Ultimate Tennis Showdown : le retour du tennis, et comment il aurait lieu
Le lancement de l’Ultimate Tennis Showdown par Patrick Mouratoglou veut dire que le tennis professionnel sera de retour dans moins de trois semaines. Cela soulève de nombreuses questions.
Cet article est une version raccourcie et traduite de celui publié sur la version anglaise de notre site.
L’Ultimate Tennis Showdown est-il un concurrent de l’ATP et de la WTA ?
Le circuit UTS (Ultimate Tennis Showdown) s’inscrit clairement hors des circuits ATP et WTA, mais Patrick Mouratoglou ne l’a pas présenté comme un concurrent à l’ATP et au WTA. Il souhaite d’ailleurs dialoguer avec eux : “J’aimerais m’asseoir avec l’ATP et le WTA tous ensemble dans quelques mois et réfléchir à la façon dont nous pouvons faire durer cela pour les années à venir“.
Mouratoglou a utilisé le mot “laboratoire” pour décrire son initiative, où il pourra expérimenter les idées qu’il a pour révolutionner l’expérience du tennis : “coaching, interactions avec les fans, expression des émotions”.
L’entraîneur français n’a pas précisé s’il y aura une compétition féminine, mais il a mentionné deux fois la WTA dans son interview avec Josh Cohen, ce qui laisse à penser que oui à l’avenir.
Dans une lettre envoyée à tous les joueurs, entraîneurs et agents ATP, l’ATP a donné une première réponse positive à la création de ces “matches et tournois d’exhibition organisés à titre privé“. “Nous comprenons qu’il s’agit d’opportunités attrayantes pour beaucoup d’entre vous, désireux de jouer et de gagner des revenus“, a admis l’ATP, ajoutant que ces évènement “non officiels” sont “bienvenus”.
Les meilleurs joueurs seront-ils vraiment intéressés pour participer à l’UTS ?
On connaît déjà l’identité des quatre premiers joueurs qui participeront à l’UTS à partir du 16 mai : le Belge David Goffin, l’Australien Alexei Popyrin – annoncés par Patrick Mouratoglou -, le Français Benoît Paire et l’Italien Fabio Fognini – annoncés par le compte twitter de la compétition.
Are. You. Not. Entertained?!@benoitpaire is in.#UTShowdown pic.twitter.com/Lbs6RjueSe
— UTS Tour (@uts_tour_) April 19, 2020
Mouratoglou a suggéré que plusieurs des meilleurs joueurs du monde allaient participer à la compétition : “Il y aura dix joueurs de haut niveau“, a-t-il déclaré à Josh Cohen. Pour les cinq premiers week-ends de son championnat, il compte sur des joueurs géographiquement proches de son Académie, basée près de Sophia-Antipolis. Il mentionne en particulier les “joueurs français“, et “Monte-Carlo”, où de nombreux joueurs étrangers sont établis.
L’UTS aura sans doute du mal à compter sur la participation de Rafael Nadal, qui a fait part de son intention de lancer un tournoi prochainement dans son Académie de Manacor, en Espagne.
Le Grec Stefanos Tsitsipas semble plus susceptible de participer. Il s’entraîne dans l’équipe de Patrick Mouratoglou, et se trouve ainsi déjà sur le site de la compétition.
L’entraîneur de Serena Williams a expliqué que la création de cette compétition vise également à aider les joueurs moins bien classés à gagner plus d’argent et à pouvoir vivre du tennis. Il a affirmé que “l’UTS peut être une solution” pour eux. “Nous voulons re-distribuer beaucoup plus et nous le ferons, afin d’aider les joueurs qui sont en dessous de 100 ATP et WTA à gagner plus d’argent sur le long terme“.
Toutefois, alors que le calendrier du tennis est déjà surchargé, la création de l’Ultimate Tennis Showdown impliquerait – après le confinement – un chevauchement avec les événements des circuits ATP et WTA, ce qui implique que les joueuses et joueurs fassent un choix.
Une chose est certaine: dès que la pandémie de Covid-19 se sera calmée, les joueurs professionnels continueront à organiser leur saison autour des tournois du Grand Chelem, leurs principaux objectifs.
Quelles sont les nouvelles règles qui vont être introduites ?
Patrick Mouratoglou a expliqué vouloir assouplir significativement les règles de conduites sur le court, et autoriser le coaching.
Mais il n’a pas mentionné d’évolutions des règles de jeu et de comptage des points. Testées par l’ATP, par exemple lors des ATP Next Gen Finals, les sets de 4 jeux, sans avantage et avec l’autorisation du let au service, ne sont pas mentionnés par Mouratoglou. Dans sa tentative d’attirer “un public plus jeune“, le Français de 49 ans ne semble pas compter sur un raccourcissement des matchs. C’est pourtant l’un des principaux facteurs qui nuisent à l’audience du tennis selon Donald Dell, ancien joueur et l’un des créateurs de l’ATP : “Les matchs masculins sont si longs, c’est un frein à l’audience du tennis. À notre époque, vous ne pouvez pas espérer que les jeunes restent 4 heures devant un match”.
