Dimitrov (entretien exclusif) : “J’ai eu une forme sévère de la COVID-19”
Battu deux fois en deux matchs lors de la deuxième édition de l’Ultimate Tennis Showdown, Grigor Grigor Dimitrov souffre encore des conséquences de sa Covid-19 contractée à l’Adria Tour. Il a détaillé son expérience à Tennis Majors.
Grigor, tu as perdu tes deux premiers matchs à l’UTS contre Richard Gasquet et Feliciano Lopez. C’est sûrement difficile à encaisser…
C’est toujours difficile de perdre mais, honnêtement, je ne pouvais pas gagner. Je n’attendais pas grand chose de moi après le peu d’entraînement que j’ai eu. J’ai tâché de me concentrer sur le nouveau format et de profiter de la compétition. J’ai été éloigné des terrains pendant un mois, je cherche surtout à me remettre sur pied et à piocher des informations utiles pour la suite. Je bouge de mieux en mieux. Tout le reste progresse aussi. Mais assurément je ne suis pas prêt, pas compétitif au niveau où j’espère être. J’avance, mais ce n’est pas facile de se remettre de la maladie que j’ai eue.
J’ai envie de rester positif désormais. Le format de l’UTS permet de savoir où en est sur le plan cardio. Evidemment, ce n’est pas facile de revenir à la compétition avec un tel format. [Contre Gasquet], c’était un match compliqué, j’ai essayé de changer des choses [contre Lopez]. C’est vraiment dommage d’avoir perdu. Je n’ai pas eu beaucoup de chance non plus sur les quelques occasions que j’ai eues. J’ai voulu l’emporter, je pense que j’ai eu des opportunités, mais je n’étais pas prêt pour jouer à mon meilleur niveau. Je ne vais pas me trouver d’excuses, je l’assume. Avoir passé autant de temps chez moi n’a pas aidé. Après, pour moi, la santé a toujours été la priorité numéro un dans ma carrière.
Tu t’es incliné sur une double-faute contre Feliciano Lopez. Ça montre que mentalement, c’est une compétition comme les autres pour toi ?
Pour nous, c’est toujours une compétition, peu importe si c’est ici ou ailleurs et peu importe le niveau. Vous savez, je n’ai pas beaucoup été sur le court ces derniers temps, donc je ne contrôle pas mes coups du mieux que je peux. Je n’avais jamais joué le soir. Ce sont mes premiers matches depuis mon retour. Mais je n’ai pas d’excuses à trouver. Je dois tirer le positif de tout ça. Ça va me donner un peu de travail à la maison. Je vais plus m’entraîner, regarder où je peux progresser et passer des heures pour travailler mon physique. J’ai eu des soucis à l’épaule l’an dernier, et cette année, j’ai été touché par le virus. Donc, je dois trouver un moyen pour continuer de progresser. Rester positif est l’une des choses les plus importantes à faire, surtout sur des compétitions comme celles-ci.
Dimitrov : “J’ai perdu trois kilos, donc revenir à la normale va prendre du temps”
Comment te sens-tu physiquement ?
Je suis un peu fatigué, je ne vais pas mentir. Le format ici, un quart-temps de 10 minutes, pompe de l’énergie. Vous pensez que ça va vite, mais il n’y a que 15 secondes entre les points. C’était important pour moi de voir comment je me sentais physiquement, comment je me sentais et où je pouvais progresser. Je ne m’entraîne que depuis une semaine. J’ai perdu trois kilos, donc revenir à la normale va prendre du temps. Pour le moment, je ne peux pas tout mettre en place, donc je dois travailler avec mes moyens actuels.
A quel pourcentage de ta forme optimale es-tu ?
Oh là, j’en suis loin. J’ai subi une forme sévère du virus, j’ai été cloîtré chez moi pendant un mois sans pouvoir jouer. Je ne sais pas grand chose de la suite, sinon que la route est encore longue pour moi. Je sais ce qui m’attend. Je serais heureux de progresser rapidement, mais je ne sais pas si cela va se produire.
Avec quelle intensité as-tu pu t’entraîner depuis que tu es négatif au coronavirus ?
C’est difficile à quantifier. Je n’en suis pas vraiment capable. Chaque jour est une aventure. Même si je suis fatigué, je fais de mon mieux pour progresser. Je ne peux pas trop anticiper. Parfois je peux rester dehors quatre heures pour m’entraîner. Et le lendemain, d’un coup, je suis crevé et je dois faire une sieste. Ces étapes sont des passages obligés. J’espère me remettre complètement et retrouver un jour le plus haut niveau.
