Borna Coric, le retour en grâce d’un ex-porte-drapeau de la NextGen

Autrefois désigné comme le prochain Novak Djokovic, Borna Coric a connu de nombreux hauts et bas dans sa carrière. Mais à l’approche de la fin de l’année 2020, il se dirige à nouveau vers le top 20 mondial et revient sur les plus grandes batailles de sa carrière jusqu’à présent.

Borna Coric Borna Coric

Septembre 2020, New York. Tous les regards convergent vers la coup de tonnerre du moment : la disqualification de Novak Djokovic. A quelques centaines de mètres, un autre événement tennistique passe inaperçu. Des années de travail acharné finissent par porter leurs fruits au moment où le Croate Borna Coric atteint son premier quart de finale du Grand Chelem, en battant Jordan Thompson en trois sets.

La route a été longue et chaotique, mais Coric n’a jamais douté de lui. La saison 2020, quoi que tronquée, est un bon cru pour le joueur de vingt-quatre ans. Il devait être un des leaders de la NextGen mais les choses ont mis du temps à se mettre en place.

2015, la Croatie joue un match de Coupe Davis à Kraljevo, en Serbie. Coric et moi sommes dans un vestiaire en train de discuter. Il vient d’avoir 18 ans il y a quelques mois, mais ce qui frappe déjà, c’est sa maturité et sa clarté, la même qui rayonne encore aujourd’hui.

“Je ne pense pas qu’il faille parler d’arrogance alors que j’énonce simplement et clairement mes objectifs”, dit-il alors.

Jusqu’alors, son ascension avait été fulgurante. En octobre 2014, Coric avait battu le numéro 3 mondial Rafael Nadal à Bâle pour atteindre les demi-finales. A la clef : une première apparition dans le top 100.

Borna Coric at RIo Open 2020

Borna Coric, star ATP de demain

Puis il est rapidement devenu l’un des 50 meilleurs joueurs du monde (jusqu’au 33e rang en août 2015), a reçu l'”ATP Star of Tomorrow” pour avoir été le plus jeune joueur du top 100. Déjà affleuraient les comparaisons avec Novak Djokovic. Coric s’est ensuite heurté à un mur dans sa progression.

“Je n’ai pas ressenti de pression supplémentaire honnêtement. La seule pression que je ressens, c’est quand je me regarde dans le miroir, j’ai besoin de savoir que j’ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour être le meilleur possible. Mais quand même, quand on s’habitue à entendre qu’on est le meilleur, qu’on est le prochain Novak ou le prochain Federer, mes attentes sont devenues irréalistes. J’ai pu pensé que j’allais être rapidement dans le top 10, mais ça ne marche pas comme ça”.

Bien qu’il ait remporté son premier titre ATP à Marrakech en 2017, Borna Coric a connu une période de creux pendant trois ans, loin du top 30. Sa couverture du terrain et son revers étaient encore merveilleux, mais il avait du mal à finir les points rapidement et ne parvenait pas à attaquer les balles plus courtes avec son coup droit. Son service avait également besoin d’être travaillé et, plus important peut-être, sa confiance a également été ébranlée lorsque les attentes initiales, très élevées, n’ont pas été satisfaites.

Pour ne rien arranger, le Croate a commencé à connaître des blessures et a subi une opération du genou en fin de saison en 2016. Connu pour son travail acharné, le joueur de 23 ans admet qu’il a connu des périodes de doute et qu’il a pu se détourner du tennis.

“Chaque corps est différent et cela fait partie du jeu. Oui, mon genou m’a tenu à l’écart pendant environ six mois, mais je n’étais pas entièrement professionnel. Je ne me consacrais pas vraiment au tennis comme j’aurais dû, donc je ne méritais pas d’avancer rapidement”.

Borna Coric and Stefanos Tsitsipas, US Open 2020

Changements d’encadrement

La stabilité est un élément-clef de réussite chez les professionnels de haut niveau. Mais Borna Coric n’en a jamais eue et a changé fréquemment d’entraîneur : Zeljko Krajan (2014-2015), Thomas Johansson (2015), Miles Maclagan (2016), Ivica Ancic (2016-2017), Riccardo Piatti et Kristijan Schneider (2017-2019), Antonio Veić (2019) et enfin son entraîneur actuel Martin Stepanek.

“Je ne vais pas le nier, c’était difficile de travailler avec moi avant. Maintenant, je suis plus facile à vivre. Mais je n’ai jamais vraiment été du genre à virer un entraîneur après deux défaites au premier tour. En fait, en regardant tous mes entraîneurs, il n’y en a eu qu’un seul où je sentais qu’on ne travaillait pas bien et j’ai décidé de mettre fin à notre collaboration. Avec tous les autres, il y avait des problèmes différents – des problèmes personnels de leur côté, l’incapacité à trouver un deal avec d’autres, ou le fait que le coach n’était pas en mesure de voyager assez souvent avec moi, des choses comme ça”.

