7 mai 2008 : Le jour où Ferrero est devenu le premier joueur à battre Nadal à Rome
Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Le 7 mai 2008, Juan Carlos Ferrero est devenu le premier joueur à battre Rafael Nadal à Rome.
Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi c’est historique : Ferrero bat Nadal et rentre dans l’histoire
Ce jour-là, le 7 mai 2008, Juan Carlos Ferrero parvient à renverser le roi de la terre battue Rafael Nadal, triple vainqueur de Roland-Garros, qui n’avait perdu qu’un seul match sur terre depuis trois ans. C’est la première fois de sa carrière que Nadal connaît la défaite à Rome, et c’est aussi la première fois en cinq confrontations que Ferrero le domine sur ocre. « El Mosquito » restera le seul joueur à avoir battu Rafa sur sa surface préférée cette année-là.
Les personnages : Rafael Nadal et Juan Carlos Ferrero
- Rafael Nadal, “The King of Clay”
En 2008, Rafael Nadal, 22 ans et numéro 2 mondial, paraît presque imbattable sur terre battue. Invaincu sur ocre depuis sa défaite contre Roger Federer à Hambourg l’année précédente, il n’a en outre subi, depuis 2005, que 4 défaites pour un total de 117 victoires sur sa surface de prédilection. Triple tenant du titre à Roland-Garros, l’Espagnol vient de remporter deux tournois de suite, à Monte-Carlo et Barcelone, devenant le premier joueur à inscrire quatre fois son nom au palmarès de chacune de ces épreuves. Cette année, peut-être en raison de sa volonté de progresser sur gazon, Nadal joue de manière plus agressive, mettant encore plus de pression dans l’échange à des adversaires réduits à l’impuissance. Il apparaît désormais comme le joueur de terre battue ultime. Il n’a encore jamais été défait à Rome, remportant les éditions 2005, 2006 et 2007.
- Juan Carlos Ferrero, “El Mosquito”
Né en 1980, Juan Carlos Ferrero, surnommé « El Mosquito » (le Moustique), a connu ses plus belles années entre 2000 et 2003. A cette époque, il était considéré comme l’un des meilleurs joueurs du monde sur terre battue : avec un rapport victoires-défaites de 111 à 25, il y avait remporté trois de ses quatre titres en Masters 1000, et affichait un ratio de 23 victoires pour trois défaites à Roland-Garros, où il avait atteint la finale en 2002 avant de s’imposer en 2003 face à Martin Verkerk (6-1, 6-3, 6-2). Cette année-là, en 2003, il était même devenu numéro 1 mondial au mois de septembre, après avoir atteint la finale à l’US Open, vaincu par Andy Roddick (6-3, 7-6, 6-3), qui allait également le remplacer au sommet du classement ATP huit semaines plus tard. Ferrero avait bien commencé la saison 2004, éliminé seulement en demi-finales de l’Open d’Australie par Roger Federer (6-4, 6-1, 6-4), avant que la varicelle, puis une blessure au poignet, ne viennent ruiner sa saison. Sorti du Top 10 en septembre, il ne parviendra jamais à y revenir. Solide joueur du Top 30, bien que toujours capable de coups d’éclat occasionnels, il évolue désormais bien loin de sa grandeur passée.
Les deux joueurs se sont déjà affrontés à quatre reprises sur terre battue, et c’est le gaucher qui a pris le dessus à chaque fois. Leur dernière rencontre remonte à seulement quelques semaines, à Monte-Carlo, où Nadal avait facilement disposé de son aîné (6-4, 6-1).
Le lieu : Le Foro Italico, à Rome
Les Internationaux d’Italie ont lieu à Rome depuis 1935, au Foro Italico, un complexe sportif immense destiné initialement à soutenir la candidature de l’Italie pour accueillir les Jeux Olympiques de 1940. Classé dans la catégorie des Masters 1000, c’est aujourd’hui encore l’un des tournois les plus prestigieux sur terre battue. Presque tous les plus grands joueurs de l’histoire du tennis ont foulé les courts du Stadio del Tennis.
Les deux joueurs ont gagné le tournoi par le passé : Juan Carlos Ferrero a soulevé la coupe en 2001, après avoir vaincu Gustavo Kuerten en finale (3-6, 6-1, 2-6, 6-4, 6-2), tandis que Rafael Nadal a dominé les trois dernières éditions du tournoi (2005, 2006, 2007).
