29 janvier 2017 : Le jour où Federer a battu Nadal dans une légendaire finale de l’Open d’Australie
Le 29 janvier 2017, Roger Federer et Rafael Nadal se retrouvaient en finale de Grand Chelem pour la première fois depuis 2011, et le Suisse en profitait pour décrocher un 17e titre majeur, au bout d’une finale ébouriffante à l’Open d’Australie.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi c’est historique : Le retour au sommet de Federer
Ce jour-là, le 29 janvier 2017, Roger Federer, qui effectue son tournoi de reprise après une pause de six mois due à une blessure au genou, domine son ancienne bête noire Rafael Nadal en finale de l’Open d’Australie (6-4, 3-6, 6-1, 3-6, 6-3), remportant ainsi son premier titre du Grand Chelem depuis plus de quatre ans et Wimbledon en 2012.
À 35 ans, le Suisse remonte un break de retard dans le dernier set pour ajouter un 18e titre majeur à son palmarès. Quelques mois plus tard, il triomphera une nouvelle fois au All England Club, et en 2018, après avoir conservé son titre à Melbourne Park, il redeviendra numéro un mondial, près de six ans après sa dernière apparition au sommet du classement ATP.
Les personnages : ROGER FEDERER ET RAFAEL NADAL
• Roger Federer, l’ex-patron sur le retour
Roger Federer, le génie suisse, né en 1981, a 35 ans en janvier 2017. Il a dominé le jeu de la tête et des épaules dans les années 2000, surtout entre 2004 et 2008, en accumulant 12 titres du Grand Chelem ,avant que Rafael Nadal ne le défie pour la place de No 1 mondial. En 2009, après trois finales perdues contre sa bête noire espagnole, il triomphe finalement à Roland-Garros, en battant Robin Söderling en finale (6-1, 7-6, 6-4), réalisant ainsi le Grand Chelem en carrière grâce auquel il est alors considéré comme le plus grand joueur de tous les temps.
En 2011, Novak Djokovic prend les commandes du circuit. Federer, qui avait remporté 16 titres du Grand Chelem entre 2003 et 2010, ne soulève plus de grand trophée avant Wimbledon 2012. Au cours des quatre années suivantes, il a atteint trois finales de Grand Chelem, à Wimbledon (2014, 2015) et à l’US Open (2015), chaque fois battu par Djokovic.
En 2016, Federer, gêné par une blessure au genou, fait l’impasse sur Roland-Garros, avant d’être contraint de mettre un terme prématuré à sa saison après avoir perdu contre Milos Raonic en demi-finale au All England Club (6-3, 6-7, 4-6, 7-5, 6-3). Son retour au jeu est prévu pour l’Open d’Australie 2017.
• Rafael Nadal, le grand rival… lui aussi sur le retour
En 2017, Rafael Nadal, né en 1986, est l’un des trois joueurs en activité à avoir réalisé un Grand Chelem en carrière, avec Federer et Djokovic. Véritable Roi de la terre battue, il a déjà triomphé neuf fois à Roland-Garros entre 2005 et 2014, mais il a également remporté deux fois Wimbledon (2008, 2010), deux fois l’US Open (2010, 2013) et l’Open d’Australie en 2009.
En 2008, Nadal atteint pour la première fois la première place mondiale, un rang qu’il occupe alors pendant 46 semaines consécutives, puis 141 semaines au total. Mais depuis 2015, le gaucher espagnol ne connaît plus autant de succès. Lourdement battu par son rival Novak Djokovic en quart de finale de Roland-Garros en 2015 (7-5, 6-3, 6-1), il ne parvient pas en demi-finale d’un seul tournoi du Grand Chelem en deux ans, ce qui ne lui était jamais arrivé depuis ses deux premières années sur le circuit, alors qu’il était encore adolescent.
En 2015, Nadal retombe à la dixième place mondiale, son pire classement depuis plus de dix ans. Fin 2016, le champion du Grand Chelem à 14 reprises n’est plus que numéro 9 mondial. Son pire classement de fin d’année depuis 2004.
Le lieu : La Rod Laver Arena, Melbourne Park
Contrairement aux autres tournois du Grand Chelem, l’Open d’Australie (d’abord appelé Championnat d’Australasie puis Championnat d’Australie) a changé plusieurs fois de lieu au fil des ans. L’épreuve changeait même de ville chaque année avant de s’installer à Melbourne en 1972, et pas moins de cinq villes australiennes l’ont accueillie à au moins trois reprises : Melbourne, Sydney, Adelaide, Brisbane et Perth. Ses dates ont été assez mouvantes également, entre début décembre et fin janvier, faisant de l’Open d’Australie parfois le premier, parfois le dernier Grand Chelem de la saison.
Jusqu’en 1982, la plupart des meilleurs joueurs font l’impasse sur l’épreuve en raison de son éloignement et d’un prize-money peu attractif, mais à partir de la victoire de Mats Wilander en 1988, la dynamique change. Pour rendre le tournoi plus attractif, le comité du tournoi déploie d’énormes efforts qui mènent au déménagement de l’épreuve vers un nouveau site, Flinders Park (qui sera plus tard renommé Melbourne Park), à l’abandon du gazon pour des courts en dur, et à la construction du premier court central doté d’un toit rétractable. La dotation augmente également, et il ne faut alors que quelques années pour que l’Open d’Australie devienne le Grand Chelem préféré de nombreux joueurs.