Puis, le temps a filé et Coric a laissé la place à d’autres. Alexander Zverev, Stefanos Tsitsipas, Denis Shapovalov et une foule d’autres jeunes de la NextGen affichaient des résultats impressionnants en laissant le Croate loin derrière.

La percée et la blessure au dos

Le rebond est venu en 2018. Coric attribue ce renouveau de carrière à Piatti. Mais c’est avec Kristijan Schneider qu’une véritable osmose s’est créée. Le déclic a eu lieu lorsque le Croate a réussi à mener un set et un break à Federer en demi-finale d’Indian Wells avant de finalement s’incliner. Mais il a poursuivi sur ce rythme avec un quart de finale à Miami la semaine suivante, son premier titre en ATP 500 à Halle en battant Roger Federer en finale, et sa première deuxième semaine d’un Grand Chelem en perdant contre Juan Martin Del Potro en huitièmes de finale de l’US Open.

Contrairement à certains de ses “coups” dans le passé (contre Nadal, Andy Murray et d’autres), ces performances n’ont pas été considérées comme des coups d’éclat sans lendemain. Enfin, Coric s’en remettait à son instinct, n’hésitait pas à prendre l’initiative, tenait sa ligne de fond et s’octroyait des points gratuits sur son service.

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Le pic de cette période : un 12e rang au classement ATP après avoir réalisé une belle semaine lors du Masters 1000 de Shanghai, battant le champion en titre Federer jusqu’à une finale où il s’est incliné face à un Djokovic au sommet de sa forme. La cerise sur le gâteau a été sa victoire en Coupe Davis avec la Croatie.

Après avoir atteint les huitièmes de finale de l’Open d’Australie 2019 et les demi-finales à Dubaï, Coric semblait sur les bons rails pour accéder enfin au top 10. Mais une rupture soudaine avec l’entraîneur Schneider, due à des problèmes de santé et à des blessures, l’a empêché de franchir ce cap.

Le Croate a essayé de jouer malgré une douleur dans le bas du dos, ce qu’il a réussi à faire pendant un certain temps, mais il a finalement été contraint de dire stop en quart de finale de Halle en raison d’une tension trop puissante. Il a manqué Wimbledon et s’est retiré avant son deuxième match à l’US Open pour la même raison. Bien qu’il ait atteint la finale à Saint-Pétersbourg, la défaite au premier tour contre Andrey Rublev à Shanghai lui a fait finir l’année 2019 en dehors du top 20.

Cinq kilos de “pure masse musculaire”

Avec son nouvel entraîneur Martin Stepanek, qu’il décrit comme “un gars simple, tout comme (lui)”, Coric a reconstruit son physique et retrouvé la caisse que son jeu nécessite.

Au fil des années, Coric a appris la patience. Les hauts et les bas du début de la saison 2020, avant que la pandémie ne frappe, ne l’ont pas déstabilisé. Avec son compatriote croate Borna Gojo, Coric a passé six semaines dans une maison dans les montagnes près de Split. Ils disposaient d’une immense cour où ils pouvaient s’entraîner avant d’aller courir dans les montagnes. Résultat : 5 kilos de “pure masse musculaire” sans rien perdre de sa rapidité.

L’US Open a permis à cette caisse d’exploser au grand jour. Coric a parfaitement récupéré après son match de quatre heures et demie contre Stefanos Tsitsipas (et d’un match qui a duré quatre heures et 20 minutes contre Juan Ignacio Londero avant cela) pour battre Jordan Thompson en trois sets.

Il a bien perdu contre Zverev en quart de finale malgré un set et un break d’avance, mais une fois de plus, Borna Coric croit en son corps, sait qu’il peut courir toute la journée et ne plus craindre grand monde – le Borna Coric de 2018 est de retour, avec une dose d'”agressivité contrôlée” en plus.

“Mon agressivité dépend de nombreux facteurs. La surface, mon intuition, ma confiance ou non, si je bouge bien et si je me sens frais, si j’ai le bon feeling avec la balle, le style de jeu de l’adversaire… Beaucoup de choses entrent en considération, mais en général, je suis bien meilleur quand je suis agressif. Je n’en suis pas encore là, mais si je suis en bonne santé et capable de maintenir le niveau que j’avais à l’US Open, alors je peux me rapprocher du Top 10.”

Comme beaucoup d’autres joueurs, il a eu du mal avec la transition rapide vers la terre battue. La campagne a été décevante, avec une défaite décevante contre Norbert Gombos au premier tour de Roland-Garros. Mais le Croate a retrouvé son rythme sur dur, jouant brillamment à Saint-Pétersbourg pour se hisser en finale (perdue contre Rublev). Dans l’ensemble, cette année, Coric en est à 5-0 dans les sets décisifs, a autant gagné que perdu contre des joueurs mieux classés que lui (5-5) et a atteint une finale lors d’un tournoi ATP pour la cinquième saison consécutive.

Il n’aura que 24 ans en novembre et se voit sur le circuit ATP pour (au moins) dix années supplémentaires. Le meilleur est peut-être encore à venir pour Borna Coric.

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