L’histoire : Diminué par de sévères ampoules, Nadal ne peut résister aux piqûres du “Moustique”
Au tournoi de Rome en 2008, il n’y a qu’un seul favori au centre de toute l’attention : Rafael Nadal. Le gaucher semble simplement invincible. Pour son premier match, au deuxième tour, il doit affronter Juan Carlos Ferrero, 23e mondial. L’époque où le vainqueur de Roland-Garros 2003 dominait le tennis mondial semble aujourd’hui bien lointaine. Les deux joueurs viennent juste de se rencontrer à Monte-Carlo, et Nadal y avait écrasé son compatriote, aussi impuissant que les autres. Face à la toute-puissance du Taureau de Manacor, personne n’est prêt à miser gros sur « El Mosquito ».
Néanmoins, Ferrero est toujours redoutable, même s’il ne fait plus partie du Top 10, et sa combativité est intacte. Il n’entre pas sur le court pour admirer son adversaire. Son jeu de jambes est agile, son coup droit aussi précis qu’à sa grande époque, et dès les premiers points du match, il se montre agressif, multipliant les revers sautés pour contenir le lift de Nadal. Comme prévu, les joueurs se lancent dans des échanges du fond de court assez brutaux, Nadal essayant d’enfermer Ferrero sur son côté revers. Les Espagnols restent au contact, 1-1, 2-2, 3-3.
Mais dans le box de Rafa, les visages sont graves. Quelque chose ne tourne pas rond. Ils savent que leur protégé a du mal à se déplacer, victimes de sévères ampoules apparues à Barcelone. Ceux qui l’ont vu éparpiller ses adversaires la semaine précédente voient bien, eux aussi, qu’il joue plus court que d’habitude, juste assez pour permettre au « Moustique » de piquer encore et encore. Ferrero n’est peut-être plus le grand joueur qu’il fut autrefois. Mais il prend sa chance, s’installe à l’intérieur du terrain et dicte le jeu avec son coup droit, sans hésiter à monter au filet à contretemps. Malgré les efforts désespérés de Nadal, son aîné empoche le premier set 7-5.
Nadal a beau se faire soigner à deux reprises, cela ne suffit pas à le sauver. Il est trop diminué pour battre un joueur de cette trempe et s’effondre au deuxième set, qu’il perd 6-1. Pour la première fois à Rome, quelqu’un est venu à bout de Nadal. Son nom : Juan Carlos Ferrero.
La postérité du moment : Nadal étendra ses succès au gazon, Ferrero ne retrouvera jamais les sommets
C’est ainsi que Nadal revient sur son match en conférence de presse : il paye la rançon du succès, il a trop gagné et son corps l’a trahi. Pas pour bien longtemps. La semaine suivante, il gagnera le tournoi de Hambourg, en battant Roger Federer en finale (7-5, 6-7, 6-3). Quelques semaines plus tard, sa prestation à Roland-Garros sera un véritable chef d’œuvre. Il remportera le tournoi sans perdre un set, et infligera une défaite cuisante à son rival Federer en finale (6-1, 6-3, 6-0). Un mois plus tard, il réalisera un exploit mémorable : il battra le Suisse dans son propre jardin pour remporter Wimbledon (6-4, 6-4, 6-7, 6-7, 9-7), devenant ainsi le premier joueur depuis Bjorn Borg à réaliser le doublé Roland-Garros-Wimbledon. En août, Nadal s’appropriera la place de numéro 1 mondial.
Juan Carlos Ferrero sera éliminé du tournoi de Rome au tour suivant par Stan Wawrinka, alors âgé de 23 ans et 24e mondial (6-4, 6-3). Malheureusement pour lui, être le seul joueur de l’année à battre Nadal sur terre battue sera sa plus grande performance en 2008, car la suite de sa saison tournera au cauchemar. Après avoir abandonné au premier tour de Roland-Garros, face à Marcos Daniel, en raison d’une blessure à la jambe, il jettera aussi l’éponge à Wimbledon, touché aux ischio-jambiers lors de son deuxième tour contre Mischa Zverev. Blessé à l’épaule, il sera contraint de renoncer à l’US Open. Il ne disputera ensuite que trois tournois à l’automne et sortira du Top 100 en février 2009. Cette année-là, il atteindra pour la dernière fois les quarts de finale d’un tournoi du Grand Chelem, à Wimbledon, où il sera éliminé par Andy Murray (7-5, 6-3, 6-2), et prendra part à la victoire espagnole en Coupe Davis. Il se maintiendra dans le Top 30 jusqu’en 2011, quand une nouvelle série de blessures le tiendra éloigné des courts pendant sept mois. Après un dernier effort pour remonter jusqu’à la 37e place mondiale en juillet 2012, il prendra sa retraite au mois d’octobre, après une défaite contre Nicolas Almagro (7-5, 6-3) à Valence, devant son public. Bien des années plus tard, en septembre 2018, il deviendra coach du prodige Carlos Alcaraz.