L’histoire : l’improbable finale, l’invraisemblable scénario
S’il fut un temps où une affiche Federer-Nadal en finale d’un tournoi du Grand Chelem n’aurait surpris personne, c’est loin d’être le cas lors de l’Open d’Australie 2017. Ces derniers temps, aucun de ces deux champions, qui totalisent à eux deux 31 titres majeurs, ne s’est montré aussi impérial qu’au temps de leur splendeur. Tandis que Nadal, incapable d’atteindre le dernier carré d’un tournoi du Grand Chelem depuis Roland-Garros 2014, n’est plus que 9e mondial, Federer a mis un terme à sa saison 2016 juste après Wimbledon, et l’Open d’Australie marque son retour à la compétition après six mois d’arrêt.
À l’entame du tournoi, peu de connaisseurs pensent que les deux légendes se retrouveront en finale. Federer lui-même expliquera plus tard que dans son esprit, « un grand résultat aurait été d’atteindre les quarts de finale, et faire huitième aurait été sympa ».
Cependant, lorsque les deux premiers mondiaux, Andy Murray et Novak Djokovic, se font tous deux éliminer avant la fin des huitièmes de finale, le rêve de voir Federer affronter Nadal en finale commence à prendre forme dans l’esprit des amateurs de tennis. Pourtant, Nadal est poussé au cinquième set par Alexander Zverev dès le troisième tour (4-6, 6-3, 6-7, 6-3, 6-2), et Federer est sérieusement bousculé par Kei Nishikori en huitième de finale (6-7, 6-4, 6-1, 4-6, 6-3).
En demi-finales, les vieux rivaux sont tous deux amenés à se bagarrer à nouveau cinq sets durant. Federer prend le dessus sur son compatriote Stan Wawrinka (6-4, 3-6, 6-1, 3-6, 6-3), et Nadal domine Grigor Dimitrov sur le fil (6-3, 5-7, 7-6, 6-7, 6-4), faisant preuve une fois encore d’une combativité hors-norme. Les amateurs de la petite balle jaune sont aux anges : alors que personne n’y croyait plus, Federer va bien affronter Nadal en finale d’un tournoi du Grand Chelem, pour la première fois depuis Roland-Garros 2011.
Sois libre dans ta tête, sens-toi libre de tes coups. Va chercher les points.
Roger Federer
L’Espagnol mène alors 23-11 dans ses duels avec le Suisse. Même si la plupart de ses victoires ont été obtenues sur terre battue, il a battu Federer sur surface rapide en de nombreuses grandes occasions, notamment la finale de Wimbledon 2008 et celle de l’Open d’Australie 2009. Federer n’a gagné que 3 de leurs 10 derniers matchs. Bref, Federer ne part pas vraiment favori.
Pourtant, il apparaît rapidement que Federer applique une nouvelle stratégie. Peut-être inspiré par la tactique de Dimitrov en demi-finale, il joue moins de revers coupés que d’habitude, essayant de prendre la balle tôt des deux côtés pour éviter de subir le lift de Nadal.
« Je me suis dit de jouer libéré, dira Federer. Tu joues la balle, pas l’adversaire. Sois libre dans ta tête, sens-toi libre de tes coups. Va chercher les points. Le courage sera récompensé. Je ne voulais pas juste jouer des coups, et voir défiler les coups droits de Rafa. »
Malgré son superbe niveau de jeu, lorsque Federer se retrouve mené d’un break au cinquième set, il semble bien que sa bête noire d’antan soit sur le point de le priver, une fois de plus, d’un triomphe en Grand Chelem. Mais il est écrit que rien ne doit se passer comme prévu lors de cet Open d’Australie 2017. Remportant plusieurs points à couper le souffle, notamment un point fantastique à 4-3, 40A, le Suisse, non content de revenir dans la partie, breake Nadal à deux reprises et sert pour le titre à 5-3. Il décroche le titre sur un dernier coup droit gagnant, et, après avoir patienté quelques instants car Nadal a « challengé » l’annonce, il peut laisser libre cours à ses émotions : cinq ans après son dernier succès en Grand Chelem, il vient de remporter, pour la sixième fois, l’Open d’Australie.
« J’ai été envahi par mes émotions. Je ne peux comparer cela à rien, si ce n’est peut-être Roland-Garros 2009 », déclare Federer.
De son côté, Nadal, malgré la déception, est satisfait de son niveau de jeu et enthousiaste pour la suite de la saison.
« J’ai travaillé très dur pour en arriver là. Je me suis bien battu, peut-être que Roger méritait de gagner un petit peu plus que moi. Je vais simplement continuer à essayer. Je sens que je suis revenu à un très haut niveau. »
La postérité du moment : Federer redeviendra numéro 1
Roger Federer confirmera son retour au sommet, ajoutant un 19e titre du Grand Chelem à son palmarès à Wimbledon (en battant Marin Cilic en finale, 6-3, 6-1, 6-4), et un 20e à l’Open d’Australie 2018 (en battant Cilic à nouveau, 6-2, 6-7, 6-3, 3-6, 6-1). En février 2018, il reprendra la place de numéro un mondial, même s’il ne restera en tête du classement que quelques semaines.
Rafael Nadal avait raison : il était de retour à un très haut niveau. Dans les cinq années suivantes, il ajoutera huit titres du Grand Chelem à son palmarès, dépassant ainsi le record de Federer de 20 titres majeurs. L’Espagnol triomphera cinq fois à Roland-Garros (2017-2020-2022), établissant un incroyable record de 14 titres à Paris) deux fois à l’US Open (2017, 2019) et une fois à l’Open d’Australie (2022).