont l’emblématique short en jean et le cycliste rose. Initié au tennis par son père puis élevé à l’académie de Nick Bollettieri, il dispose d’un excellent retour de service (le meilleur de son temps), et son jeu consiste à frapper la balle montante avec une force incroyable, ce qui est révolutionnaire à l’époque et inspirera des générations entières de tennismen.
Après trois défaites en finale de Grand Chelem, une à l’US Open en 1990, deux à Roland-Garros (1990 et 1991), il remporte son premier tournoi du Grand Chelem à Wimbledon en 1992, en en battant en finale le grand serveur Goran Ivanisevic (6-7 6-4 6-4 1-6 6-4). Il ajoute ensuite l’US Open 1994 à son palmarès, puis l’Open d’Australie 1995, où il bat son rival Pete Sampras en finale de Grand Chelem pour la seule et unique fois (4-6 6-1 7-6 6-4). Il devient numéro 1 mondial peu après, le 10 avril 1995, pour une première période de 30 semaines. En 1996 et 1997, malgré une médaille d’or obtenue aux Jeux Olympiques d’Atlanta, Andre Agassi traverse une mauvaise passe et descend jusqu’à la 141e place mondiale.
Faisant preuve d’une grande humilité, il retourne sur le circuit Challenger à la fin 1997 pour reprendre confiance. En 1998, il revient doucement au sommet, terminant l’année au 6e rang mondial malgré des résultats décevants en Grand Chelem. En 1999, son meilleur résultat avant Roland-Garros est une demi-finale perdue face à Jan-Michael Gambill à Scottsdale, et Agassi n’a disputé qu’un seul tournoi sur terre battue, à Rome, où il est éliminé en huitièmes de finale par Patrick Rafter. Lorsque débute Roland-Garros, il pointe à la 14e place mondiale.
- Andrei Medvedev, ancien top 5 sur le déclin
Andrei Medvedev est né en 1974 à Kiev. Après avoir gagné son premier tournoi à Gênes à l’âge de 17 ans, il perce très vite au plus haut niveau et connaît sa meilleure période en 1993-1994, avant même d’avoir fêté ses 20 ans. Lors de ces deux saisons, il devient le troisième joueur de l’histoire après Mats Wilander et Boris Becker à avoir touché plus d’un million de dollars de prix avant l’âge de 20 ans et remporte 5 de ses 11 titres en carrière. Il se montre particulièrement dangereux sur terre battue : à Roland-Garros, il atteint les demi-finales en 1993 et les quarts de finale en 1994 (battu à chaque fois par le futur vainqueur, Sergi Bruguera), et remporte deux Masters 1000 sur cette surface, à Monte-Carlo et Hambourg.
Le 5 mai 1994, il atteint la 4e place, qui restera son meilleur classement. Au cours des années suivantes, touché par toutes sortes de blessures (dos, épaule…), il quitte le top 10 mais reste un joueur redoutable du top 40, remportant deux fois de plus le Masters 1000 de Hambourg en 1995 et 1997, sans pour autant obtenir de résultats notables en Grand Chelem. En 1998, il chute au classement et en 1999, à cours de motivation, il arrive à Paris avec le dossard numéro 100 et n’a pas gagné deux matches d’affilée depuis le début de la saison.
Le lieu : Roland-Garros
L’histoire se déroule à Roland-Garros. Le stade, situé dans l’ouest parisien, à la lisière du bois de Boulogne, accueille les Internationaux de France depuis 1928. C’est le premier et désormais le seul Grand Chelem disputé sur terre battue, la surface la plus lente, ce qui en fait le tournoi le plus difficile sur le plan physique. Son Court Central, renommé Philippe-Chatrier (ancien président de la FFT) en 2001, dispose de 15000 places.
Les deux joueurs ont une relation spéciale avec Roland-Garros. Pour Andrei Medvedev, c’est le seul tournoi du Grand Chelem où il a atteint les demi-finales et dépassé plus d’une fois les huitièmes de finale. Pour Andre Agassi, c’est un lieu rempli de souvenirs douloureux. Le Kid de Las Vegas y a perdu deux finales consécutives en 1990 et 1991, à chaque fois en étant favori, contre Andres Gomez puis contre Jim Courier. Depuis, il a gagné les trois autres tournois du Grand Chelem et Roland-Garros est à présent le seul titre majeur qui lui manque.
Les faits : Mené deux sets à rien, Agassi a pris son destin en main
On peut affirmer sans problème que la finale de Roland-Garros 1999 propose une affiche des plus inattendues.
