22 octobre 1985 : Le jour où Arthur Ashe, usé par ses joueurs, a démissionné de son poste de capitaine de Coupe Davis
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Le 22 octobre 1985, Arthur Ashe démissionnait de son poste de capitaine de l’équipe de Coupe Davis des États-Unis.
Ce qu’il s’est passé ce jour-là et pourquoi cela a marqué l’histoire du tennis : La démission d’Arthur Ashe en Coupe Davis
Ce jour-là, le 22 octobre 1985, Arthur Ashe, fatigué de l’attitude de ses meilleurs joueurs, démissionne de son poste de capitaine de l’équipe de Coupe Davis des États-Unis. Le premier joueur noir à avoir fait partie de l’équipe américaine en était devenu le capitaine en 1981, et, sous sa direction, les États-Unis avaient remporté la compétition à deux reprises, en 1981 et 1982.
Le personnage : Arthur Ashe, le premier homme noir titré en Grand Chelem
Arthur Ashe est né en 1943 à Richmond, Virginie. Son père lui ayant interdit de pratiquer le football américain, le jeune Arthur se met ainsi au tennis sur des courts publics où son talent est remarqué par le meilleur joueur noir de Richmond, Ron Charity, qui lui apprend les bases du jeu avant de le présenter au Dr. Robert Walter Johnson. Johnson est le coach d’Althea Gibson, la première femme noire à avoir gagné des tournois du Grand Chelem, et il permet à Ashe d’atteindre un tout autre niveau tout en le préparant psychologiquement à affronter la ségrégation raciale. En 1963, Ashe devient le premier Afro-américian à remporter les Championnats nationaux junior en salle, et obtient ainsi une bourse à l’Université de Los Angeles (UCLA). Là, il peaufine son tennis en s’entraînant avec son idole, Pancho Gonzales, et la même année, il est le premier joueur noir à représenter les États-Unis en Coupe Davis.
Après avoir été deux fois finaliste malheureux de l’Open d’Australie, défait par Roy Emerson en 1966 (6-4, 6-8, 6-2, 6-3) et en 1967 (6-4, 6-1, 6-1), il devient finalement le premier homme afro-américain à gagner un tournoi du Grand Chelem en dominant Tom Okker en finale de l’US Open (14-12, 5-7, 6-3, 3-6, 6-3). Arthur Ashe remporte ensuite deux tournois du Grand Chelem supplémentaires, l’Open d’Australie 1970 (battant Dick Crealy en finale, 6-4, 9-7, 6-2) et Wimbledon 1975 (dominant en finale Jimmy Connors, 6-1, 6-1, 5-7, 6-4). De plus, l’Afro-Américain atteint deux autres finales majeures (en Australie et à Londres), et à la fin de sa carrière, en 1980, il compte 81 titres à son palmarès.
L’histoire : Ashe, fatigué par ses joueurs
Arthur Ashe est capitaine de l’équipe de Coupe Davis des États-Unis depuis 1981, ayant été nommé l’année suivant sa retraite sportive. Ses deux premières campagnes furent triomphales, son équipe remportant la compétition en 1981 et en 1982. En 1981, Ashe avait même convaincu Jimmy Connors, qui boudait la Coupe Davis depuis 1976, de faire partie de l’équipe lors du quart de finale contre la Tchécoslovaquie d’Ivan Lendl. Après une défaite précoce lors de l’édition 1983, Connors jouait le jeu à fond pour la première et unique fois de sa carrière, mais, malgré sa contribution, l’équipe avait perdu en finale contre la Suède (1-4).
En 1985, Connors annonce qu’il ne participera plus jamais à la Coupe Davis. Ashe, fatigué de devoir gérer les sautes d’humeurs de McEnroe, requiert l’établissement d’un code de conduite, et le numéro 1 mondial, qui s’était toujours impliqué pour son pays, et dont la motivation est fluctuante après une énorme saison 1984, décline sa sélection.
En mars, Ashe s’envole donc pour le Japon avec Eliot Teltscher et le jeune Aaron Krickstein, 18 ans, qui s’imposent 4-1. Toutefois, au mois d’août, et malgré l’appui d’une solide équipe de double (Flach et Seguso), son équipe ne fait pas le poids face à l’Allemagne de l’Ouest, emmenée par Boris Becker, qui balaie ses adversaires en simple. Les États-Unis s’inclinent, 3-2.
Vous ne pouvez pas sortir McEnroe parce qu’il se comporte mal. Vous ne pouvez pas infliger d’amendes. Vous faites juste avec les moyens du bord.
Arthur Ashe
Après cinq ans de bons et loyaux services, Ashe est agacé du comportement de ses meilleurs joueurs, et fatigué de devoir leur courir après afin qu’ils veuillent bien participer.
“Le plus difficile, c’était de ne pas toujours avoir les meilleurs joueurs américains disponibles pour la compétition”, explique Ashe.
“Un capitaine de Coupe Davis n’a pas la même autorité que Pat Riley (alors coach de l’équipe de basketball des Los Angeles Lakers)”, ajoute Ashe, cité par le Los Angeles Times. “Vous ne pouvez pas sortir McEnroe parce qu’il se comporte mal. Vous ne pouvez pas leur infliger d’amendes. Vous ne pouvez pas exclure un joueur de l’équipe simplement parce qu’il n’est pas apprécié. Vous faites juste avec les moyens du bord. Ils ne jouent qu’une fois ou deux par an. »
“Cela fait plusieurs semaines que j’ai décidé de quitter mon poste de capitaine”, annonce Ashe dans un communiqué. “J’ai pris cette décision dans l’intérêt de l’équipe, et aussi dans mon propre intérêt. »
La postérité du moment : les États-Unis devront attendre jusqu’en 1990 pour gagner à nouveau la Coupe Davis
Le nouveau capitaine de l’équipe américaine sera Tom Gorman. Les États-Unis ne gagneront à nouveau la Coupe Davis qu’en 1990. Cette année-là, les jeunes stars Michael Chang et Andre Agassi iront chercher la victoire finale en dominant l’Australie en finale.
Ashe, qui, à l’âge de douze ans, avait déclaré à son frère vouloir être « le Jackie Robinson du tennis », publiera en 1988 un livre en trois volumes intitulé A Hard Road to Glory: A History of the African-American Athlete (« Une route difficile vers la gloire : l’histoire de l’athlète afro-américain »), qu’il considérera comme un accomplissement bien plus important que n’importe lequel de ses triomphes sportifs. Arthur Ashe mourra en 1993 des suites du virus du SIDA, contracté au cours d’une transfusion sanguine dans les années 1980.