Dimitrov : “Je respirais mal, j’étais fatigué, je n’avais pas de goût ni d’odorat”
Tu as parlé d’une “forme sévère” du virus. Comment cela s’est-il manifesté ?
Chacun vit le virus a sa façon mais je crois que j’ai eu tout ce qu’on peut avoir : je respirais mal, j’étais fatigué, je n’avais pas de goût ni d’odorat. Ce n’était pas marrant. Mais je peux mesurer la chance que j’ai d’être sur le court en ce moment. Je ne prends plus rien pour acquis, même le simple fait d’être là. Ce n’est pas une période facile pour les joueurs professionnels, sans tournoi. J’ai de la chance d’avoir l’UTS.
T’es-tu inquiété pour la suite ? As-tu pensé que ça pouvait devenir très sérieux ?
Bien sûr. Tu passes vingt jours seul, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Fais le calcul. J’ai dû passer cinq-milles heures seul, à avoir envie de dormir. Forcément, tu cogites beaucoup. C’est inévitable d’avoir des pensées négatives dans ces moments-là, quelle que soit ta force mentale de sportif de haut niveau. Ça s’ajoute au reste. Si cette mésaventure me donne envie de passer un message, c’est le suivant : il ne faut pas sous-estimer les répercussions de nos choix individuels. Ce virus, c’est du sérieux. Et si on prend les bonnes précautions et que tout le monde fait attention, la situation s’améliorera. On traverse une période très étrange, où on doit veiller à rester solides physiquement mais aussi mentalement.
Dimitrov : “Je n’aime pas que les choses changent”
Que penses-tu de l’UTS ?
J’ai vraiment apprécié être ici. J’adore le côté “compétition” de l’UTS, c’est la raison pour laquelle nous sommes ici, pour rivaliser et essayer de jouer avec ces règles. Ce n’est pas à moi de décider, mais ce serait bien de faire une enquête pour voir ce que les gens en pensent.
Est-ce que tu intégrerais des concepts de l’UTS sur le circuit ?
Il y a des choses intéressantes. Le fait de ne pas s’échauffer et d’aller directement sur le court, ça pourrait être intégré sur le circuit. Je ne suis pas sûr que les joueurs adhéreraient aux 15 secondes entre chaque point. Ça ne me dérange pas, mais je pense que beaucoup de joueurs auraient du mal avec ça.
Que penses-tu du coaching pendant les matches, une mesure défendue par Patrick Mouratoglou ?
Personnellement, je n’aime pas quand les choses changent. J’en ai discuté avec Patrick, on voit les choses un peu différemment. J’aimerais penser que c’est une excellente idée, mais je ne suis pas pour. La raison est simple : j’apprends depuis que je suis enfant. Tu es seul sur le terrain, tu dois trouver un moyen de gagner. Je sais que c’est l’un des endroits les plus solitaires de la planète quand tu es sur le court, mais je pense que c’est aussi la passion du jeu. Pour nous, le plus difficile est de trouver la solution, comment battre l’adversaire… Le tennis est devenu un sport mental. Tout le monde peut frapper un coup droit et un revers, tout le monde bouge bien, il y a tellement de choses que tout le monde peut faire. Avec quelques conseils par ci par là et le coaching, les choses pourraient être différentes.
Penses-tu que ce n’est pas le meilleur joueur qui en profiterait le plus ?
Les joueurs ont tous une approche du différente du coaching. Certaines personnes adorent interagir, d’autres veulent simplement avoir quelques personnes autour d’elles.
Vas-tu disputer l’US Open ?
Je n’ai pas encore décidé. Je ne sais pas si je vais pouvoir récupérer rapidement pour que je puisse de nouveau prendre l’avion et soumettre mon corps à un régime vraiment rigoureux. Ce serait ambitieux pour moi de jouer l’US Open, mais je ne sais pas comment mon corps va réagir. Je vais voir. Je pense que beaucoup de joueurs ne savent pas quoi faire. Je pense qu’on doit se réunir avec nos staffs respectifs pour discuter de la possibilité de jouer ou non. N’oubliez pas que la quarantaine sera un gros problème pour tout le monde. Je pense qu’il y a trop de questions avec très peu de réponses en ce moment. Tout le monde est dans le même bateau. Une fois qu’on en saura plus, tout le monde va évaluer la situation et prendre la meilleure décision.