Le premier levier de Mouratoglou pour séduire les jeunes supporters est de prendre des libertés par rapport au code de conduite en “encourageant les joueurs à exprimer leurs émotions“. Ce code de conduite vise à sanctionner, à l’initiative de l’arbitre de chaise ou du juge-arbitre, tout comportement ou action non conforme des joueurs sur le terrain. Aujourd’hui, casser sa raquette, frapper violemment une balle en dehors d’un point, crier une injure sont par exemple interdits dans le code de conduite de l’ATP et de la WTA. Ils établissent une série de sanctions en cas de violations, allant de l’avertissement à la disqualification, selon la gravité et le degré de récidive.
La possibilité pour les entraîneurs, les physios, la famille et les amis des joueurs d’être présent sur le terrain et de parler au joueur au changement de côté est la deuxième grande évolution de l’UTS. Ces interactions changeraient le jeu tactiquement et mentalement.
Enfin, Patrick Mouratoglou veut donner aux spectateurs et téléspectateurs la possibilité d’interagir avec les joueurs. “Je veux que les fans puissent parler avec les joueurs. Pas à tous moments, mais à certains moments. Pour pouvoir poser des questions du genre “pourquoi tu as joué comme cela à 30-15, pourquoi t’as fait ce coup”, a-t-il expliqué à Josh Cohen. Les joueurs sont de plus en plus habitués à répondre aux questions des fans sur les réseaux sociaux. Mais les voir répondre aux questions pendant les matchs serait un grand bouleversement.
Dans un premier temps, l’UTS sera lancé à huis clos. Mais cela n’empêchera peut-être pas Mouratoglou de lancer des innovations utilisant les technologies, comme il l’a mentionné : “Je veux que les joueurs communiquent avec la foule, que celle-ci soit dans le stade ou à la maison“.
Comment l’UTS peut-elle se jouer malgré l’épidémie de Covid-19 alors que l’ATP et la WTA ont suspendu leurs circuits ?
Le 1er avril, l‘ATP et la WTA ont annoncé conjointement l’extension de la suspension de leurs circuits jusqu’au 13 juillet 2020, en raison de l’évolution de la pandémie de Covid-19. Ils ont invoqué leur volonté de “donner la priorité à la santé et à la sécurité de la communauté du tennis et du grand public“.
L’essence même du tennis professionnel, c’est de vivre des tournois réunissant du personnel, des joueurs et des fans venus du monde entier en un même lieu, et ce dans de nombreux pays tour à tour. Dans le contexte d’une telle pandémie, qui a contraint de nombreux pays à limiter les déplacements et de fermer leurs frontières, les circuits ATP et WTA sont à mille lieux de pouvoir se se tenir.
Dans leur communiqué du 1er avril, les organisateurs de Wimbledon ont justifié l’annulation de l’édition 2020 du tournoi en invoquant leur désir de protéger “le grand nombre de personnes nécessaires à sa préparation, des ramasseurs de balles aux officiels, juges de ligne, agents de sécurité, personnels d’entretien des terrains, joueurs, fournisseurs, journalistes et techniciens et qui se réunissent sur le site“.
David Goffin a expliqué à Tennis Majors qu’il doutait d’une reprise en 2020 : “Les événements sont annulés les uns après les autres, les semaines passent vite. La sécurité doit être assurée partout pour pouvoir jouer un tournoi international. La bataille est loin d’être gagnée. Mais qui sait, gardons l’espoir“. Rafael Nadal est du même avis.
L’organisation d’un Grand Chelem ou d’un grand événement ATP ou WTA nécessite beaucoup plus de personnel que l’organisation d’un évènement comme l’UTS. L’entraîneur français a mentionné une conséquente procédure de test pour se protéger du Covid-19 : un premier test 15 jours avant le début du tournoi, puis un second test au début de l’événement, après une quarantaine de 15 jours. Sur le terrain, il veut qu’il y ait deux jeux de balles distincts pour les joueurs, que les changements de côtés se fassent de deux côtés distincts, que les ramasseurs de balles aient des gants. Il reste des points à éclaircir, tels que l’hébergement, la restauration, les juges de ligne, les serviettes des joueurs.
Les éventuelles décisions des autorités politiques quant à d’éventuelles restrictions de circulation semblent être les seules difficultés potentielles. Mais jouer au tennis pour être diffusé à la télévision relève de l’activité professionnelle des joueurs, et le faire dans un lieu privé comme l’Académie Mouratoglou ne place pas l’événement dans la catégorie des manifestations publiques.
Si l’Ultimate Tennis Showdown réussit effectivement à proposer le tennis pendant cette période de restrictions, l’ATP, la WTA et le Grand Chelem pourraient, enfin, revoir leur jugement sur le huis clos, une hypothèse qu’ils semblent peu enclins à envisager pour l’instant.
Sur quelle chaîne sera diffusé l’UTS ?
Patrick Mouratoglou avait affirmé le 16 avril qu’il avait “déjà commencé à discuter avec les diffuseurs” mais que ce sont des discussions “légères“. Il avait précisé qu’il allait “passer à des discussions plus importantes” et espérait communiquer bientôt.
L’entraîneur français a donné deux indications sur l’identité du futur ou des futurs diffuseurs. Il a affirmé que les gens “devraient pouvoir le regarder gratuitement“, et que cela pourrait se faire “sur Internet, qui sait“.
Un site nommé “UTS live” a été dévoilé peu après l’annonce de Patrick Mouratoglou.