D’un côté, Andre Agassi. Deux ans plus tôt, il était retombé à la 141e place mondiale, avant de lentement remonter au sommet. L’Américain, deux fois finaliste à Paris, n’y a pas dépassé les huitièmes de finale depuis 1995, et il n’a pas dépassé le deuxième tour lors de ses deux dernières apparitions. Depuis ses jeunes années, son jeu a évolué pour devenir plus efficace sur dur, et sa saison sur terre battue a été bien courte pour un joueur qui aurait l’ambition de gagner le tournoi. D’ailleurs, dans son autobiographie, il racontera avoir dit à son coach, qui évoquait cette idée, qu’elle appartenait désormais au passé.
De l’autre côté, Andreï Medvedev. L’ancien prodige, frustré par les blessures et par ses mauvais résultats, est aujourd’hui 100e mondial, ce qui en fait l’un des derniers joueurs à être entré dans le tableau final en évitant les qualifications. Deux mois auparavant, à Monte-Carlo, il pensait mettre un terme à sa carrière. Il en est dissuadé par…Andre Agassi, qui lui remonte le moral lors d’une soirée tardive.
A présent, les deux hommes s’affrontent en finale de Roland-Garros. Andre Agassi a réussi à éliminer le tenant du titre, Carlos Moya, en huitièmes de finale (4-6 7-5 7-5 6-1). Medvedev a quant à lui vaincu le numéro 2 mondial, Pete Sampras, au deuxième tour (7-5 1-6 6-4 6-4), et Gustavo Kuerten, l’un des favoris du tournoi, en quarts de finale (7-5 6-4 6-4).
Avec leur histoire si particulière, les deux protagonistes entrent sur le court très tendus. Ils évoqueront tous deux plus tard les sueurs froides ressenties durant l’échauffement. A ce jeu, Medvedev est le premier à trouver son rythme. L’Ukrainien commence à jouer un très bon tennis tandis qu’Agassi reste planté sur le court, paralysé. En un rien de temps, Andrei Medvedev empoche les deux premiers sets, 6-1 6-2. Agassi est parti pour perdre une troisième finale de Roland-Garros, mais, alors que le troisième démarre, la pluie interrompt la partie. Agassi a l’occasion de se calmer et de parler à son entraîneur.
Après la pause, c’est un autre Agassi que retrouve Medvedev. Pourtant, l’Américain doit écarter une balle de break, presque une balle de match, à 4-4. Il la sauve courageusement à la volée. D’après ses propres souvenirs, il va alors s’asseoir au changement de côté et se dit : « Si seulement je joue quatre bons points, je vais gagner le set ». C’est exactement ce qu’il fait.
La dynamique s’inverse. C’est maintenant Agassi qui évolue à son meilleur niveau, prenant les balles montantes et baladant Medvedev aux quatres coins du court. Il domine les deux sets suivants et, après deux heures et cinquante-deux minutes de jeu, Medvedev rate un dernier retour. Agassi se prend la tête à deux mains. Douze ans après sa première participation, neuf ans après perdu sa première finale de Grand Chelem sur ce même court contre Andres Gomez, Andre Agassi a enfin gagné Roland-Garros.
La postérité du moment : Un renouveau pour Agassi
Cette année-là, après avoir échoué contre Sampras en finale de Wimbledon (6-3 6-4 7-5), Andre Agassi s’adjugera un second US Open et récupèrera la place de premier mondial pour 52 semaines supplémentaires. Par la suite, il ajoutera trois Open d’Australie à son palmarès (2000, 2001, 2003), portant ainsi à huit son total de titres du Grand Chelem, et apparaîtra pour la dernière fois au sommet du classement ATP le 7 septembre 2003. En 2005, à 35 ans, il disputera sa dernière finale en Grand Chelem à New-York, où il sera à nouveau vaincu par Federer (6-3 2-6 7-6 6-1). Ce n’est qu’en 2006 qu’il quittera le top 10 pour de bon. Cette année-là, il ne jouera que huit tournois et mettra un terme à sa carrière à Flushing Meadows. Après avoir livré un dernier combat épique pour dominer le 8e mondial Marcos Baghdatis (6-4 6-4 3-6 5-7 7-5), il sera éliminé par Benjamin Becker au troisième tour, 7-5 6-7 6-4 7-5.
Grâce à sa finale à Roland-Garros, Andrei Medvedev retrouvera le top 30 mondial et remontera jusqu’à la 20e place en mai 2000. Battu par le futur finaliste Magnus Norman en huitièmes de finale de Roland-Garros 2000, son classement ne cessera alors de baisser, d’autant plus qu’une blessure à la cheville l’obligera à stopper sa saison en juillet. De retour sur le circuit en 2001, il jouera de moins en moins souvent lors de la deuxième partie de saison et prendra sa retraite à la fin de l’année, après avoir battu un dernier top 10 à Saint Pétersbourg (Tommy Haas, vaincu 3-6 7-6 6-4) avant de perdre le dernier match de sa carrière face à Stefan Koubek (7-6 6-2).