9 mai 2000 : Le jour où Jim Courier a annoncé sa retraite
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Le 9 mai 2000, Jim Courier raccrochait avec quatre titres du Grand Chelem au palmarès, après un lent déclin au fil des années, malgré des exploits de fin de carrière.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi ça a marqué l’histoire du tennis : Courier, le premier de la génération dorée à dire au revoir
Ce jour-là, le 9 mai 2000, l’Américain Jim Courier, ancien numéro 1 mondial, annonce sa retraite, quelques mois avant de fêter ses trente ans. 67e mondial, il a pourtant dominé le tennis mondial au début des années 1990. Avec ses quatre titres du Grand Chelem, il fait partie d’une génération dorée du tennis américain qui laissera une empreinte dans l’histoire du jeu, avec ses collègues Pete Sampras, Andre Agassi et Michael Chang. Jim Courier a toujours été très attaché à la Coupe Davis, et quand les meilleurs joueurs américains ont uni leurs forces, ils y ont triomphé deux fois, en 1992 et en 1995. Courier est le premier de ces champions, qui ont presque grandi ensemble, à mettre un terme à sa carrière, six semaines après son dernier match, perdu face à Thomas Enqvist à Miami 6-7 6-3 6-4.
L’histoire : le déclin de la motivation de Jim Courier
Né en 1970, Jim Courier est l’un des nombreux joueurs formés à l’académie de Nick Bollettieri dans les années 1980. Il a développé un jeu atypique, avec des prises fermées et des préparations courtes semblables à celles d’un joueur de base-ball, dont il porte d’ailleurs toujours la casquette. S’appuyant principalement sur son service et son coup droit de décalage, il est connu pour son ardeur au travail, son engagement et sa forme physique.
Il est le dernier d’un « big four américain » qui fait forte impression sur le circuit : Andre Agassi est le premier à atteindre une demi-finale en Grand Chelem, à Roland-Garros, dès 1988 ; Michael Chang est le premier titré en Grand Chelem l’année suivante, lui aussi à Paris, rejoint par Pete Sampras qui s’impose à l’US Open en 1990. Bien que personne n’imagine alors Jim Courier en leader de cette génération, il se révèle à son tour en Grand Chelem en 1991, en s’imposant à Roland-Garros face à Andre Agassi (3-6, 6-4, 2-6, 6-1, 6-4). Commence alors sa grande époque, 1991-1993, où il deviendra, à 22 ans, le plus jeune joueur de l’histoire du tennis à atteindre la finale de tous les tournois du Grand Chelem. Courier en dispute sept sur dix possibles entre Roland-Garros 1991 et Wimbledon 1993, match de la prise de pouvoir de Pete Sampras sur le tennis mondial.
• Roland-Garros 1991 : Courier bat Agassi en finale
• US Open 1991 : Edberg bat Courier en finale
• Open d’Australie 1992 : Courier bat Edberg en finale
• Roland-Garros 1992 : Courier bat Korda en finale
• Open d’Australie 1993 : Courier bat Edberg en finale
• Roland-Garros 1993 : Bruguera bat Courier en finale
• Wimbledon 1993 : Sampras bat Courier en finale
Il devient numéro 1 mondial en février 1992, une place qu’il occupera au total 52 semaines.
Durant ces années, il soulève quatre trophées majeurs. Il parvient à défendre son titre Porte d’Auteuil en 1992, écartant en route plusieurs futurs vainqueurs de Grand Chelem, dont Petr Korda en finale (7-5, 6-2, 6-1). Il remporte l’Open d’Australie deux fois d’affilée, en 1992 et 1993, en battant à chaque fois son rival Stefan Edberg en finale. En 1991, il avait atteint également la finale de l’US Open, où Edberg avait livré une partie de rêve pour le dominer 6-2, 6-4, 6-0.
Le milieu de la saison 1993 marque probablement le tournant de sa carrière. Parvenu pour la troisième fois consécutive en finale de Roland-Garros, il doit céder sa couronne à l’Espagnol Sergi Bruguera après une bataille de terre battue acharnée qu’il perd 6-4, 2-6, 6-2, 3-6, 6-3.
