23 juillet 1992 : Le jour où McEnroe a perdu son dernier duel contre Lendl, son plus grand rival
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Le 23 juillet 1992, à Toronto, Ivan Lendl et John McEnroe jouaient le 36è et dernier opus de leur rivalité mythique.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi cela a marqué l’histoire du tennis
Ce jour-là, le 23 juillet 1992, à l’Open du Canada, à Toronto, Ivan Lendl et John McEnroe disputent le 36e et dernier épisode de leur célèbre rivalité. Non seulement ils étaient de féroces rivaux sur le court, mais leurs styles de jeu opposés et leurs personnalités les rendaient aussi différents que possible. Lors de cette dernière rencontre, quelques mois seulement avant que McEnroe ne prenne sa retraite, Lendl, qui n’a plus perdu contre son rival de toujours depuis trois ans, s’impose pour la 21e fois (6-2, 6-4).
Les acteurs : Ivan Lendl et John McEnroe
- Ivan Lendl, l’ancien “loser” devenu maître du monde
Né en 1960, Ivan Lendl est N°12 mondial en juillet 1992. Passé pro en 1978, il se pose dès 1980 comme l’un des quatre meilleurs joueurs au monde avec Bjorn Borg, John McEnroe et Jimmy Connors. Bien qu’il ait déjà remporté des dizaines de tournois ATP, dont le Masters 1981 en venant à bout de Vitas Gerulaitis (6-7, 2-6, 7-6, 6-2, 6-4), il ne parvient pas à décrocher un titre du Grand Chelem avant 1984. A vrai dire, il échoue à quatre reprises en finale, une fois à Roland-Garros (en 1981, battu par Björn Borg), deux fois à l’US Open (battu par Jimmy Connors, en 1982 et 1983) et une en Australie (battu par Mats Wilander en 1983).
En 1984, Lendl triomphe finalement à Roland-Garros en venant à bout de John McEnroe à l’issue d’une finale légendaire où il surmonte un handicap de deux sets. En 1985, il atteint la finale des Internationaux de France (battu une nouvelle fois par Wilander) mais à l’US Open, quelques semaines après être redevenu N°1 mondial, il décroche un deuxième titre du Grand Chelem aux dépens de John McEnroe (7-6, 6-3, 6-4).
Au cours des années suivantes, Lendl assoit sa domination sur le tennis mondial, s’adjugeant six tournois du Grand Chelem : Roland-Garros (1986, 1987), l’US Open (1986, 1987) et l’Open d’Australie (1989, 1990). Il ne parvient pas à triompher à Wimbledon, bien qu’il y atteigne la finale à deux reprises, en 1986 (battu par le jeune tenant du titre, Boris Becker, 6-4, 6-3, 7-5), et en 1987 (dominé par Pat Cash, 7-6, 6-2, 7-5). Au début des années 1990, la domination de Lendl est terminée, mais il demeure un solide joueur du top 15, qui a atteint les quarts de finale du dernier Open d’Australie.
- John McEnroe, le géne inclassable
John McEnroe, né en 1959, a occupé la place de N°1 mondial 170 semaines durant, entre 1980 et 1985. McEnroe est extrêmement talentueux. Son jeu est basé sur le toucher de balle et la précision, le tout agrémenté d’un service aussi original qu’efficace, souvent suivi au filet. Il est également célèbre pour son comportement, qui choque à l’époque le monde bien propre et policé du tennis. Ses querelles incessantes avec le corps arbitral dénotent dans un sport dit de “gentlemen”.
Le gaucher américain accumule sept titres du Grand Chelem : trois à Wimbledon (1981, 1983, 1984) et quatre à l’US Open (1979, 1980, 1981, 1984). En 1979, il était devenu le plus jeune vainqueur de l’histoire de l’US Open, en battant Vitas Gerulaitis en finale (7-5 6-3 6-3) et, en 1980, il dispute son match le plus célèbre en finale de Wimbledon, vaincu par Björn Borg en cinq manches après avoir remporté un incroyable tie-break au quatrième set (18-16).
Sa plus grande saison reste 1984, année au cours de laquelle, après une terrible défaite en finale de Roland-Garros, il remporte non seulement Wimbledon et l’US Open, mais aussi le Masters et la Coupe Davis, finissant l’année en N°1 incontesté avec 82 victoires pour seulement 3 défaites. Après 1984, la domination de McEnroe prend fin. En 1986, il s’éloigne même du circuit, le temps d’épouser Tatum O’Neal.