Un mois plus tard, il s’incline à Wimbledon dans une nouvelle finale de Grand Chelem qui sera aussi sa dernière, défaite contre Pete Sampras à la clé (7-6, 7-6, 3-6, 6-3). A partir de là, Jim Courier décline régulièrement, et sa motivation fluctue. Battu par Cédric Pioline, à la surprise générale, en huitième de finale de l’US Open (7-5, 6-7, 6-4, 6-4), il craque quelques mois plus tard, est éliminé d’entrée du tournoi de Bercy et déclare : « En ce moment, ma meilleure surface, c’est mon lit ». En novembre de la même année, opposé à Andrei Medvedev au Masters de Francfort, il se met à lire un roman lors d’un changement de côté, bien loin de sa concentration et de son implication habituelle : « C’est un livre intéressant. J’avais simplement envie de le lire », se contente-t-il d’expliquer.
En 1994, malgré de bons résultats, notamment une demi-finale à Roland-Garros (où il bute à nouveau sur Bruguera), il touche le fond pendant l’été et songe à s’éloigner un temps du circuit. Voici son état d’esprit après une défaite contre Alex Corretja : « C’est entièrement ma faute. J’ai raté quelques coups, et je suis sorti du match. Je suis fatigué, physiquement, mentalement et émotionnellement. Je tape bien dans la balle. J’ai un problème plus profond, je ne sais pas vraiment lequel. La seule façon de savoir, c’est de prendre un peu de recul. »
Au cours des cinq dernières années de sa carrière, il ne remporte que cinq tournois, sur les 23 glanés sur l’ensemble de sa carrière. Il accomplit un dernier exploit lors d’une rencontre de Coupe Davis contre la Grande-Bretagne en 1999 : le vendredi, il remporte un premier match marathon face au 7e mondial Tim Henman (7-6, 2-6, 7-6, 6-7, 7-5), avant de venir à bout, le dimanche, du 11e mondial Greg Rusedski à l’issue d’un cinquième match épique (6-4, 6-7, 6-3, 1-6, 8-6).
Début 2000, il végète à la 67e place du classement ATP. Sa motivation est au plus bas, ce qui le pousse à raccrocher ses raquettes. Il déclare ainsi, selon The Independent :
« Un sage m’a dit un jour : lorsque tu te réveilleras le matin et que tu n’auras plus envie de progresser au tennis, alors il sera temps d’arrêter. Cela fait près d’un an que c’est le cas. Je suis allé au charbon pendant douze ans sans prendre de repos. C’est peut-être pour ça que j’arrête avant les autres. Mes réserves sont limitées, je suis à sec. »
Jim Courier a aussi livré quelques moments amusants, sur et aussi en-dehors du terrain. Il célèbre ainsi ses deux titres en Australie par un plongeon dans la Yarra River, et s’intoxique la deuxième fois en raison de la pollution de l’eau. En 1993, il sermonne (en français !) un spectateur qui lit son journal en plein match. Il se fait également apprécier du public parisien en essayant de faire ses discours en français. Il est souvent un « bon client » en conférence de presse, où il fait parfois des sorties inattendues.
La postérité du moment : Courier ne s’éloignera pas du tennis
Après sa retraite, Jim Courier restera impliqué dans le tennis en devenant commentateur pour plusieurs chaînes de télévision. Ses interviews sur le terrain deviendront célèbres en raison de son sens de l’humour et de son tact d’ancien champion. En 2010, il deviendra capitaine de l’équipe de Coupe Davis américaine, pour une durée de huit ans. Sous son capitanat, l’équipe parviendra deux fois en demi-finale. Il quittera son poste après une défaite contre la Croatie en 2018.
Le reste du big four américain partira progressivement à la retraite, de différentes façons. Pete Sampras terminera sa carrière en 2002, après un dernier titre glorieux à l’US Open ; Michael Chang prendra sa retraite en 2003, après avoir lentement décliné ; Andre Agassi sera le dernier, atteignant une dernière finale à l’US Open en 2005, à l’âge de 35 ans, avant de raccrocher à son tour en 2006. Ces grands joueurs ne seront pas remplacés et le tennis américain attend toujours une génération capable de rivaliser avec eux.
Jim Courier sera intronisé au Hall of Fame en 2005.