Depuis son retour, “Mac” n’est plus ce qu’il était. Il ne parvient à nouveau en demi-finale d’un tournoi majeur qu’à Wimbledon 1989 (battu par Stefan Edberg, 7-5, 7-6, 7-6). À l’Open d’Australie 1990, alors qu’il est encore 5e mondial, il se fait remarquer en étant le premier joueur de l’Ère Open à se faire disqualifier lors d’une épreuve du Grand Chelem. Son déclin se poursuit mais en juin 1992, alors qu’il n’est plus que 35e mondial, il réalise un beau parcours qui le mène en demi-finale de Wimbledon (battu par Andre Agassi, 6-4, 6-2, 6-3), et il remonte ainsi à la 17e place du classement ATP.
Le lieu : l’Open du Canada
L’Open du Canada, également appelé Rogers Cup, créé en 1881, est le deuxième plus ancien tournoi de tennis au monde, après Wimbledon. L’événement a lieu chaque été, alternativement à Toronto et Montréal : quand les hommes jouent à Montréal, les femmes jouent à Toronto, et vice-versa.
De 1970 à 1989, l’Open du Canada fait partie du prestigieux Grand Prix, puis, en 1990, quand l’ATP Tour devient l’unique circuit professionnel, il devient un Super 9, que l’on appellera ensuite Masters Series puis Masters 1000. Ivan Lendl y détient le record de titres (six, en 1980, 1981, 1983, 1987-89), tandis que John McEnroe s’y est imposé à deux reprises (1984, 1985).
L’histoire : Lendl a le dernier mot…
Lorsqu’Ivan Lendl et John McEnroe s’affrontent en quart de finale de l’Open du Canada 1992, c’est le 36e épisode de l’une des plus célèbres rivalités de l’histoire du tennis. Depuis leur première rencontre, remportée par McEnroe à Milan en 1980 (6-3, 1-6, 6-2), les deux légendes ont disputé trois finales de Grand Chelem, la plus célèbre étant celle de Roland-Garros en 1984, où Lendl a remporté son premier titre majeur en remontant un handicap de deux sets pour briser le rêve de McEnroe de s’imposer un jour à Paris (3-6, 2-6, 6-4, 7-5, 7-5). “Mac” prend sa revanche quelques mois plus tard en finale de l’US Open (6-3, 6-4, 6-1), mais en 1985, Lendl le domine largement pour triompher à Flushing Meadows (7-6, 6-3, 6-4).
Leur rivalité a été exacerbée par leurs styles de jeu si différents, McEnroe se précipitant au filet avec panache, tandis que Lendl détruit méthodiquement ses adversaires depuis le fond du court, mais aussi par le fait que, selon l’ancien joueur américain Bill Scanlon, il s’agit de “la rivalité la plus personnelle de l’ère Open”.
Il est bien connu que McEnroe a dit un jour : “J’ai plus de talent dans mon petit doigt qu’il n’en a dans tout son corps”, mais l’une des premières choses que le gaucher reprochait à Lendl était son penchant à viser son adversaire au filet. “Cela montre à quel point c’est un joueur de grande classe”, avait déclaré McEnroe. “Je n’ai aucun respect pour quelqu’un qui s’appliquerait à viser un joueur”. À l’époque, “Ivan le Terrible” avait répondu à cette plainte avec son sens de l’humour particulier : “C’est contraire au règlement de le frapper avec les poings.”
C’est pourquoi, malgré le fait qu’en 1992, Lendl mène 20-15 dans leur face-à-face et qu’il a remporté leurs cinq dernières rencontres sans perdre un seul set, une affiche opposant ces deux légendes est toujours alléchante. Même si, dans un tournoi où ils se sont affrontés deux fois en finale, il ne s’agit cette fois que d’un quart de finale, le public s’attend à une certaine tension.
Cependant, si tension il y a, elle est uniquement du côté de McEnroe. Le triple vainqueur de Wimbledon n’a pas battu Lendl depuis 1989, et cette fois-ci, il se trouve une fois de plus désemparé. Lendl conclut sa 21e victoire sur McEnroe d’un dernier coup droit gagnant pour accéder aux demi-finales de Toronto. Il ne le sait pas à ce moment-là, mais cela restera sa toute dernière rencontre avec le colérique gaucher.
La postérité du moment
Lendl parviendra en finale de l’Open du Canada, où il s’inclinera face au récent vainqueur de Wimbledon, Andre Agassi (3-6, 6-2, 6-0). Il remportera le dernier de ses 94 titres en 1993, à Tokyo, et prendra sa retraite à la fin de 1994, victime d’une blessure au dos.
McEnroe prendra sa retraite quelques mois après sa dernière rencontre avec son rival de toujours, à la fin de 1992.